Trafic d’or au Cameroun: l’État perdrait près de 250 millions d’euros de recettes fiscales

Au Cameroun, où part l’or produit dans le pays ? La question agite les médias depuis la publication, le 10 décembre, du rapport 2023 du Comité ITIE Cameroun sur le secteur extractif, une référence internationale en matière de transparence et de redevabilité dans la gestion des ressources naturelles. Le document couvre plusieurs secteurs – pétrole, gaz et minerais – mais ce sont surtout les chiffres relatifs à la production et aux exportations d’or qui suscitent des interrogations.
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Selon les données officielles, 953 kilogrammes d’or ont été produits au Cameroun en 2023. Sur ce volume, seulement 22,3 kilogrammes ont été officiellement exportés.
Pourtant, si l’on additionne les importations déclarées en 2023 par les pays acheteurs, principalement les Émirats arabes unis (à près de 90 % selon les statistiques internationales), le total atteint 15,2 tonnes d’or d’origine camerounaise, soit près de 600 fois plus que les exportations officiellement déclarées par Yaoundé.
« Pratiquement toute la production passe par des voies illégales »
« Rien n’est maîtrisé », affirme le géologue Dr Youmssi Bareja. « C’est pratiquement toute la production du Cameroun qui passe par des voies illégales. Imaginez-vous: 15 tonnes, cela représente 15 000 kilos d’or, soit environ 900 milliards de francs CFA (1 366 200 000 €) », explique-t-il.
Un manque à gagner pour les finances publiques. En théorie, la Sonamines, la société minière d’État, prélève 5 % de la production nationale. Or, selon les estimations, les pertes fiscales potentielles liées à ces flux non déclarés pourraient atteindre 165 milliards de francs CFA (plus de 250 470 000 €).
« Les conséquences sont énormes. Aujourd’hui, selon le rapport ITIE, l’impact des revenus en taxe minière dans notre budget est en dessous de 1 %, 1 % ! alors que au même moment des pays déclarent avoir acheté 15 tonnes d’or du Cameroun, c’est une perte énorme alors que aujourd’hui les prix de l’or est exceptionnellement élevé. N’importe quel projet or est rentable », souligne l’expert.
Renforcer les contrôles aux frontières
Face à ces dysfonctionnements, le rapport ITIE recommande notamment de renforcer les contrôles aux frontières, d’identifier et démanteler les circuits illégaux, d’améliorer la coordination entre les différentes institutions concernées – ministères, Sonamines et Douanes – et de clarifier leurs rôles afin d’assurer une meilleure traçabilité de l’or camerounais.
Sollicitées, les autorités camerounaises n’ont, pour l’heure, pas répondu.
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