C’est un nouveau sujet de discorde entre Mogadiscio et l’État semi-autonome du Puntland. Le 19 juillet, un navire battant pavillon comorien, le Sea World, un cargo de 80 mètres, a été intercepté par la marine du Puntland au large de Bareeda, dans le golfe d’Aden. À son bord, une cargaison d’équipements militaires en provenance de Turquie, destinée, selon Mogadiscio, au centre d’entraînement Turksom, géré par Ankara dans la capitale somalienne. Mogadiscio a protesté mercredi 23 juillet, dénonçant un « détournement ». Le Puntland, lui, invoque des raisons de sécurité.
Selon Mogadiscio, le navire qui a été intercepté se dirigeait en toute légalité vers la capitale somalienne, dans le cadre des accords de coopération militaire signés entre la Somalie et la Turquie. Le ministère de l’Information qualifie dans son communiqué l’opération de la marine militaire du Puntland d’acte « de piraterie » et dénonce une « violation de sa souveraineté nationale ».
La version des autorités du Puntland est bien différente. Elles avancent que la cargaison représentait une menace potentielle pour la sécurité de la région. Le navire aurait selon elles stationné deux jours au large de ses côtes, sans avoir demandé l’autorisation, avant que la marine n’intervienne. La crainte était, selon les autorités du Puntland, que la cargaison ne se retrouve entre les mains de groupes affiliés à l’État islamique, présents dans la région. Une enquête est en cours pour examiner cette cargaison. L’incident met en lumière un contentieux ancien et sensible : celui du contrôle des eaux territoriales.
Une escalade des tensions
En théorie, la Constitution somalienne confère cette prérogative à l’État fédéral. En pratique, le Puntland, premier État fédéré créé en Somalie, a toujours géré son propre littoral, avec sa propre marine et ses propres règles. Cet incident est surtout révélateur de l’escalade des tensions entre Mogadiscio et le Puntland. Depuis plus d’un an, la région a suspendu sa coopération avec les institutions fédérales pour protester contre une série d’amendements constitutionnels qui réduisent le rôle des États fédérés dans le système électoral.
Enfin, cette affaire relance le débat sur la circulation des armes dans un pays encore instable. Si l’ONU a levé, en décembre 2023, l’embargo vieux de trente ans sur les armes destinées à la Somalie, cette levée reste conditionnée. Les armes ne doivent pas tomber entre les mains d’Al-Shabaab ou d’autres groupes extrémistes, toujours sous embargo.