La Cargo Handling Corporation Ltd (CHCL) a présenté, hier matin, au CHCL Building à Mer-Rouge, son plan d’affaires pour la période 2025-2030 lors d’une conférence de presse animée par son directeur général, Gassen Dorsamy. Cette rencontre a permis de faire le point sur les nombreux défis auxquels l’entreprise fait face, tout en dévoilant une vision ambitieuse pour repositionner Maurice comme un hub portuaire compétitif dans la région.
Une reprise spectaculaire depuis décembre 2024
Gassen Dorsamy est revenu sur la situation alarmante dans laquelle se trouvait la CHCL lors de sa prise de fonction, le 12 décembre 2024 : des délais d’attente dépassant sept jours pour les navires, près de 2 000 conteneurs déroutés vers d’autres ports de la région et des surcharges appliquées sur le fret maritime à destination de Maurice.
«En moins d’un mois, grâce à la collaboration des employés, des lignes maritimes et des autorités portuaires, nous avons normalisé la situation», a-t-il souligné. Aujourd’hui, les navires accostent sans délai et le déchargement du charbon ne prend plus que trois à quatre jours, contre huit auparavant.
Un tournant stratégique en 2025
L’année 2025 représente une période charnière pour la CHCL, alors que la concession actuelle avec la Mauritius Port Authority expire le 31 décembre. Les négociations sont en cours pour son renouvellement.
Mais l’entreprise doit également faire face à une pression croissante de la concurrence régionale, notamment de la part de Madagascar, où les investissements japonais ont permis au port d’atteindre un niveau de performance inquiétant.
«Madagascar est en train de nous dépasser. Si nous perdons notre position de leader, les conséquences économiques seront lourdes», a alerté Gassen Dorsamy, luimême ancien Chief Executive Officer de la Madagascar International Container Terminal Services Ltd.
Des défis multiples à relever
La CHCL a identifié neuf défis majeurs à surmonter : le remplacement de trois grues Ship to Shore (STS) défectueuses ; l’incapacité actuelle à répondre à la demande croissante des lignes maritimes ; l’arrivée de nouvelles lignes désireuses de desservir Maurice ; un coût de main-d’oeuvre élevé ; une productivité instable ; un retard technologique estimé à dix ans, notamment par l’absence de digitalisation ;
le maintien du statut de leading transshipment hub ; la nécessité d’un plan de secours (location de grues mobiles) ; et la réduction de l’empreinte carbone de l’entreprise. Le directeur général a particulièrement insisté sur le besoin urgent de transformation digitale. «En 2025, ce n’est pas acceptable de voir des gens faire la queue pour payer en espèces. Tout doit se faire en ligne.»
Un plan d’investissement de Rs 5,3 milliards sur trois ans
Le business plan prévoit l’acquisition de trois grues Super Post Panamax, huit portiques hybrides (RTG) et la remise à niveau de deux grues existantes. Un simulateur de formation, offert par le gouvernement indien et coûtant Rs 25 millions, sera installé pour former les jeunes et améliorer les compétences internes.
À terme, la CHCL espère ouvrir ce centre de formation aux pays de la région. Dans une logique d’écoresponsabilité, l’achat de huit équipements hybrides réduira de moitié la consommation annuelle de diesel, estimée actuellement à plus de deux millions de litres. Par ailleurs, un ingénieur canadien a été recruté pour structurer la maintenance des équipements à l’aide d’outils digitaux.
Gassen Dorsamy (à g.) souhaite ramener la CHCL à un niveau plus compétitif.
Objectif : doubler, voire tripler le volume de conteneurs
Actuellement, la CHCL traite environ 700 000 conteneurs par an. Le business plan vise une augmentation jusqu’à 1,2 million, voire 2 millions, de conteneurs. «La demande est là, mais nous devons être prêts à la capter», a affirmé Gassen Dorsamy.
Il a aussi souligné l’importance du transbordement pour Maurice : seuls 44 % des conteneurs sont destinés au marché local, contre 56 % en transit vers Madagascar, La Réunion, Les Comores ou encore l’Australie. «Si nous perdons le transbordement, six navires sur dix pourraient cesser de faire escale à Maurice», a-t-il mis en garde.
Une entreprise solvable et ambitieuse
Contrairement aux rumeurs persistantes, la CHCL n’est pas en faillite. Elle dispose d’une réserve de Rs 2 milliards et cherche un financement complémentaire de Rs 1,3 milliard. «Toutes les banques se sont montrées intéressées. Nous n’avons aucun souci de financement», a rassuré le directeur général. En conclusion, Gassen Dorsamy a exprimé sa confiance : «Nous avons les moyens, la géographie et désormais, une vision claire. Il faut simplement agir avec détermination.»