Alors que la guerre civile fait rage depuis plus de deux ans au Soudan, le chef des droits de l’homme de l’ONU a déploré, jeudi, une nouvelle flambée de violences meurtrières dans la région du Kordofan, dans le centre du pays. Selon l’ONU, au cours des derniers jours, des dizaines de civils ont été tués aussi bien par les paramilitaires que par l’armée régulière.
« Il est affligeant de constater que plus de deux ans après le début du conflit, les parties continuent de faire preuve d’un mépris total pour la vie et la sécurité des civils », a déclaré Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits humains. « Toutes les violations doivent faire l’objet d’enquêtes indépendantes, et les responsables être traduits en justice », a-t-il ajouté dans un communiqué.
Au moins 90 morts au Kordofan
Le bureau de M. Türk indique avoir vérifié le meurtre d’au moins 60 civils par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) à Bara, dans le Nord-Kordofan, depuis le 10 juillet. Certains groupes de la société civile vont même jusqu’à évoquer un bilan de 300 morts.
Parallèlement, une trentaine de civils sont morts dans des bombardements de l’armée régulière sur deux villages du Kordofan occidental.
Ces violences s’inscrivent dans le cadre du conflit qui oppose depuis avril 2023 les forces du général Abdel Fattah al-Burhan, chef de l’armée, aux paramilitaires dirigés par le général Mohamed Hamdan Daglo, dit « Hemedti ». Alors que Khartoum, le Darfour et le Kordofan sont devenus les principaux foyers du conflit, la situation humanitaire se dégrade à grande vitesse.
Des centaines de familles en fuite
Depuis une semaine, les combats se sont intensifiés autour de la ville de Bara, à une trentaine de kilomètres d’El-Obeid, capitale du Nord-Kordofan. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 700 familles ont été contraintes de fuir Bara en moins de cinq jours. Elles se dirigent vers d’autres localités du Nord-Kordofan, ainsi que vers la capitale soudanaise, Khartoum, ou l’État du Nil Blanc, dans l’espoir d’échapper aux violences.
L’ONU fait également état de « rapports inquiétants » sur une possible offensive imminente des Forces de soutien rapide sur El-Obeid, ce qui fait craindre un nouveau désastre humanitaire.
El-Fasher toujours assiégée
Plus à l’ouest, la situation reste critique à El-Fasher, la capitale du Darfour du Nord, assiégée depuis quinze mois par les FSR. Les 11 et 12 juillet, de nouvelles attaques ont visé la ville, provoquant des pertes humaines parmi les civils.
« Une escalade des hostilités au Darfour-Nord et au Kordofan ne fera qu’aggraver les risques pour les civils et la situation humanitaire déjà désastreuse », a prévenu Volker Türk.
Une épidémie de choléra hors de contrôle
À cette insécurité persistante s’ajoute une épidémie de choléra en pleine recrudescence. À Tawila, dans le Darfour du Nord, plus de 300 cas ont été signalés en deux semaines. La localité accueille quelque 330.000 déplacés venus du camp de Zamzam, et les structures médicales y sont débordées.
Dans la commune d’Um Keddada, également au Darfour du Nord, au moins cinq personnes seraient mortes après avoir consommé de l’eau contaminée. Aucun centre de traitement n’est opérationnel dans la région, et les installations sanitaires ne fonctionnent plus. La propagation de la maladie est facilitée par les déplacements massifs de populations, avec un risque d’extension vers le Kordofan occidental.
Depuis la résurgence du choléra fin juillet 2024, plus de 87.000 personnes ont été infectées à travers le Soudan, et 2.260 décès ont été enregistrés. Face à l’effondrement des services de santé et à l’intensification des combats, les agences humanitaires alertent sur une catastrophe sanitaire imminente.