RDC : alors que la diplomatie s’active à Doha et Washington, les combats s’intensifient à Masisi et Rutshuru

Le M23 sème la terreur dans le Nord-Kivu
Des rebelles du M23

Malgré les engagements diplomatiques récents pour mettre fin à la crise à l’est de la RDC, la réalité sur le terrain continue de contredire les espoirs de paix. Depuis trois jours, de violents affrontements opposent les miliciens Wazalendo affiliés au Nduma Défense du Congo (NDC) aux rebelles de l’AFC/M23, appuyés par des unités de l’armée rwandaise, dans les territoires de Masisi, Rutshuru et une partie de Walikale, au Nord-Kivu.

Ces combats surviennent à peine quelques jours après deux gestes diplomatiques forts : la signature, à Doha, d’une déclaration de principes entre Kinshasa et les représentants politiques du M23, et la conclusion un peu plus tôt d’un accord bilatéral de paix à Washington entre la RDC et le Rwanda, sous l’égide des États-Unis. Ces initiatives étaient censées ouvrir la voie à une désescalade des tensions et à une stabilisation durable de la région.

Offensive généralisée sur plusieurs fronts

Mais sur le terrain, les armes ont parlé bien plus fort que les protocoles diplomatiques. Selon des sources locales, les affrontements se sont intensifiés dès l’aube du mardi 22 juillet, notamment dans les groupements Nyamaboko Premier et Mufunyi Kibabi du territoire de Masisi. Les villages de Kasenyi, Katobotobo, Karoba, Luke et Bukumbiriri ont été le théâtre de violents échanges de tirs, marquant une recrudescence inquiétante des hostilités.

Dans le territoire voisin de Rutshuru, la situation est tout aussi alarmante. Des combats ont été signalés dans le village de Muko, au sein du groupement Bukombo, dans la chefferie de Bwito. Depuis le week-end, cette zone stratégique est le théâtre d’incidents armés à répétition. Au moins huit civils ont déjà perdu la vie et sept autres ont été blessés, selon des sources locales. Des engins explosifs improvisés et des tirs croisés ont notamment touché Bukombo Centre, Kazuba et Sisa.

À Walikale, dans le groupement Kisimba, les combats entre les rebelles de l’AFC/M23 et les Wazalendo affiliés au NDC, ont atteint leur troisième jour. Des tensions demeuraient particulièrement vives ce mardi à Nkobe et Banakindi, deux villages récemment militarisés.

Un contraste saisissant avec les avancées diplomatiques

Ces affrontements remettent en cause l’efficacité immédiate des efforts de pacification entamés à l’échelle régionale et internationale. La signature à Doha d’un accord de principes entre Kinshasa et les représentants politiques de l’AFC/M23 avait été saluée comme une étape majeure, avec l’ambition de favoriser une solution politique aux conflits récurrents de l’est de la RDC. De même, l’accord de paix bilatéral signé à Washington, sous la médiation américaine, visait à normaliser les relations entre la RDC et le Rwanda, accusé de soutenir militairement le M23.

Mais les événements récents sur le terrain rappellent la complexité d’un conflit où les intérêts géopolitiques se croisent, et où la réalité militaire prime encore largement sur les engagements politiques. Pour de nombreux observateurs, la poursuite des hostilités souligne l’écart grandissant entre le discours diplomatique et les dynamiques locales enracinées dans des rivalités de territoire, d’influence et d’accès aux ressources.

Des risques pour le processus de paix

L’escalade actuelle fait craindre un effondrement des frêles avancées diplomatiques, notamment si aucune mesure de désescalade concrète n’est mise en œuvre à très court terme. Les combats de ces derniers jours pourraient également compromettre le retour des populations déplacées et miner la confiance déjà fragile des communautés affectées par des décennies de violences.

Des voix s’élèvent pour appeler à un renforcement immédiat du mécanisme de surveillance du cessez-le-feu, à l’implication plus active des garants de l’accord de Doha, et à un engagement clair des parties pour la cessation des hostilités. Sans quoi, préviennent plusieurs analystes, le processus de paix pourrait rapidement s’enliser dans l’échec. Il est aussi vrai que la déclaration de principes signée samedi dernier à Doha indique que ses dispositions sont applicables d’ici au 29 juillet. Cela laisse-t-il pour autant entendre qu’entre-temps, les armes peuvent continuer à crépiter avant cette date ? Rien n’est moins sûr.

En attendant, dans les collines de Masisi et Rutshuru, ce sont encore les civils qui paient le prix le plus lourd d’une guerre qui refuse de dire son nom, mais qui se poursuit, jour après jour, malgré les signatures et les promesses.

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