Objets de pouvoir: les tenues en Kente de Kwame Nkrumah [10/10]

Suite et fin de notre série consacrée aux objets de pouvoir du continent. Le dernier épisode ce matin nous emmène au Ghana, premier pays d’Afrique subsaharienne à avoir déclaré son indépendance, en 1957. À sa tête à l’époque : le premier président Kwame Nkrumah, figure du panafricanisme. Il s’est servi du Kente, le pagne traditionnel ghanéen, afin d’envoyer au monde entier un message d’unité, d’indépendance et de liberté du continent africain.

De notre correspondant à Accra,

Sur le cliché en noir et blanc disposé dans la bibliothèque de Samia Nkrumah, deux hommes sourient à l’objectif : son père, Osagyefo Kwame Nkrumah, premier président du Ghana, et Ahmed Sékou Touré, son ami et homologue guinéen. Quand ce dernier arbore sur la photo veste de costume, chemise et cravate, Kwame Nkrumah, lui, porte le Kente, un des pagnes tissés traditionnel ghanéen.

Pour Samia Nkrumah, le Kente porté par son père revêtait aussi une signification éminemment politique, à destination de ses homologues occidentaux. Un message anticolonialiste, assumé à même le corps par le biais du pagne tissé que Kwame Nkrumah portait lors de ses déplacements internationaux. 

« C’est parce qu’il pensait qu’il n’y avait rien de plus important que de se montrer avec. Cela dit au monde qui nous sommes, notre style, nos systèmes de connaissances autochtones, notre terre, détaille la fille du premier président ghanéen. C’était naturel pour nous de porter le Kente lors de certaines occasions. Mais le porter en dehors du Ghana, dans ces arènes internationales, c’était presque révolutionnaire, radical. Ainsi, il prenait position : l’Afrique indépendante est en train de se soulever, et que nous souhaitons faire des partenariats sur un pied d’égalité, à armes égales. »

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Porté au Ghana depuis au moins quatre siècles, le Kente est un tissu chargé de sens. Alors, pour sa première venue au siège des Nations unies en 1960, Kwame Nkrumah a décidé d’emmener avec lui un Kente nommé « Tikro Nnko Adjina », que l’on peut traduire par « deux cerveaux valent toujours mieux qu’un seul ». Un pagne bleu aux motifs dorés, rouges et verts, dont la confection a été confié au maître tisserand Andrew Asare.

Une fierté racontée aujourd’hui par son fils, Kwasi Asare : « Le Kente est un habit si puissant. Celui qu’Osagyefo Kwame Nkrumah a présenté portait ce message : l’indépendance du Ghana ne signifie rien sans l’indépendance de tout le continent africain, d’où cette signification « deux têtes valent mieux qu’une ». D’une certaine manière, il cherchait également à dire que par l’ONU, tous les États doivent s’unir pour ne faire plus qu’un. » Un message sous forme de Kente, qui est resté exposé pendant plusieurs décennies dans le hall du siège de l’ONU, aux yeux du monde entier.

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