Mali: Bamako à son tour affectée par l’embargo jihadiste sur le carburant

Au Mali, le manque d’essence constaté ces dernières semaines en région concerne désormais Bamako. Depuis début septembre, les jihadistes du Jnim, liés à al-Qaïda, ont entrepris d’empêcher l’importation de carburant dans le pays. Des camions-citernes sont incendiés presque quotidiennement, le 6 octobre encore près de Sikasso. À Kayes, Ségou, Mopti, Gao, les Maliens peinent depuis des semaines à faire le plein. Jusqu’ici plutôt épargnée, la capitale est à son tour affectée.

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De très nombreuses stations ont fermé, et d’interminables files d’attentes s’étirent devant les autres, jusque tard dans la nuit, dans la capitale du Mali. « Les quelques stations ouvertes sont prises d’assaut », témoigne un Bamakois. « Tout le monde a peur qu’il n’y ait bientôt plus d’essence », explique un autre. Dans les rues de la capitale, il n’est plus rare de voir des voitures en panne sèche, ou des personnes poussant leur moto.

Si dans certains quartiers il faut longuement chercher, on peut encore trouver du carburant, et les prix plafonds (775 francs CFA pour l’essence, 725 pour le gasoil) sont respectés, même si des prix plus élevés ont parfois été constatés, notamment dans des quartiers périphériques.

« Si ça continue, il n’y aura bientôt plus rien »

Pas de pénurie totale donc à ce stade, mais les nombreux habitants de la capitale joints par RFI ne cachent pas leur inquiétude. « C’est déjà très difficile, si ça continue, il n’y aura bientôt plus rien », redoute un Bamakois. « Impossible de faire des réserves, prendre de l’essence dans des bidons est interdit », déplore un autre.

« Les hydrocarbures constituent le premier poste d’importation du Mali, environ un tiers », explique un économiste malien. « Le Mali se ravitaille principalement au Sénégal et en Côte d’Ivoire, poursuit cette source, par les axes routiers qui sont régulièrement attaqués par les groupes armés ».

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« Il n’y a pas de pénurie généralisée mais des insuffisances dans l’approvisionnement, conclut l’expert, car la demande est stable mais l’offre parcellaire et incertaine ».

Des « mesures fortes » promises

Vendredi dernier, après une réunion du Comité interministériel de gestion des crises et catastrophes, le ministre de la Sécurité, le général Daoud Aly Mohammedine, a assuré que de nouvelles « mesures fortes » allaient « bientôt » être mises en œuvre pour assurer l’approvisionnement du pays et appelé les Maliens à ne pas céder à la panique. « Au moment opportun, nous allons communiquer sur tout ce que nous avons eu à prendre comme mesure », a ajouté le ministre, selon les propos rapportés dans le journal d’État L’Essor.

L’armée escorte déjà des convois, ce qui n’empêche pas toujours les attaques. Des notables de la région de Mopti, sous l’égide des services de renseignement, ont par ailleurs établi des contacts avec le Jnim pour tenter d’obtenir la levée du blocus, à ce jour sans succès.

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Excuses de Diarra Transports

Dans une vidéo diffusée lundi soir sur les réseaux sociaux, la directrice de la compagnie malienne Diarra Transports, Nah Diarra Coulibaly, demande pardon à « tous les clients, à tous les Maliens et à tous les musulmans » pour les « désagréments » causés par l’arrêt des activités du groupe depuis un mois et demi.

Diarra Transports était nommément visée par le Jnim dans son annonce du 3 septembre sur le blocus de Kayes et Nioro du Sahel et sur les importations de carburant. « Nous implorons le pardon de tout le monde sans exception », supplie la directrice, dans un message qui semble surtout s’adresser au groupe jihadiste.

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«Plus d’une centaine de personnes sont devant la station-essence»: Un habitant de Bamako témoigne des difficultés à trouver du carburant

« Toutes les stations d’essence sont fermées, à l’exception de quelques-unes. Aujourd’hui, je suis sorti à 5h du matin, je suis allé à une station, mais là-bas j’ai dû affronter une foule très très nombreuse, plus d’une centaine de personnes étaient en rang [faisaient la queue, NDLR]. Alors j’ai fait demi-tour. »

« Les motos sont en panne, même prendre des motos-taxis devient difficile. Les transports collectifs sont devenus très rares, ils ne sont peut-être plus que 30% aujourd’hui à desservir la capitale. Faute de carburant, les gens ne peuvent pas atteindre leur bureau. »

« Je suis très inquiet aujourd’hui. Ici, c’est la capitale, on ne cultive pas, tout vient de l’extérieur. Si la situation du carburant reste ainsi, nous serons privés de denrées alimentaires ! C’est ça le plus difficile. Nous en appelons au bon sens des autorités, ça ne peut pas continuer comme ça, il faut qu’ils cherchent à soulager la population. »

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