Ile Maurice: Les commerçants de Port-Louis redoutent une «concurrence incontrôlée»

La décision du gouvernement d’autoriser des marchés nocturnes sur tout le territoire pendant la période festive réjouit les acheteurs, mais laisse un goût amer chez de nombreux commerçants établis.
Du 12 décembre 2025 au 5 janvier 2026, les marchands de rue pourront opérer de 18 heures à 1 heure. Cette mesure est perçue comme un véritable coup dur par les boutiques traditionnelles – en particulier celles situées au niveau de la rue Desforges, à Port-Louis.
Pour les commerçants formels, l’inquiétude est double : la concurrence directe et l’absence de garanties quant à l’ordre public. Plusieurs d’entre eux espèrent que les autorités mèneront des inspections régulières, notamment pour s’assurer que les rues soient nettoyées chaque soir. La crainte est grande de revivre le scénario chaotique de fin 2024.
Raj Appadu, président du Front commun des commerçants de Maurice, ne mâche pas ses mots. Pour lui, la décision manque de clarté et risque de favoriser les abus. «Comment saura-t-on si ces commerçants résident réellement à Port-Louis ?
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On ne veut pas que cela devienne comme les parents qui changent d’adresse pour inscrire leurs enfants dans les meilleures écoles», lance-t-il. Il se rappelle encore le désordre qui avait suivi les élections, l’année dernière : «Les marchands étaient partout. Certains députés leur avaient donné carte blanche. Même les policiers ne savaient plus comment intervenir. Les magasins, eux, faisaient face à une concurrence complètement déloyale.»
Le choix de la rue Desforges fait particulièrement grincer des dents. «Pourquoi cette rue? Est-ce pour empêcher les magasins de travailler? On aurait pu choisir des rues internes, fermer temporairement la circulation sans pénaliser les boutiques», estime Raj Appadu.
Pour 2026, il plaide pour une approche plus inclusive et décentralisée. Selon lui, des marchés nocturnes pourraient être organisés dans différents quartiers de Port-Louis – Sainte-Croix, Vallijee, Grande-Rivière, Tranquebar – afin de répartir les opportunités économiques et d’animer plusieurs zones de la capitale, sans concentrer toute la pression sur les commerces établis.
Le président du Front commun se veut toutefois nuancé : «Je ne suis pas contre les marchands de rue. Tout le monde doit pouvoir gagner sa vie.» Il reconnaît également que dans les villes et villages, les autorités assurent généralement un meilleur contrôle. Son principal combat reste l’ordre et la propreté. «Une fois les étals rangés, il faut nettoyer. Sinon, les déchets se retrouvent dans les canaux et, lors de grosses pluies, c’est Caudan qui paie les conséquences», précise-t-il.
Les marchands nocturnes devront s’acquitter d’une redevance journalière de Rs 150 à Rs 500, mais pour les commerçants établis de Port-Louis, cela ne compense pas les risques de désorganisation et de pertes économiques. La période festive s’annonce tendue dans la capitale, où l’équilibre entre animation et équité commerciale reste difficile à trouver.


