Ile Maurice: Réductions de prix – Une mesure qui divise

Même trois jours après les annonces conjointes du Premier ministre adjoint, Paul Bérenger, et du ministre du Commerce, Michaël Sik Yuen, la polémique ne faiblit pas. Les baisses de prix sur une série de produits de consommation courante devaient apporter un souffle d’air frais aux ménages. Mais sur la toile comme dans les milieux syndicaux, la déception domine.

Sur les réseaux sociaux, les internautes n’y vont pas de main morte. Le choix des produits ciblés interroge. «On parle de baisse de natalité et pourtant ce sont les produits pour bébés et petits enfants qui connaissent une baisse», ironise Sheila sur Facebook.

D’autres dénoncent l’absurdité de certaines décisions. «Enn gato dilwil coûte plus cher qu’un pain vendu à Rs 2,60 !», fait remarquer un autre utilisateur, tout en se demandant pourquoi le prix du beurre, produit de base pour beaucoup de foyers, n’a pas été revu à la baisse. Résultat : un flot continu de commentaires où scepticisme et sarcasme se mélangent.

Du côté syndical, le constat est tout aussi amer. Pour Reeaz Chuttoo, président de la Confédération des travailleurs des secteurs public et privé, les économies promises aux familles restent limitées. «Une personne qui a un bébé peut économiser entre Rs 200 et Rs 300. Mais ce ne sont pas tous les produits pour bébé qui baissent de Rs 50, seulement certaines marques. Et ceux qui vivent déjà au bas de l’échelle achètent des laits bas de gamme qui ne sont pas concernés», souligne-t-il. Mais au-delà des chiffres, c’est surtout la logique gouvernementale qui est remise en cause.

Pour Reeaz Chuttoo, il s’agit moins d’une réelle volonté de soulager la population que d’une opération de communication. «On parle de Rs 2 milliards de subsides, mais en réalité, c’est une façon de garantir les profits du secteur privé avec l’argent des contribuables. On aurait dû utiliser ces fonds pour renforcer le réseau de distribution de la State Trading Corporation et permettre à l’État de devenir un véritable compétiteur sur le marché », avance-t-il.

Selon lui, une telle approche aurait permis de peser directement sur les prix et de briser certains monopoles. «Le peuple demandait une fixation des prix et une limitation des marges bénéficiaires. Ce n’est pas ce qui est fait. Le gouvernement a agi dans la précipitation face à la grogne populaire. Mais tôt ou tard, il devra franchir le pas et intervenir lui-même comme acteur sur le marché, pas seulement de façon cosmétique.»

Entre colère virtuelle et contestation syndicale, une chose est claire : les annonces gouvernementales, censées redonner un peu d’oxygène au panier de la ménagère, n’ont pas convaincu.

Pain maison : un prix figé qui met les boulangeries en péril

Quel avenir pour les boulangeries ? La question inquiète Nasser Moraby, président de l’Association des propriétaires de boulangeries, après l’annonce du maintien du prix du pain maison à Rs 2,60. «Nous sommes déçus par l’annonce du Premier ministre adjoint. Déjà qu’il ne nous a jamais rencontrés pour nous écouter. Le ministre Sik Yuen, lui, connaît la situation depuis notre rencontre de janvier», déplore-t-il. À l’époque, le secteur espérait des mesures budgétaires en sa faveur. «Nous avons aussi rencontré le ministre délégué aux Finances, Dhaneshwar Damry, mais aucune de nos requêtes n’a été entendue. Nous avions demandé de rehausser la TVA de Rs 6 millions à Rs 10 millions. Au lieu de cela, c’est le contraire», regrette-t-il.

Le président tire la sonnette d’alarme : plusieurs boulangeries risquent de mettre la clé sous la porte dès la semaine prochaine. «Déjà, 27 entreprises ont fermé. J’ai informé le ministre du Commerce, mais il nous a dit que Maurice est le pays où le pain est le moins cher.» À cette fragilité financière s’ajoutent les difficultés de main-d’oeuvre. Maladies, absences et surcharge compliquent la production. «J’ai même dû aller chercher le pain produit à Vacoas pour le vendre à Beau-Bassin», confie Nasser Moraby.

Autre problème : le retard du versement des subsides. «On est censé recevoir 24 sous par pain, mais cela fait deux mois que plusieurs boulangeries n’ont rien touché», dit-il. Lors d’une conférence de presse, samedi, Paul Bérenger a rappelé que depuis 2012, le prix du pain maison est resté à Rs 2,60. Pour le maintenir, il faut mobiliser Rs 450 millions de subsides par an. Le Conseil des ministres a tranché : le prix restera inchangé, alors qu’il aurait dû passer à Rs 3,30. Une décision qui, selon le secteur, pourrait précipiter la fermeture de nombreuses boulangeries.

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