Ile Maurice: Le PMO contourné – Faille dans le contrôle aérien…

Le dimanche 12 octobre, à 00 h 44, un jet privé, un Cessna 560XL, immatriculé 5R-HMR et appartenant à la compagnie malgache Trans Ocean Airways, a atterri à l’aéroport SSR. À son bord se trouvaient notamment l’ancien Premier ministre de Madagascar, Christian Ntsay, destitué une semaine auparavant, et l’homme d’affaires influent Maminiaina Ravatomanga, dit Mamy, tous deux liés à la crise politique qui secoue actuellement Antananarivo.
Selon les données de Flight Radar 24, le jet a effectué plusieurs boucles à l’est de l’île dans l’attente de l’autorisation. Contrairement aux affirmations d’un communiqué de Gen Z Malagasy Maurice, l’avion ne se dirigeait pas vers La Réunion. Face au risque de manque de carburant, la tour de contrôle de l’aéroport SSR a finalement autorisé l’atterrissage. Mais la controverse porte sur le débarquement des passagers : certains VVIP ont été autorisés à quitter immédiatement l’aéroport. Selon une source du Passport and Immigration Office (PIO), même en situation d’urgence, l’avion aurait dû faire le plein et repartir avec tous les passagers demeurant à l’intérieur pour éviter toute anomalie administrative.
Selon les premières informations, l’appareil aurait reçu l’autorisation d’atterrir uniquement de la tour de contrôle de l’aéroport SSR, sans l’aval préalable du Prime Minister’s Office (PMO), pourtant l’autorité suprême en matière d’aviation civile. Le Premier ministre par intérim, Paul Bérenger, s’est dit «pas satisfait du tout» et a promis «une enquête approfondie pour que cela ne se reproduise plus».
Si les faits se confirment, il s’agirait d’une faute administrative grave. La tour de contrôle aurait outrepassé ses compétences en acceptant un vol non validé par le PMO. Cela soulève la possibilité d’une faille de communication entre les instances techniques (contrôle de trafic aérien, immigration, douane) et le PMO.
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Une telle faille ne met pas seulement en jeu la hiérarchie bureaucratique : elle expose l’État mauricien à des risques sécuritaires et diplomatiques. En matière de sécurité, un avion non autorisé pourrait embarquer des passagers non déclarés, des biens interdits ou poser des risques logistiques. Sur le plan diplomatique, l’accueil d’un ancien chef de gouvernement étranger, en exil ou en situation de crise politique, sans validation politique préalable, peut être interprété comme une prise de position implicite de Maurice. Sur le plan juridique, un atterrissage non conforme aux procédures peut être assimilé à une entrée illégale dans l’espace aérien national, exposant les opérateurs et l’État à des sanctions.
Les règles strictes de l’aviation internationale et nationale
L’incident soulève une question essentielle : comment un avion étranger at-il pu pénétrer dans l’espace aérien mauricien et atterrir sans l’autorisation centrale exigée ? Les règles internationales établies par la Convention de Chicago de 1944 confèrent à chaque État une souveraineté absolue sur son espace aérien. Aucun avion ne peut survoler ou atterrir sur un territoire étranger sans permis explicite. Ces autorisations, dites overflight permit et landing permit, doivent être obtenues avant le vol, avec soumission du plan de vol, des manifestes passagers, et des documents de navigabilité et d’assurance.
À Maurice, la Civil Aviation Act et les Civil Aviation Regulations de 2007 imposent ces obligations à tous les aéronefs étrangers, qu’ils transportent des passagers, des marchandises ou qu’ils soient en mission technique. Les permis sont délivrés pour une durée limitée (24 à 72 heures), après validation par les services compétents et le PMO. «La tour de contrôle n’a pas autorité pour délivrer un permis d’atterrissage. Elle gère uniquement la sécurité et la séquence d’approche des vols déjà autorisés», explique un ancien cadre de la Civil Aviation Authority.
Procédures du PIO et admissibilité à l’entrée
L’affaire du jet malgache soulève également des interrogations sur les responsabilités et les procédures : qui a donné l’autorisation d’atterrir, et qui a validé le débarquement des passagers et la prise en charge des bagages ? Si le PIO assure un contrôle rigoureux des entrées, la coordination entre l’Aviation civile, le PMO et les services d’immigration reste cruciale pour éviter tout incident similaire à l’avenir.
Dans ce contexte, le PIO a ses procédures scrupuleusement prévues par les Passport Regulations sous la section 25 (4). L’objectif : sécuriser les frontières tout en facilitant le séjour légal des visiteurs. Avant d’entrer sur le territoire mauricien, chaque passager doit présenter un passeport valide d’au moins six mois après la date de départ prévue, accompagné de documents justificatifs : réservation d’hôtel ou hébergement, preuve de moyens financiers suffisants et billet de retour ou garantie de départ après un vol privé.
Le PIO s’appuie également sur des systèmes internationaux, World-Check et Interpol, ou sa propre base de données (Control List), pour détecter toute personne présentant un risque potentiel : activités criminelles, blanchiment d’argent, terrorisme ou infractions graves. Ces vérifications permettent de filtrer efficacement les entrées et de protéger le pays contre les menaces à la sécurité nationale et internationale, conformément à l’Immigration Act 2022.
L’admissibilité repose sur les motifs de voyage : tourisme, affaires, visites familiales ou transit sont autorisés. Les voyages pour études, travail ou mariage nécessitent une autorisation préalable. Le PIO peut refuser l’entrée en cas de maladies contagieuses, d’antécédents criminels, de comportement subversif ou immoral, ou si le passager risque de devenir une charge publique ou a une intention d’asile politique. Dans des situations exceptionnelles, le PMO peut délivrer une autorisation spéciale.
À l’arrivée, les passagers doivent présenter leurs documents, remplir le formulaire numérique All-in-One ou la carte de débarquement classique. Des contrôles sanitaires peuvent également être effectués selon la situation épidémiologique. Ceux en transit aérien peuvent rester jusqu’à 24 heures sans visa, tandis que les diplomates bénéficient d’exemptions spécifiques. Ceux souhaitant travailler ou s’installer à Maurice doivent obtenir un permis avant leur arrivée.
D’autres interrogations font surface : les officiers du PIO ont-ils disposé du temps nécessaire pour mettre en place tous les protocoles standards ? Ont-ils pu effectuer les contrôles complets et coordonner les différentes étapes avec le PMO et le département de l’Aviation civile ? L’absence de suivi rigoureux à ce stade pourrait avoir ouvert la voie à une autorisation prématurée ou irrégulière, ce qui soulève des questions sur le respect des procédures.
Une enquête en cours
Le Deputy Prime Minister et actuellement Premier ministre par intérim, Paul Bérenger, a promis une enquête «rapide et transparente». Celle-ci devrait déterminer qui a autorisé l’approche finale du jet malgache, si un landing permit avait effectivement été délivré et si les services d’immigration, de douane et de sécurité avaient été informés avant ou après l’atterrissage. Le gouvernement devrait également réexaminer la coordination entre les autorités civiles et le PMO afin d’éviter qu’un vol étranger ne puisse atterrir sans aval politique, surtout dans un contexte régional aussi sensible que celui de Madagascar.



