Ile Maurice: 22 véhicules à Rs 20,7 millions, un bateau et Rs 2,1 M saisis, quatre arrestations

Quatre arrestations, 22 véhicules de luxe saisis pour une valeur estimée à Rs 20,7 millions, un bateau de plaisance valant Rs 600 000, ainsi que Rs 2,1 millions en espèces récupérés: tel est le bilan impressionnant de l’opération menée par la Financial Crimes Commission (FCC) et la police hier.
Une vaste opération a été menée dans la matinée du mardi 5 août par la FCC, en collaboration avec la police. Déployée simultanément dans plusieurs régions stratégiques de l’île, à savoir Moka, Plaisance, Saint-Pierre, Petit-Verger, Beau-Bassin, Saint-Julien Village et Le Morne, cette intervention ciblée visait à démanteler un réseau criminel soupçonné d’activités illicites, incluant le blanchiment d’argent et le trafic de stupéfiants.
L’opération s’est déroulée dans le cadre d’un mandat émis par le National Coordination Committee (NCC), en vertu des dispositions de la section 132 de la Financial Crimes Commission Act 2023.
Conduite avec minutie et discrétion dès les premières heures de la journée, cette action concertée des forces de l’ordre et des officiers de la FCC a donné lieu à une série de perquisitions musclées dans des résidences et propriétés suspectées d’abriter des biens acquis de manière illégale. Les équipes d’intervention ont investi les lieux visés de façon simultanée, dans un effort coordonné sans précédent. Le bilan matériel de cette opération a été particulièrement impressionnant.
Parmi les biens saisis figuraient plusieurs véhicules de luxe, dont une Porsche Cayenne, des BMW, des voitures de grosse cylindrée, ainsi que trois voitures vintage d’une grande valeur. Les enquêteurs ont également mis la main sur plusieurs motocyclettes de prestige, dont une Harley Davidson et deux speedboats, dont l’un a déjà été attribué à un suspect arrêté.
L’autre fait encore l’objet d’une enquête, les officiers de la FCC étant toujours à la recherche du véritable propriétaire. À cela s’ajoutent des appareils électroménagers sophistiqués et une quantité non négligeable de cannabis, retrouvée lors d’une perquisition à Trèfles. Le poids officiel de la drogue n’était pas encore déterminé.
Kovilen Sangaren Pillay Murday.
Au total, six personnes ont été interpellées lors de l’opération, mais ce sont quatre individus en particulier qui ont été placés en état d’arrestation et inculpés sous une charge provisoire de blanchiment d’argent. Il s’agit de Kovilen Sangaren Pillay Murday, Jean Dominique Jason Palmer, Kaviraj Luximon et Steven Moothoocurpen.
Ce dernier est considéré comme le cerveau présumé. Il avait également été arrêté par le passé pour avoir entravé une opération menée par l’équipe d’Hector Tuyau lors d’une perquisition au domicile du trafiquant de drogue connu sous le nom de Gro Derek.
Les arrestations ont été effectuées à la suite de perquisitions menées dans les domiciles respectifs des suspects. Kovilen Sangaren Pillay Murday, âgé de 35 ans et habitant à Saint-Julien-d’Hotman, a été arrêté en vertu des sections 36(1)(b) et 38 de la FCC Act 2023. Une somme de Rs 1,4 million en espèces a été saisie chez lui, ainsi qu’un Ford Raptor d’une valeur estimée à Rs 2,7 millions. Les objets et voitures saisis ont été transférés dans les locaux de la FCC pour les besoins de l’enquête.
Jean Dominique Jason Palmer.
Jean Dominique Jason Palmer, âgé de 36 ans et domicilié à Beau-Bassin, a également été arrêté sous les mêmes dispositions légales. Lors de l’intervention à son domicile, sept voitures, dont la valeur totale est estimée à plus de Rs 5,45 millions, ont été saisies par les enquêteurs.
Kaviraj Luximon.
Dans le cas de Kaviraj Luximon, 34 ans, résidant au village du Morne, les enquêteurs de la FCC ont procédé à son arrestation en vertu des sections 3(1)(b), 6 et 8 de la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act. Il a été interpellé après la découverte d’un bateau de plaisance immatriculé PC 4846 OL 14, dont la valeur est estimée à Rs 600 000. L’embarcation a été saisie et transférée à la FCC.
Saisie spectaculaire
En ce qui concerne Steven Moothoocurpen, 34 ans, son interpellation a été effectuée à Saint-Pierre. Une saisie spectaculaire a eu lieu à son domicile, incluant une somme en espèces de Rs 717 500, onze voitures, ainsi que trois motocyclettes. Le montant global estimé de ces véhicules s’élève à plus de Rs 12,46 millions.
Steven Moothoocurpen.
Tous les suspects ont été présentés le même jour devant le tribunal de Moka. Lors de cette comparution, la police a vigoureusement objecté à leur remise en liberté conditionnelle, avançant trois motifs principaux : le risque d’interférence avec des témoins, la possibilité de falsification de preuves et le danger de fuite hors de la juridiction.
La magistrate a ordonné la détention préventive des quatre accusés jusqu’au 12 août, date de leur prochaine comparution. Toutefois, les avocats de la défense ont déposé des motions de remise en liberté sous caution (bail motions), qui seront examinées par la cour le jeudi 7 août.
Les autorités n’ont pas exclu de nouvelles arrestations dans les jours à venir, en fonction de l’évolution de l’enquête.
Cette opération d’envergure s’inscrit pleinement dans le rôle et les responsabilités du NCC, entité instituée par la loi pour garantir une coordination efficiente entre toutes les institutions engagées dans la lutte contre les crimes financiers.
Le NCC est composé du directeur général de la FCC, du Solicitor General, du Directeur des poursuites publiques, du commissaire de police, du directeur général de la Mauritius Revenue Authority, du gouverneur de la Banque de Maurice, ainsi que des Chief Executives de la Financial Services Commission, de la Gambling Regulatory Authority et du directeur de la Financial Intelligence Unit.
Steven Moothoocurpen : Un nom familier dans les milieux troubles
La présence de Steven Moothoocurpen parmi les suspects arrêtés mardi ne surprend guère les observateurs avertis. Ce trentenaire est un visage bien connu du monde nocturne mauricien et des services de police, son nom étant régulièrement cité dans des affaires de sécurité privée, de violence et de règlements de comptes.
Ancien «bouncer», il avait été interpellé en 2012 lors d’une opération dirigée par le chef inspecteur Hector Tuyau, en compagnie d’une douzaine d’autres agents de sécurité.
Mais c’est surtout en 2014 qu’il s’était retrouvé au coeur de l’actualité, après une fusillade meurtrière survenue à Saint-Pierre. Si l’objectif initial de cette expédition punitive semblait être Steven Moothoocurpen lui-même, c’est son cousin, Yoven Velangany, qui avait été tué par balle.
L’attaque avait été attribuée à une querelle entre deux clans rivaux dans le domaine de la sécurité : d’un côté celui d’Harel Philippe, ancien policier à la réputation sulfureuse, et de l’autre, celui de Bakary Condé. Steven Moothoocurpen, qui était initialement proche du clan Philippe, aurait changé de camp, déclenchant une vendetta sanglante.
Ce revirement avait été perçu comme une trahison, précipitant une série de violences dont l’attaque mortelle de Saint-Pierre fut l’un des épisodes les plus tragiques. Dix suspects avaient été arrêtés à l’époque, dont Robin Saurty et Jean Éric Philippe. Bien que les armes utilisées n’aient jamais été retrouvées, les images de caméras de surveillance, notamment celles d’une quincaillerie voisine, avaient permis des avancées significatives dans l’enquête.
Depuis, le nom de Steven Moothoocurpen est resté associé aux milieux troubles. Son interpellation par la FCC hier relance les spéculations sur les connexions profondes entre les réseaux de drogue, le blanchiment d’argent et certaines figures de l’ancien système sécuritaire.
Officiellement présenté comme suspect dans une affaire de blanchiment, il devra désormais faire face à la justice dans une affaire qui pourrait bien révéler de nombreuses ramifications. Selon des informations de sources proches de l’enquête, Steven Moothoocurpen entretiendrait des liens étroits avec le fils d’un haut gradé. Les deux hommes seraient associés dans une affaire commerciale. Cette relation fait actuellement l’objet d’investigations approfondies de la part des enquêteurs.