Soudan: les États-Unis et les Européens peuvent-ils encore infléchir le conflit?

Au Soudan, les différentes tentatives de dialogue pour obtenir un cessez-le-feu s’enlisent. Le chef de l’armée soudanaise, le général al-Burhan, a indiqué qu’il ne dialoguerait pas avec les paramilitaires du général Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, tant que ces derniers ne se retireront pas des zones qu’ils occupent. Les paramilitaires, eux, malgré l’annonce d’une trêve humanitaire, ont lancé une importante offensive cette semaine sur la région du Kordofan, devenue la nouvelle ligne de front. La communauté internationale a-t-elle encore les moyens d’infléchir le conflit ? Notamment les États-Unis et les Européens ?
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Survenue il y a deux semaines, la rencontre entre Donald Trump et Mohammed ben Salman, à Washington, avait suscité un peu d’espoir. Le président américain avait annoncé qu’il allait s’impliquer dans le dossier soudanais à la demande de son ami, le prince héritier saoudien.
Une implication personnelle du chef de l’État américain pourrait apporter un poids supplémentaire au groupe de médiateurs sur le Soudan, estime le chercheur Alex de Waal, directeur exécutif de la Fondation pour la paix mondiale de l’université Tufts. Une médiation qui n’a pour l’instant pas donné de résultat.
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Les Émirats arabes unis accusés de fournir des armes aux paramilitaires
Mais Donald Trump est-il prêt pour autant à faire pression sur les Émirats arabes unis ? Ces derniers sont accusés par les autorités soudanaises et des experts de l’ONU de fournir des armes aux paramilitaires, même si Abou Dhabi dément officiellement toute implication.
Les enjeux économiques sont bien trop importants, souligne Cameron Hudson, chercheur au Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS) à Washington. Il rappelle qu’en mai dernier, l’administration américaine a autorisé la vente de 1,4 milliard de dollars d’équipement militaire aux Émirats arabes unis. Mais aussi qu’Abou Dhabi a investi 2 milliards de dollars dans une société de crypto monnaie détenue par la famille Trump.
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Les Européens dénoncent l’escalade, mais ne pointent pas les soutiens étrangers
Qu’en est-il, de leur côté, pour les Européens ? Réunis à Strasbourg la semaine dernière, les députés européens ont dénoncé l’escalade de la guerre au Soudan et condamné les violations systématiques des droits de l’homme. Mais aucune mention n’a été faite du soutien de puissances étrangères aux deux belligérants soudanais, initialement prévu dans le texte de la résolution.
Il faut dire que les Émirats arabes unis, accusés d’être le principal soutien des forces paramilitaires, avait envoyé une délégation à Strasbourg. Une majorité de parlementaires s’est opposée à ce que les Émirats soient mentionnés, note un observateur, l’Union européenne négocie en ce moment même un accord commercial avec les Émirats Arabes Unis.
Pour le chercheur Andreas Krieg, du King’s College à Londres, les investissements Émiratis en Europe sont bien trop importants pour être ignorés par les différents pays. À commencer par la France qui a accueilli le président Emirati, Mohammed ben Zayed, à paris en février dernier, ce dernier avait alors annoncé un investissement de plus de 30 milliards d’euros dans la création d’un data center dans l’hexagone.
Des investissements colossaux en France, mais également en Italie, en Espagne, souligne le chercheur, qui explique peut-être le silence gêné des européens sur l’implication Émirati au Soudan.



