Violences persistantes au Nigeria : l’État de Katsina une nouvelle fois frappé


Le nord du Nigeria demeure en proie à une violence endémique, où les attaques ciblant civils et lieux de culte se multiplient. Dans l’État de Katsina, endeuillé par une attaque meurtrière dans une mosquée, l’insécurité s’aggrave malgré les efforts militaires. Entre groupes armés locaux, menaces djihadistes et ripostes de l’armée, la région vit sous tension permanente.
Le Nigeria a une fois de plus été secoué par une attaque meurtrière. Le dimanche 18 août 2025, treize fidèles ont été tués lors d’une attaque armée dans une mosquée du village de Mantau, dans l’État de Katsina, au nord du pays. Un événement tragique qui s’ajoute à une longue liste de violences perpétrées par des groupes armés dans la région.
Selon les déclarations de Nasir Muazu, commissaire à la Sécurité intérieure et aux Affaires intérieures de Katsina, des hommes lourdement armés ont fait irruption à l’aube dans la mosquée où les fidèles s’étaient réunis pour la prière du matin. Sans sommation, les assaillants ont ouvert le feu, tuant 13 personnes et blessant plusieurs autres, dont certaines grièvement. L’attaque semble avoir été préméditée et ciblée, dans une région déjà marquée par l’insécurité et les activités croissantes de groupes criminels.
Contexte sécuritaire tendu dans le nord du pays
Depuis plusieurs années, le Nigeria est en proie à une montée en puissance de divers groupes armés, souvent qualifiés de « bandits » dans le langage courant, mais qui agissent parfois avec une organisation proche de celle des milices. Ces groupes sévissent surtout dans les États du nord-ouest et du centre-nord, comme Zamfara, Kaduna, Sokoto, et Katsina. Les attaques contre des villages isolés, des écoles, des convois de voyageurs et même des institutions religieuses sont devenues courantes.
Les motifs sont multiples : enlèvements contre rançon, conflits communautaires, ou encore lutte pour le contrôle des ressources locales. La veille de l’attaque de Mantau, l’armée nigériane avait mené une opération aérienne dans la région voisine de Danmusa, visant des camps de ces groupes armés. L’intervention avait permis la libération de 62 otages. Il est possible que l’attaque contre la mosquée ait été une réponse à cette opération militaire.
Boko Haram et ISWAP : une menace toujours présente
À cette insécurité généralisée s’ajoute la présence active de groupes djihadistes, en particulier Boko Haram et sa branche dissidente, l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Même si ces groupes sont historiquement implantés dans le nord-est du pays, leur influence s’étend progressivement à d’autres régions, parfois par alliances opportunistes avec des bandits locaux. Les lieux de culte ne sont pas épargnés.
L’on se souvient notamment de l’attaque de la mosquée de Mubi en 2017 (État d’Adamawa), attribuée à Boko Haram, qui avait coûté la vie à plus de 50 fidèles. Il y a aussi eu l’attentat de 2022 contre l’église catholique de Saint-François à Owo (État d’Ondo, dans le sud-ouest), qui avait tué une quarantaine de personnes, montrant que même les zones jusque-là relativement épargnées peuvent être touchées. Face à cette vague de violences, le gouvernement nigérian a multiplié les opérations militaires et les lois dissuasives.
Des mesures sécuritaires insuffisantes ?
L’enlèvement contre rançon est désormais passible de la peine de mort. Pourtant, les attaques se poursuivent, mettant en lumière l’inefficacité relative des stratégies sécuritaires mises en place. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette difficulté, notamment le manque de coordination entre les forces de sécurité, la faiblesse des infrastructures dans les zones rurales, la corruption qui gangrène certains rouages de l’administration, la pauvreté extrême et le chômage, qui nourrissent le recrutement dans les rangs des groupes armés.
Les populations locales vivent dans une peur constante. Nombre de villages s’organisent en groupes d’autodéfense, souvent peu armés et mal formés. Les déplacements se font de moins en moins souvent la nuit, et les activités économiques souffrent. L’insécurité mine aussi les services de base : éducation, santé, agriculture. Les leaders religieux et communautaires appellent régulièrement le gouvernement à renforcer la protection des civils, en particulier lors des rassemblements dans les lieux de culte.