Ile Maurice: Permis expirés, accidents ignorés, dignité bafouée – La CTSP réclame le respect

La Confédération des travailleurs des secteurs privé et public (CTSP) a tenu, ce jeudi 9 octobre, une manifestation pacifique devant le ministère du Travail à Port-Louis. L’objectif : attirer l’attention des autorités sur la situation jugée «inhumaine» des travailleurs étrangers dont les permis de travail ont expiré depuis plusieurs mois, les plongeant dans une précarité totale.

Pour Reeaz Chuttoo, président de la CTSP, cette mobilisation s’inscrit dans la continuité de la Journée internationale du travail décent, célébrée le 7 octobre. «Environ 600 travailleurs étrangers sont venus devant notre bureau à Rose-Hill. Plusieurs centaines d’entre eux n’ont plus de permis de travail depuis septembre, voire depuis plus d’un an.

Ils continuent à travailler sur la promesse de leurs employeurs que les démarches de renouvellement ont été faites, mais les autorités tardent à réagir», déplore-t-il. Faute de statut légal, ces ouvriers ne peuvent plus envoyer d’argent à leurs familles et ont cessé le travail lundi dernier.


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Le syndicaliste cite un cas particulièrement alarmant : celui d’un travailleur népalais blessé à l’oeil le 28 septembre alors qu’il manipulait une perceuse sans équipement de protection. «Cet homme a perdu un oeil et n’aura droit à aucune compensation, car son permis de travail est expiré. Son employeur n’a même pas signalé l’accident au ministère du Travail. Aujourd’hui, il est en situation illégale et risque la déportation», s’indigne Reeaz Chuttoo.

La CTSP a également dénoncé l’absence de protection sociale dans les 76 recommandations ministérielles concernant l’emploi des travailleurs étrangers. «On facilite l’embauche pour pallier le manque de main-d’oeuvre, mais rien n’est prévu pour la sécurité, la santé ou la retraite de ces personnes. Ils ne contribuent à aucun fonds social, et quand ils rentrent dans leur pays, ils n’ont droit à rien», regrette le syndicaliste.

Selon lui, les travailleurs étrangers sont désormais traités comme de simples commodités économiques, au détriment de leur dignité humaine. «Maurice reste un mauvais élève dans le traitement des travailleurs étrangers. Le cas du Népalais blessé n’a été recensé nulle part, même pas au ministère de la Santé. Nous avons saisi le Premier ministre pour éviter sa déportation et exiger une enquête. Comme lui, des centaines d’autres continuent à travailler sans permis, parfois pour de grandes compagnies textiles», affirme-t-il, citant l’exemple de Star Knitwear.

La CTSP réclame des poursuites contre les employeurs fautifs et une meilleure supervision des conditions de travail. «Si nous ne protégeons pas les travailleurs étrangers, la demande va exploser, et les Mauriciens continueront de perdre des opportunités d’emploi. Déjà que l’âge de la retraite a été repoussé à 65 ans, beaucoup de jeunes préfèrent partir», avertit Reeaz Chuttoo.

En conclusion, le syndicaliste a élargi son plaidoyer à la question sociale : «Comment prétendre protéger nos aînés si nous ne protégeons même pas nos travailleurs ?», a-t-il lancé, évoquant les difficultés rencontrées dans le Foyer Trochetia, où les employés ne perçoivent plus leurs heures supplémentaires faute de soutien gouvernemental. «Depuis décembre, nous cherchons une rencontre avec le ministre concerné mais en vain.» Un cri du coeur qui, selon la CTSP, reflète une même exigence : celle de la dignité pour tous les travailleurs, sans distinction d’origine.

Travailleurs étrangers : entre précarité et menace de déportation Un bus rempli de travailleurs étrangers, principalement originaires du Bangladesh, a été intercepté mercredi par la police dans le sud du pays.

Ces ouvriers, employés par une entreprise locale, se rendaient sur leur lieu de travail lorsque les forces de l’ordre ont constaté que leurs permis de travail avaient expiré. Conduits au poste de police, ils y sont restés plus de deux heures, sans qu’aucun représentant de la compagnie ne se présente. Selon les informations recueillies, ils risquent une expulsion dès ce vendredi.

Pour Stéphane Maurymoothoo, du Regrupman Artizan Morisien, la situation soulève plusieurs questions éthiques et sociales : «Ces personnes ont travaillé pendant tout ce temps à Maurice. Vont-elles percevoir leur salaire, leur bonus au prorata ? Est-ce de leur faute si leurs permis n’ont pas été renouvelés ? N’est-ce pas à l’employeur de veiller à ces démarches administratives ?»

Il estime que la compagnie aurait dû assumer ses responsabilités plutôt que de laisser partir ces employés, souvent rémunérés au salaire minimal. Beaucoup d’entre eux se sont endettés pour venir travailler à Maurice et sont pères de famille.

Le militant rappelle que lors des Assises du Travail, il avait été question de l’importance des travailleurs étrangers pour pallier le manque de main-d’oeuvre locale. «Aujourd’hui, il faut se demander quel respect nous portons à ceux qui contribuent au progrès du pays», souligne-t-il. Une affaire qui relance le débat sur la protection et la dignité des travailleurs étrangers à Maurice.

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