Soudan: L'appel international à une trêve rejeté par Khartoum

Face à l’impasse dans le conflit soudanais qui a fait depuis son déclenchement en 2023, des milliers de morts, les Etats-Unis, les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite et l’Egypte ont uni leurs voix pour réclamer une trêve immédiate et la mise en place d’un gouvernement dirigé par des civils.

Leur démarche traduit la crainte de voir le chaos soudanais se transformer en une poudrière incontrôlable qui pourrait menacer l’équilibre de toute la région. Reste à savoir si cette initiative quadripartite pourra résoudre cette équation soudanaise particulièrement complexe, et stopper l’escalade en cours en ouvrant une fenêtre de dialogue entre les belligérants.

La diplomatie internationale s’est montrée incapable de favoriser un cadre de dialogue entre les acteurs locaux


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Mais comme l’histoire récente du Soudan a montré combien les compromis négociés ou imposés de l’extérieur peinent à dessiner un avenir politique où la voix des civils ne serait plus confisquée ou étouffée, tous les observateurs avertis de la situation actuelle savaient que sous le couvert de la souveraineté nationale, les protagonistes allaient encore préférer la logique des affrontements à celle de la diplomatie internationale.

Cela a été malheureusement confirmé par le rejet, samedi dernier, de cet appel international à une trêve et à une mise en place d’un gouvernement civil par le Général Al Burhan qui contrôle l’armée régulière et une bonne partie du pays. En refusant la main tendue des partenaires étrangers, l’armée redoute qu’un retour des civils au pouvoir, ne fragilise son emprise politique et économique sur tout ou partie du pays, et n’ouvre la voie à des poursuites judiciaires contre les responsables des graves violations des droits de l’homme enregistrées depuis le début en 2019, du chaos en cours.

Ce refus catégorique d’ouvrir les portes d’une transition civile marque, en tout état de cause, un revers pour la diplomatie internationale qui s’est montrée incapable de favoriser un cadre de dialogue entre les acteurs locaux dans le but ultime de construire un Etat où la légitimité ne se fonde pas sur la force des armes, mais sur le consentement des citoyens.

A vrai dire, la perspective d’une paix véritable et durable s’éloignera chaque jour davantage, aussi longtemps que les tentatives de compromis entre les Soudanais dans leur ensemble, se heurteront à l’intransigeance des deux généraux rivaux qui veulent garder pour eux seuls, le monopole de l’Etat et des avantages qui vont avec.

Le désespoir chez de nombreux soudanais est d’autant plus grand qu’ils ne posent même plus la question de savoir si la paix reviendra dans leur pays, mais plutôt combien de vies devront encore être sacrifiées avant qu’elle ne devienne possible. Comment d’ailleurs mettre fin à la comptabilité macabre, si les Soudanais eux-mêmes ne semblent pas être enclins à trouver des solutions consensuelles qui transcendent les clivages militaires et les rivalités personnelles entre les différents acteurs du conflit ?

Ce refus scelle la prolongation des combats avec les Forces de soutien rapide

Il est clair que la réponse à cette question ne se trouve pas uniquement dans les chancelleries étrangères ni dans les salles feutrées des négociations. Et l’on comprend pourquoi les propositions américaines, égyptiennes, saoudiennes et émiraties ont été renvoyées aux oubliettes par l’armée soudanaise qui ne mesure peut-être pas les conséquences, pourtant prévisibles, de son acte.

On n’a pas besoin, en effet, d’être le géomancien le plus capé du Gulmu pour savoir que ce refus scelle la prolongation des combats avec les Forces de soutien rapide du frère ennemi, le Général Hamdan Daglo dit Hemetti. Et entrainera une désagrégation plus poussée de l’Etat soudanais, avec comme corollaires, des milliers de déplacés, des hôpitaux débordés, une économie asphyxiée et des interférences étrangères de plus en plus marquées.

Mais comme le sort des civils ne pèse pas assez dans la balance des calculs stratégiques, les Soudanais subiront tous ces supplices, aussi longtemps que la logique des armes primera sur la volonté de dialogue. Gageons que tous ceux qui mènent ces combats fratricides finiront par comprendre que leur puissance actuelle ne résistera pas au temps, et que leur refus obstiné de la paix et du retour des civils au pouvoir aujourd’hui, pourrait bien être le ferment de leur effondrement demain.

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