Nationalisation de la SML au Niger : vers la souveraineté minière en Afrique

Des mines
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Le Niger veut contrôler ses ressources naturelles et annonce la nationalisation de la Société des mines du Liptako (SML), acteur du secteur aurifère. Cette décision s’inscrit dans une dynamique de reconquête économique et de rupture avec la domination étrangère dans l’exploitation minière. En reprenant les rênes d’une entreprise jugée défaillante, les autorités nigériennes affirment leur volonté d’ancrer durablement la souveraineté nationale au cœur de leur stratégie de développement.

Les autorités nigériennes ont annoncé une décision importante : la nationalisation de la Société des mines du Liptako (SML), principal opérateur aurifère du pays, jusqu’alors détenu à 80% par le groupe australien Mckinel Ressources Limited. Cette décision intervient dans un contexte de réorientation stratégique post-coup d’État, visant à renforcer la souveraineté économique du Niger, notamment sur ses ressources naturelles. Le gouvernement justifie cette mesure par des manquements contractuels graves et une dégradation alarmante de la situation économique de la SML.

Accumulation d’importantes dettes fiscales

En mai 2019, l’État nigérien, à travers la SOPAMIN (Société de patrimoine des mines du Niger), avait cédé 80% des parts de la SML à Mckinel Ressources, avec l’espoir d’un redressement financier et opérationnel. L’accord prévoyait un plan d’investissement d’au moins 10 millions de dollars dans un délai de trois mois. Or, selon les autorités nigériennes, ce plan n’a jamais vu le jour. À cela s’ajoutent des dettes fiscales importantes accumulées par la SML et le non-respect d’engagements sociaux envers les travailleurs.

Malgré les « facilités » accordées par le gouvernement pour permettre la relance des activités, le groupe australien n’aurait pas été en mesure de redresser la société, mettant en péril l’un des gisements d’or les plus stratégiques du pays, situé dans la région de Liptako-Gourma, frontalière avec le Burkina Faso. Ce geste fort s’inscrit dans une série de décisions similaires depuis le coup d’État de juillet 2023.

Une logique de reprise en main des ressources naturelles

En juin 2025, les autorités avaient déjà nationalisé la Société des mines de l’Aïr (SOMAÏR), acteur-clé de l’exploitation de l’uranium au Niger, majoritairement détenue par le groupe français Orano. Ces initiatives traduisent la volonté du gouvernement de « favoriser l’appropriation intégrale par le peuple nigérien de ses ressources naturelles », une rhétorique souverainiste désormais centrale dans la politique économique du pays.

La SML, comme la SOMAÏR, symbolise en effet la dépendance historique du Niger vis-à-vis de partenaires étrangers pour l’exploitation de ses richesses minières. En reprenant le contrôle de ces entités, Niamey cherche à inverser cette tendance et à garantir que les revenus issus des ressources profitent directement au développement national.

Des précédents en Afrique : le vent de la nationalisation souffle fort

Le cas du Niger n’est pas isolé. De nombreux pays africains ont entamé ces dernières années des processus de renégociation, voire de nationalisation, de leurs ressources minières face aux abus, manquements ou faibles retombées économiques de certains partenaires étrangers. Au Mali, par exemple, le gouvernement de transition a révisé son code minier en 2023, augmentant la part de l’État dans les projets miniers, y compris des participations gratuites.

Des tensions sont également apparues avec certaines compagnies minières étrangères concernant la fiscalité et les normes environnementales. Le Mali a affirmé vouloir « reprendre le contrôle de ses ressources » dans un contexte similaire de transition politique et de souveraineté retrouvée. Au Zimbabwe, en 2022, le gouvernement a ordonné la nationalisation partielle de certaines opérations minières illégales ou non conformes, notamment dans le secteur du lithium, très convoité. L’État a renforcé son contrôle sur les exportations et mis en place une politique de transformation locale des minerais avant exportation.

Un retour de l’État providence ou une source d’incertitude ?

En République Démocratique du Congo (RDC), l’État a également renégocié plusieurs contrats miniers conclus sous l’ère Kabila, notamment dans le cobalt et le cuivre. Un audit des contrats chinois, qualifiés de « déséquilibrés », a été initié en 2021 et a mené à des discussions pour rééquilibrer les parts de l’État dans les revenus miniers. Si la nationalisation des mines peut répondre à une logique légitime de souveraineté et de justice économique, elle n’est pas sans conséquences. D’un côté, elle peut permettre une meilleure redistribution des richesses et éviter la fuite des capitaux.

De l’autre, elle peut générer des incertitudes juridiques et financières, notamment en matière d’investissement étranger. Des tensions diplomatiques sont également à prévoir avec les pays d’origine des groupes évincés. Dans le cas du Niger, le groupe australien pourrait saisir une juridiction internationale pour contester cette décision, invoquant une expropriation illégale. De même, les investisseurs étrangers pourraient percevoir cette dynamique comme un signal de risque élevé, ce qui pourrait ralentir les flux d’investissements dans le secteur minier nigérien.

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