Ile Maurice: Emmanuel Petit fait rêver nos jeunes en grand

Ambiance fébrile en ce dimanche après-midi à Pointe-aux-Piments. Le stade de la localité et son terrain délabré s’apprêtent à accueillir un grand nom du football dans quelques instants. Il est 16h30 et les préparatifs vont bon train pour accueillir Emmanuel Petit. Après tout, ce n’est pas tous les jours que ce petit patelin a l’occasion d’accueillir un champion du monde.

Maillot d’Arsenal sur le dos, Rahul Thagalee piaffe d’impatience. «Petit, je l’ai vu jouer pendant mon enfance. C’était un super joueur. J’étais aussi fan de l’équipe de France, donc j’ai suivi toute sa carrière avec assiduité. Son plus grand moment reste ce 3e but magique qu’il marque en finale du Mondial contre le Brésil. Je suis très content qu’il soit venu à Maurice et j’ai hâte de le voir pour de vrai. Les jeunes ne réalisent peut-être pas qui il est mais c’est une légende. De ceux qui m’ont fait aimer regarder le football !»

Les élus locaux ne s’y sont pas trompés et ont mis les petits plats dans les grands : match de gala entre deux sélections de la localité, posters d’Emmanuel Petit retraçant un peu sa carrière de footballeur à l’entrée du stade, et un comité d’accueil festif. Rien ne semble assez grand pour… Petit.

Equipier du ministre Woochit

Soudain, il y a du mouvement dans l’école du gouvernement qui jouxte le stade. La voiture de l’invité de marque est arrivée, il descend. Il est accompagné de ses amis, la journaliste Valérie Perez et Attilio Veltri, qui ont aidé et facilité la venue et le séjour de l’ancien défenseur d’Arsenal chez nous.

Une petite cohue s’ensuit. Le comité d’organisation se presse autour d’Emmanuel Petit et lui fait comprendre qu’il devra jouer… «Comment ? Ah non, non, moi je ne joue pas. J’ai mal au genou. Je ne pourrai pas du tout jouer. Ou alors, ça sera en marchant…», ironise-t-il, surpris par cette demande.

Face à l’insistance des hôtes, le consultant RMC finit par céder et promet de disputer quelques minutes. Pas de crampons ? No problemo, heureusement qu’il était en baskets ! Manu Petit aime Maurice et les Mauriciens, comme il nous le dira ensuite en interview, lui qui en est à sa troisième visite dans l’île. Pour la première, il n’avait que 20 ans…

Le temps de se changer et hop, le voilà futur coéquipier du ministre des Collectivités locales, Ranjiv Woochit, qu’on sent très impatient de vivre ce moment. L’un de ses coéquipiers, Clarel Beeharry, diehard d’Arsenal, le serre dans ses bras, fier de jouer aux côtés d’une de ses idoles.

Les élus locaux s’agglutinent autour de Petit comme des abeilles autour du miel, la chasse aux photos débute. Le blond à la célèbre queue de cheval se prête au jeu et échange patiemment avec chacun. Le champion du monde 98 fait honneur à son statut, humble et disponible pour ses fans.

«Il est comme ça Manu. C’est une très belle personne, avec de vraies qualités humaines, qui dégage de la gentillesse et qui reste très humble. Je suis très heureux de le voir ici, chez nous», nous dit Attilio Veltri, un Français qui vit à Pointe-aux-Piments depuis 1999, devenu amoureux du quadricolore, très patriote et engagé pour l’avancement de la société mauricienne.

C’est au rythme du séga que Petit entre sur le terrain, visiblement ému par ce vibrant accueil. Il est escorté par les deux équipes sous les acclamations du public, deux danseuses et une ravanne tenue par nul autre que l’ancien joueur du Club M, Kevin Perticots !

«J’ai mal partout…»

Après un petit échauffement, place au match. Manu prend le temps de trouver ses marques et comprendre ses coéquipiers, ce qui n’est pas facilité par l’état exécrable du terrain, qui fait désespérer les joueurs locaux, en attente d’un vrai stade à Pointe-aux-Piments.

Au bout d’une dizaine de minutes, on voit Emmanuel Petit grimacer. Entre-temps… Ah, il va sortir ? Que nenni. Fausse alerte. L’ancien compère de Patrick Vieira en milieu récupérateur chez les Gunners et les Bleus (qui seront champions d’Angleterre et du monde en sélection) se place au milieu et participe au jeu, provoquant de petits frissons dans le public sur certaines actions, mais soucieux de faire briller les Mauriciens.

L’arbitre siffle la mi-temps. Manu est libéré, délivré. Il aura bien transpiré et mouillé le maillot, même s’il a «le genou en vrac et mal aux hanches» du haut de ses bientôt 55 ans. Place au débriefing, à chaud.* «Ça fait toujours plaisir de jouer. Même si le physique ne suit plus du tout, la tête veut toujours jouer. C’est toujours sympa de partager des moments comme ça, qui plus est ici, à l’île Maurice, avec les Mauriciens»*, réagit-il.

«Il faut une volonté politique»

Ceci dit, il aurait sans doute préféré évoluer sur une pelouse comme celle de Wembley que sur un champ de patates peut-être ? «La dernière fois que j’ai vu un terrain comme ça, je crois que je devais avoir 6 ans (rires). Même si j’ai mal partout, c’est le plaisir qui prédomine.» Selon l’ancien protégé d’Arsène Wenger, le niveau technique et physique des Mauriciens est satisfaisant, sur le peu qu’il a vu. «Pas de soucis, mais le terrain est très bosselé, donc très difficile de faire une passe à ras de terre. On voit beaucoup de joueurs qui ratent des contrôles ou qui manquent la balle sur la première touche. Si j’étais Mauricien, le plus simple ce serait de jouer à une touche de balle, avec des jeux en triangle, des redoublements de passes. Être assez précis dans les pieds, bien doser et éviter le pressing de l’adversaire, qui récupère trop facilement le ballon à cause du mauvais terrain.»

Plus que 1 000 discours, ce petit match a rapidement fait comprendre à Petit le problème du sport à Maurice. «Je trouve que l’île s’est bien développée, mais il y a quand même énormément de jeunes passionnés par les sports individuels et collectifs. J’ai parlé avec pas mal de Mauriciens qui m’ont exprimé leur désarroi. Il n’y a pas de compétition et, arrivé à un certain âge, ils n’arrivent pas à continuer. Je crois que Maurice souffre d’un grand manque d’infrastructures.»

«Il faut une volonté politique aussi et des financements», explique-t-il. «Ça doit aussi passer par l’école, pas simplement le football. Je crois que la jeunesse mauricienne en a extrêmement besoin pour lutter contre les fléaux qui sont en train d’arriver ici à Maurice, comme sur beaucoup d’îles et de pays, notamment la drogue et l’alcool. Il va falloir que les choses évoluent dans le bon sens pour la jeunesse qui représente 52 % de votre pays.»

Clarel Beeharry (à g.), heureux et fier d’avoir pu jouer avec un Gunner historique !Kevin Perticots nous a fait découvrir ses talents de musicien.

La journaliste Valérie Perez, ancienne présentatrice de Stade 2 et auteure de deux best-sellers, connaît Petit depuis 30 ans et habite dans le même immeuble que lui à Paris

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