Sénégal: Mame Maty Mbengue, légende du basketball, se raconte dans un beau livre

Dakar — L’ouvrage de l’ancienne basketteuse Mame Maty Mbengue, écrit en collaboration avec le journaliste sportif Mamadou Koumé, dans sa portée symbolique, va bien au-delà de son titre, « Confidences d’une légende du basketball », pour porter le souffle de pages dignes d’être inscrites dans le roman national sénégalais.

Publié aux Editions L’Harmattan-Sénégal, le livre de 114 pages comprend 12 chapitres allant des débuts de Mame Maty Mbengue à des témoignages sur l’icône du basket sénégalais qu’elle est, en passant par un profil de Bonaventure Carvalho, « éducateur et entraîneur exceptionnel », son palmarès, la Jeanne d’Arc, son club, son séjour au Etats-Unis, sa meilleur amie Adama Diop, sa famille, son entrée au FIBA Hall Of Fame, entre autres.

Dans sa préface à l’ouvrage, l’ancien président sénégalais, Abdou Diouf, évoque à juste titre la « riche carrière sportive » de la basketteuse, qui, selon lui, « se devait d’être racontée pour les générations futures ! »

« En effet, souligne Diouf, Mame Maty Mbengue symbolise, par son talent, l’emblématique équipe nationale de basketball des Lionnes du Sénégal, dont elle a été l’intrépide capitaine. »

Elle a eu, ajoute-t-il, « un brillant palmarès à la fois individuel avec ses nombreuses prestations et distinctions personnelles et collectives avec l’équipe nationale des Lionnes du Sénégal. »

« Evoquer sa carrière de joueuse, qui a été brillante à tous points de vue, est une bonne idée. Elle replonge, pour ceux qui l’ont vécue, dans les grands moments du basket sénégalais et africain. Pour les jeunes générations, c’est une occasion de découvrir comment elle a bâti sa carrière et les différentes étapes qui ont fait d’elle une référence. Elles ont de qui tenir si elles veulent marcher sur ses pas », lit-on dans l’avant-propos de ce livre illustré de plus de 70 photos.

« Ce qui est le plus étonnant dans la trajectoire de sa carrière, c’est la rapidité avec laquelle elle a brûlé les étapes. Elle est appelée chez les Lionnes à l’âge de 16 ans, deux ans seulement après avoir commencé à s’adonner à la balle orange. C’est dire qu’elle a vite appris et assimilé la technique et les fondamentaux de la discipline, grâce à un potentiel insoupçonné. »

Mame Maty Mbengue est venue au basket à l’âge de 14 ans, pas vraiment tôt. « Je dois ma venue au basket à M. Larry Diouf, qui a beaucoup contribué au développement de notre sport avec le mini basket », raconte-t-elle, ajoutant : « Quand il m’a vue pour la première fois, ma taille a dû impressionner le formateur, qui était en quête de jeunes qu’il voulait attirer vers le basketball. Il s’est renseigné à mon sujet et est ensuite allé voir mon père qui était dirigeant à la Jeanne d’Arc ».

Mame Maty, « une fille de la Jeanne d’Arc »

Larry Diouf la confie à André Akibodé, un entraîneur qui l’initie « aux fondamentaux du basketball, à l’âge de 14, en 1983. De minime à junior, elle brûle les étapes en deux ans. Le fait de vouloir rejoindre les aînées, Anna Basse, Nadia Bengeloun, Madeleine Senghor…, la motive ».

Mame Maty Mbengue parle de Bonaventure Carvalho qu’elle considère comme un père, « à la fois un éducateur et un entraîneur exceptionnel », « exigeant envers soi-même », ne pardonnant « aucun écart sur le terrain et dans la discipline ».

« Après l’éducation reçue de mes parents, Bona m’a forgée et m’a permis d’être la personne que je suis aujourd’hui. C’est-à-dire une sportive accomplie et une femmes respectable », souligne-t-elle.

Le chapitre sur le palmarès, déroulé sur une dizaine de pages, est parsemé de souvenirs des campagnes internationales de l’équipe nationale et d’anecdotes comme celle racontée en fin d’ouvrage par le journaliste sportif Mamadou Diouf, spécialiste reconnu du basketball africain.

« Son plus morceau d’anthologie date de mars 1990, à Tunis, à l’occasion de la 12ème édition du championnat d’Afrique féminin des nations de basket (Afrobasket) », raconte Diouf.

Mame Maty Mbengue était étudiante à l’université d’Ohio, aux Etats-Unis, où elle a décroché un MBA en business administration. Le journaliste poursuit en termes qui font de cet épisode un morceau d’anthologie : « Elle transite par Paris pour rallier la capitale tunisienne. Sans visa, elle débarque à l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle. Arrêtée et menottée de 7h à 20 h, elle est relâchée. Meurtrie dans sa chair, elle débarque à Tunis en pleurs, à la veille de la demi-finale. Son dévouement à la Cause Sénégal est récompensé par ce dernier panier (70-68) marqué à la dernière seconde et qui a valu aux Lionnes la médaille d’or ».

Mame Maty Mbengue s’est construit le plus beau palmarès pour un champion sportif sénégalais : championne d’Afrique chez les juniors (1985), six fois chez les séniors (1984, 1990, 1992, 1997, 1999, 2000), deux fois médaillée d’or aux Jeux africains (1995, 1999), médaillée d’or des Jeux de la Francophonie (1997), trois participations aux Championnats du monde (1985, 1990, 1998), une aux Jeux Olympiques (2000). S’y ajoutent des distinctions individuelles : reine du basket (1986), Lion d’or (1986, 1988, 1998 – avec les Lionnes), Linguère du sport (2006), meilleur basketteuse du cinquantenaire pour l’Association nationale de la presse sportive et le FIBA Afrique (2010).

Si la basketteuse a pu se construire comme joueuse et championne, c’est parce qu’elle a eu comme base sportive la Jeanne d’Arc, club qu’elle considère comme sa « deuxième famille ».

« Je suis une fille du club », dit-elle, se désolant de la situation actuelle de la section de football. « Qu’on le veuille ou non, ajoute Mame Maty, le football était la locomotive de la Jeanne d’Arc qui a produit de nombreux grands joueurs et gagné beaucoup de titres ».

Première femme africaine entrée au Hall Of Fame de la FIBA

L’ancienne capitaine de l’équipe nationale parle aussi de son séjour au Etats-Unis, d’Adama Diop, sa « meilleure amie » dont elle raconte les circonstances du décès à l’âge de 29 ans, en 1998, « au sommet de sa carrière ». Mame Maty Mbengue consacre un chapitre au présent Abdou Diouf, « un bienfaiteur des Lionnes », qui les appelait « directement » pour les féliciter lorsqu’elles gagnaient à l’étranger, « donnait des instructions » pour qu’elles soient accueillies dans le salon d’honneur de l’aéroport et les recevait « directement » au Palais présidentiel.

Abdou Diouf, auteur de la formule « Ku def lu rëy am lu rëy » (celui qui réalise quelque chose de grand, obtient une récompense à la hauteur de sa réalisation), a offert aux Lionnes des appartements au quartier des Maristes après leur titre de championnes d’Afrique en 1997.

Mame Maty regrette aujourd’hui le problème rencontré par les Lionnes avec ces appartements qui ont été démolis pour des défauts de construction, estimant que malgré le fait que l’Etat a remis à chacune d’elles une somme de 35 millions en guise de dédommagement, « cela ne règle pas le problème ».

Les derniers chapitres sont consacrés à l’entrée, en septembre 2022, de la basketteuse au FIBA Hall Of Fame, temple de la renommée créé en 1991 par la Fédération internationale de basketball pour « honorer les plus grandes vedettes du basketball international (joueurs, entraîneurs, officiels et personnalités marquantes) ». Cette parie revient aussi sur sa famille léboue et sa vie de femme mariée, mais également sur des témoignages d’hommes et de femme qui l’ont connue et pratiquée.

Au sujet de son entrée au FIBA Hall Of Fame, Mame Maty Mbengue dit : « Je remercie la FIBA de m’avoir fait le grand honneur d’être la première femme africaine à faire partie de la légende Hall Of Fame. C’est un privilège incroyable de figurer parmi les personnes qui ont joué un rôle clé dans l’histoire et le développement du basketball […] ».

Elle ajoute : « Mon amour pour le basket a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Le basket m’a donné une réputation dont je suis fière. Je suis aussi fière de pouvoir inspirer les générations futures ».

Ces mots font écho à l’intention qui a été à l’origine de ce livre d’offrir l’itinéraire d’une basketteuse exceptionnelle doublée d’une femme accomplie et d’une personnalité respectée en exemple aux générations actuelles et à venir.

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