Rwanda : la contraception autorisée dès 15 ans, entre avancée sanitaire et débat moral


C’est une décision qui fait date au Rwanda et pourrait marquer un tournant dans la gestion de la santé reproductive des adolescentes en Afrique. Le Parlement rwandais a approuvé une nouvelle loi abaissant de 18 à 15 ans l’âge légal pour accéder aux services de contraception.
Une mesure saluée par les défenseurs des droits humains, mais qui divise profondément l’opinion publique.
Un choix motivé par l’urgence sanitaire
À l’origine de cette réforme, le ministre de la Santé, Sabin Nsanzimana, pointe une réalité préoccupante : en 2024, plus de 22 000 grossesses non désirées ont été enregistrées chez les adolescentes. Selon lui, l’inaccessibilité des services de santé reproductive aux mineures était un facteur clé de ce phénomène. Avec cette nouvelle loi, les jeunes filles du Rwanda de 15 ans pourront désormais accéder à la pilule et aux préservatifs, sans l’autorisation préalable des parents. L’objectif : freiner le nombre de grossesses précoces, limiter le décrochage scolaire et réduire les risques d’avortements clandestins.
Des associations saluent une avancée progressiste
Pour les organisations de défense des droits humains, cette loi représente une victoire. John Scarius, directeur des programmes de l’Initiative des Grands Lacs pour les droits humains et le développement, y voit une réponse pragmatique à une situation alarmante. Il espère que cette mesure contribuera à diminuer les grossesses précoces, tout en protégeant les jeunes filles contre les dangers des avortements illégaux, souvent réalisés dans des conditions dangereuses. L’Organisation mondiale de la santé rappelle d’ailleurs que l’Afrique subsaharienne reste la région du monde où la baisse du taux de natalité chez les adolescentes est la plus lente.
Une opposition farouche dans les cercles conservateurs
La réforme ne fait pas l’unanimité. Plusieurs voix, notamment dans les milieux religieux et conservateurs, s’inquiètent qu’elle puisse encourager une sexualité précoce. Certains estiment qu’autoriser l’accès à la contraception à 15 ans risque de banaliser des comportements jugés inappropriés à cet âge, et craignent une augmentation des demandes d’avortement, pourtant strictement encadré par la législation rwandaise.
Une réforme qui ne vient pas de nulle part
Ce n’est pas la première fois que la question de l’accès à la contraception pour les mineures est débattue au Rwanda. Une proposition similaire avait déjà été soumise au Parlement en 2022, mais avait été rejetée sous la pression des députés les plus conservateurs. Cette fois-ci, le contexte semble avoir pesé plus lourd que les résistances culturelles. Le pays, qui compte environ 13 millions d’habitants, dont 40 % ont moins de 15 ans, est confronté à des enjeux démographiques et éducatifs majeurs.