Massacre du 28-Septembre en Guinée: des victimes toujours sous le choc après la grâce de Dadis Camara

En Guinée, plus d’un an après le procès des accusés du massacre du 28 septembre 2009, et ce verdict historique qui a vu la condamnation de huit personnes, dont l’ex-président Moussa Dadis Camara à vingt ans de prison pour crimes contre l’humanité, les familles de victimes réclament d’urgence l’ouverture du procès en appel. Sur plus de 700 victimes recensées, seules 334 sont en voie d’être indemnisées pour l’heure. Cela Tandis que le principal accusé Dadis Camara a bénéficié d’une grâce et a quitté le pays.
De notre envoyée spéciale à Conakry,
Plongée dans le jugement du 31 juillet 2024, un document de près de trois cents pages. Asmaou Diallo, qui dirige l’Association des Victimes Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009, est perplexe. Sur les quelque 800 victimes recensées, et qui se sont portées partie civile au procès, moins de la moitié a obtenu un droit à réparation.« Je vois les victimes qui ne sont pas prises en compte m’appeler à longueur de journée, me dire : « Que va-t-on faire ? ». Je réponds d’abord, moi-même, mon fils n’a pas été pris en compte dans le processus. On se demande : est-ce que maintenant, après les 334, est-ce qu’il y aura une continuité pour les victimes qui ne sont pas prises en compte ? », réagit Asmaou Diallo, dans les locaux de l’association des Victimes Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009, à Conakry.
Asmaou, qui a perdu son fils en ce jour terrible du 28 septembre 2009, comme les autres familles de victimes, a donc interjeté appel, pour que la justice réexamine les cas des victimes oubliées. Mais plus d’un an après, rien, elle s’inquiète, d’autant plus depuis la grâce accordée en mars 2025 au principal coupable, l’ex-président Moussa Dadis Camara. « Est-ce qu’on nous a jeté de la poudre aux yeux » avec ces premières indemnités et ensuite cette grâce, s’interroge-t-elle.
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« J’ai été dévastée par la nouvelle de sa grâce au point de tomber malade »
Aïcha qui fait partie des 109 femmes reconnues victimes de viol, et qui a obtenu réparation de la part de la justice guinéenne, se souvient exactement de ce qu’elle a ressenti le 28 mars 2025, jour de la libération de Dadis : « J’ai été dévastée par la nouvelle de sa grâce au point de tomber malade, et depuis je ne me sens plus en sécurité, car une personne m’a appelée de Kankan et m’a dit qu’elle m’avait reconnue sur une photo. Elle m’a menacée, depuis je suis terrifiée par la libération de Dadis Camara. »
Souleyman, blessé le 28 septembre 2009, est également membre de l’association qui vient en aide aux victimes, rappelle que Moussa Dadis Camara « a encore des fidèles dans l’armée et dans le pays ». Il confirme ce sentiment d’une justice restée à mi-chemin : « La justice avait commencé d’une bonne manière, jusqu’à la condamnation, tout le monde était content. La libération de Dadis Camara, a été un coup de massue qui est tombée comme un couperet sur la tête des victimes. Cela a vraiment changé le visage de la justice. Les autres victimes, qui attendent l’appel pour être indemnisées, maintenant, on ne sait pas s’il y aura même cet appel avec la libération du principal auteur. »
Pour maître Alpha Amadou Bah, qui coordonne le pool des avocats des victimes, il y a urgence à reprendre le procès en appel.
Pour maître Alpha Amadou Bah qui coordonne le pool des avocats des victimes, il y urgence à reprendre le procès en appel
Du côté du ministère de la Justice, on se veut rassurant. Un procès connexe après l’inculpation de quatre nouveaux accusés l’année dernière doit s’ouvrir prochainement. Aucune date n’a pour l’heure été rendue publique.
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