Soudan: les violences à El-Fasher «pourraient constituer des crimes de guerre», selon le procureur de la CPI

Le 26 octobre, les Forces de soutien rapide (FSR) du général Hemedti, opposées depuis le 15 avril 2023 à l’armée du général al-Burhan, ont pris le contrôle de la capitale de l’État du Darfour-Nord, dans l’ouest du Soudan. Depuis, les témoignages de civils sur les exactions des FSR ne cessent d’affluer. Lundi 3 novembre, le bureau du procureur de la Cour pénale internationale a averti que les atrocités commises à El-Fasher « pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ».

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Depuis la prise de la ville d’El-Fasher, capitale du Darfour-Nord, par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) le 26 octobre, après 18 mois de siège, la ville est soumise à un blackout total et les télécommunications sont toujours coupées. Les témoignages sur les atrocités commises continuent cependant à affluer.

Environ 70 000 personnes ont réussi à quitter El-Fasher, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), dont 5 000 sont arrivées à Tawila, à 60 kilomètres. Mais des dizaines de milliers de personnes restent piégées dans la ville, où la situation est « apocalyptique », selon l’expression du ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul, ce week-end.

Des centaines de personnes qui cherchent à quitter el-Fasher sont interceptées par les FSR qui confisquent leurs moyens de transport et les obligent à rentrer dans la ville ou les kidnappent. Le Réseau des médecins soudanais indique que des milliers de personnes sont ainsi détenues par les FSR. Ces personnes sont rassemblées dans des geôles improvisées. Certaines sont libérées et témoignent des atrocités subies.

C’est le cas d’un homme qui requiert l’anonymat, joint par l’AFP. Il affirme qu’il a été arrêté en compagnie de 200 autres personnes, dans le petit village de Garni, près d’El-Fasher, passage obligatoire pour les habitants qui fuient la ville. Le groupe est resté enfermé dans une école où des nouveaux détenus arrivaient tous les jours. Ils étaient battus, insultés, et ne recevaient qu’un repas par jour, témoigne-t-il.

Depuis le 26 octobre dernier, les témoignages se multiplient sur les exactions : liquidations sommaires, viols, pillages et attaques contre les humanitaires. Certains font état de taxes imposées sur les proches des détenus afin d’obtenir leur libération.

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Faire classer les FSR parmi les groupes terroristes

Depuis la prise d’El-Fasher, les autorités de Port-Soudan poussent par ailleurs à nouveau pour que les paramilitaires soient considérés comme un groupe terroriste. Le gouvernement soudanais appuie sa requête sur ces exactions qui continuent d’être rapportées du Darfour, souligne notre correspondante régionale, Gaëlle Laleix. Dans un communiqué, publié ce week-end, l’ambassade du Soudan en France a dénoncé « des massacres contre des civils […] ainsi que des opérations de nettoyage ethnique à grande échelle » menée par ce qu’elle qualifie de « milice terroriste ».

La requête des autorités de Port-Soudan n’est pas récente. Dès 2023, au début de la guerre, le général Abdel Fattah al-Burhan, commandant de l’armée régulière, avait demandé aux Nations unies de considérer les FSR comme un groupe terroriste.

Pour la première fois, cette requête a un écho international. Jeudi, des membres de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain, ont demandé au département d’État d’étudier la question. « L’attaque prédite de longue date, menée par les FSR contre la population civile d’El-Fasher, en raison de son ethnie, démontre clairement que les États-Unis doivent envisager de désigner les FSR comme une organisation terroriste », affirme leur communiqué.

Cette désignation implique des sanctions comme notamment le gel d’avoirs à l’étranger ou encore un embargo sur les armes. En mai 2024, le Trésor américain a déjà puni deux cadres des FSR pour leur rôle dans le siège d’El-Fasher.

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