Présidentielle en Côte d’Ivoire: à Abidjan, une journée de vote dans le calme

En Côte d’Ivoire, 8,7 millions de personnes étaient appelées aux urnes dans 25 370 bureaux de vote répartis dans les 31 régions du territoire ivoirien. À Abidjan, dans les centres visités, c’est le calme qui prédominait ce 25 octobre 2025. Récit.
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De notre envoyé spécial à Abidjan,
Il est 7h du matin. Le VTC de Wilfried file sur le pont Henri-Konan-Bédié qui relie Cocody à Marcory, deux communes de la capitale économique de Côte d’Ivoire. « D’habitude, il y a plus de monde sur la route. Les gens restent chez eux parce qu’ils ont peur », sourit, fataliste, le chauffeur de VTC, en référence aux violences durant de précédentes présidentielles. « Du coup, ça va aller vite », prévient-il, au sujet du trajet.
On ne peut pas en dire autant au sujet des opérations à l’Institut Froebel, dans le quartier d’Anoumabo – rendu célèbre par le groupe Magic System. A 7h30, une trentaine de personnes attendent devant la façade crème et verte de ce groupe scolaire. À 8h, heure à laquelle débute normalement le vote, le matériel électoral arrive à bord d’une fourgonnette. Il est déchargé. Les agents électoraux sont appelés à rejoindre chacun leur bureau. À 9h, ça n’a toujours pas commencé. Un pickup de la gendarmerie passe au ralenti. Un agent jette un regard inquisiteur aux personnes qui patientent. 44 000 agents des forces de défense et de sécurité ont été déployés dans tout le pays pour sécuriser le scrutin.
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« Expliquez-moi comment voter ! »
Ailleurs à Marcory, c’est une autre ambiance au collège Notre-Dame d’Afrique. Les chants d’une messe parviennent jusqu’au centre de vote où des électeurs font tranquillement la queue. Dans un bureau, deux observateurs du centre de réflexion américain International Republican Institute (IRI) sont sur place. Une électrice ne sait pas comment remplir son bulletin. « Expliquez-moi comment faire », lance-t-elle, mi-amusée, mi-gênée, à des agents électoraux qui tentent de la guider. Quelques minutes plus tard, une représentante du Conseil national des droits de l’homme (CNDH) vient vérifier que tout est conforme. « L’urne n’est pas bien scellée, il faut la fermer de l’autre côté aussi », intime-t-elle aux deux agents présents sur place qui s’exécutent sans broncher.
Au groupe scolaire Pont FHB de Treichville, il y a beaucoup plus d’affluence à 11h. Des files se forment au rez-de-chaussée et à l’étage des bâtiments de ce groupe scolaire. Les personnes ressortent l’index marqué à l’encre, signe qu’elles ont voté.
« Il y avait le calme et la sérénité »
Le collège Notre-Dame du Plateau, lui, semble être un des seuls lieux animés du « Manhattan ivoirien » en ce samedi de premier tour. Même si ça n’a pas été la cohue non plus, selon ceux qui en ressortent, à l’image de Céline. « Tout s’est bien passé, glisse cette dame pimpante. Il y avait le calme et la sérénité. Pas de problème. J’ai juste eu à attendre qu’ils trouvent mon nom sur la liste ».
Plus au nord, dans la commune d’Attécoubé, quartier La Paix, le collège Koné Mamadou est coincé entre d’étroites ruelles pleines d’échoppes et de passants. Des enfants jouent devant sa façade ocre, avec une caisse en bois improvisée en cabane. « Bienvenue chez nous », lance un électeur assis sur un banc en train de vider un plat de riz et de poulet dans une barquette. Sur place, à l’inverse, les urnes se garnissent lentement, mais sûrement de bulletins.
Direction une autre commune populaire : Adjamé. Le lycée moderne Djedji Amondji Pierre est caché au milieu du quartier des 220 logements. La cour de l’établissement est vide en ce début d’après-midi. Un coup de vent soulève un nuage de poussière. Près d’une entrée, trois observateurs de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) consignent consciencieusement leurs observations sur des tablettes. Dans le bureau de vote numéro 3, son président glisse un mot tantôt charmeur à une vieille dame, tantôt directif à des électeurs plus jeunes. « Les gens viennent généralement voter avant 10h puis ils vaquent à leurs occupations avant de se réveiller vers 15h », assure-t-il par rapport à la faible affluence. A raison : à 15h, les électeurs réapparaissent.
Place au dépouillement
À l’Ecole de police de Cocody, il y a bien plus de policiers que de votants. Dans un bureau, des agents de la CEI sont enfoncés sur leur chaise. Lorsqu’on leur demande s’ils pensent qu’il y aura plus de monde en fin d’après-midi/début de soirée, les deux mots qui reviennent sont « On espère ! »
Dans un autre centre de Cocody, au groupe scolaire Sogefiha, quartier Riviera 2, Kaoukou s’en va, le devoir citoyen accompli. Mais il affirme : « Depuis l’avènement de la campagne et jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas eu d’engouement. Les Ivoiriens ont peur de sortir pour aller voter. »
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À 18h, c’est la fin du vote. Le dépouillement peut commencer avec les bulletins des cinq candidats : Jean-Louis Billon (Congrès démocratique, Code), Ahoua Don Mello (indépendant), Simone Ehivet (Mouvement des générations capables, MGC), Henriette Lagou (Groupement des partis politiques pour la paix, GP-Paix) et Alassane Ouattara (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix, RHDP) le président sortant. Ce dernier brigue un quatrième mandat.
La Commission électorale indépendante (CEI) doit désormais publier les résultats globaux provisoires entre le 26 et le 30 octobre. C’est le Conseil constitutionnel qui proclamera ensuite les résultats définitifs de cette présidentielle 2025.
[1] 308 bureaux de vote ont également été ouverts à l’étranger pour 120 000 Ivoiriens de la diaspora.



