Depuis 2023, l’association Weza propose à des jeunes filles de Zanzibar de participer à des entrainements de football chaque weekend. Ce défi est ambitieux sur l’île tanzanienne à majorité musulmane, où les traditions cantonnent souvent les femmes à la maison. L’équipe des « Zanzibar Sparks » (« étincelles de Zanzibar ») semble montrer une jeunesse désireuse de casser les stéréotypes du passé.
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Avec notre envoyée spéciale à Stone Town, Élodie Goulesque
Ce samedi matin-là, le coach Talib pratique un jeu particulier : les joueuses de foot doivent courir se mettre à l’abri d’agresseurs dans un rectangle sur l’herbe. Ce dernier symbolise l’endroit où elles se sentent en sécurité, souvent l’école ou la maison. Une technique d’apprentissage par le jeu pour les sensibiliser aux menaces du quotidien comme l’explique Talib. « Nous donnons les moyens pour que ces enfants soient en sécurité et soient conscients de comment protéger leur corps et comment se protéger de toutes sortes d’exploitation et d’abus », relève-t-il.
Quand Sabra, 14 ans, a annoncé à son entourage qu’elle allait faire partie de l’équipe, les réactions étaient plutôt négatives. « Ils ont dit que j’allais mal me comporter en étant une femme qui joue au foot », explique-t-elle. Mais le soutien de ses parents l’a aidée. Aujourd’hui, elle veut devenir joueuse professionnelle avec un but en tête : « Je veux prouver aux gens que ce sport n’est pas immoral », clame-t-elle.
Après quatre heures d’entraînement entrecoupées de jeux sur l’hygiène intime ou le harcèlement, c’est l’heure de partir. Les vêtements de sport colorés sont remplacés par les hijabs. Le cours normal de la vie reprend. Mayasa, 14 ans, continue pourtant à propager les messages qu’elle a appris à l’entrainement. « J’essaye de dire aux autres filles que jouer au foot ce n’est pas jouer au voyou et que cela peut les aider et leur offrir des opportunités », termine-t-elle.
Des filles qui, malgré leur âge, révolutionnent déjà les normes sociales à Zanzibar.
Ici, on n’enseigne pas seulement le sport. On les éduque aussi à affronter la vie. On parle de sujets essentiels comme les droits des enfants, le droit d’être entendu… Nous évoquons sans tabou les menstruations. Grâce à ça, les filles sont informées et apprennent à les gérer et à en parler pour savoir comment y faire face au moment venu.
Dalila Mtwana, une des entraineuses des Zanzibar Sparks, a recruté les premières joueuses. Un rôle difficile à cause des préjugés sur le football, sport considéré comme réservé aux garçons à Zanzibar. Mais trois ans après et avec une centaine de jeunes filles recrutées, la perception de cette équipe féminine change petit à petit.