Est de la RDC: dans le Tanganyika, une coexistence pacifique possible entre les Twa et les Bantou

RFI vous propose une série de reportages tournée dans le Tanganyika, une province de l’est de la RDC, frontalière avec le Maniema et le Sud-Kivu. Cette dernière, tout comme le Nord-Kivu, est déchirée par un conflit qui oppose l’armée congolaise et leurs alliés au groupe AFC/M23, soutenu par le Rwanda. Depuis 2022, ce conflit a provoqué d’importants mouvements de population qui fuient des zones de guerre. Des populations parvenues jusqu’au Tanganyika voisin. Ce qui ravive des blessures dans cette province secouée depuis 2016 par un conflit intercommunautaires entre les Bantou et les Twa. Conflit qui a baissé en intensité depuis 2023. Désormais, les deux communautés réapprennent à revivre ensemble.

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C’est l’heure de la messe ce dimanche à Lukwangulo. Il y a une dizaine d’habitants de ce petit village, situé à une quinzaine de kilomètres de Kalemie, parmi les fidèles réunis devant un bâtiment. Dans ce groupe, il y a des Bantou et des Twa, deux communautés qui se sont pourtant affrontées plusieurs années dans cette province.

Mohammed est Twa, et il se souvient de cette période difficile : « En 2017, nous vivions en paix jusqu’à ce que surgisse le conflit entre les Twa et les Bantou. Des maisons ont été brûlées, vandalisées, il y a eu beaucoup de dégâts dans les deux communautés. »

La coexistence pacifique entre Twa et Bantou

Paulina Zidi

Depuis, des programmes ont été mis en place, notamment par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, afin de travailler sur la coexistence pacifique. « Nous avons fait des formations sur la cohabitation pacifique, explique Raymond Tchengi du FAO, en charge des activités dans ce village. Nous avons distribué des chèvres aux membres des deux communautés qu’ils élèvent ensemble. Il y a aussi maintenant un marché communautaire et surtout des champs et du maraichage en commun. Les Twa et les Bantou travaillent donc ensemble pour améliorer leurs conditions de vie. »

« Nous sommes une même personne »

Et à écouter les témoignages, ça marche, en tous les cas dans ce village. Réunis sous l’arbre au centre du village, il y a effectivement des membres de deux communautés. Clémentine est Bantou, elle est heureuse de cette paix retrouvée, une paix qu’elle estime solide : « Le conflit ne peut pas être ranimé, nous sommes redevenus unis, nous sommes une même personne. Nous vivons vraiment dans l’unité, il y a beaucoup d’échange amical entre nos deux communautés. »

Les habitants Twa et Bantou réunis sous l’arbre au centre du village de Lukwangulo, Tanganyika, en RDC, en octobre 2025.
Les habitants Twa et Bantou réunis sous l’arbre au centre du village de Lukwangulo, Tanganyika, en RDC, en octobre 2025. © Paulina Zidi / RFI

Signe de cette coexistence pacifique : à Lukwangulo, les premiers mariages mixtes ont été célébrés. Et l’exemple de Lukwangulo n’est pas isolé. C’est aussi dans le cas un peu plus au nord de Kalemie. À Miketo, les jeunes se retrouvent ensemble dans un bâtiment qui leur est désormais dédié pour organiser des activités sportives par exemple. Une maternité a aussi été rénovée et les femmes twa et bantou accouchent dans ce même lieu. Les camps de déplacés disparaissent alors petit à petit du paysage.

Comme à Kibumbe, un peu avant Miketo. Dans ce village, il n’y a désormais plus de tentes. Elles ont été remplacées par des maisons en dur après la fermeture du camp en 2024. « Avant, il n’y avait que des maisons en bâche, explique Danièle Monni, la représentante de l’agence des Nations unies pour les réfugiés. C’était un site qui abritait environ 3 000 ménages qui s’étaient installés depuis 2017 et c’est en 2024 que l’on a mis en place le processus de solution durable. »

Propriétaires de leur parcelle

Ces habitations en dur abritent désormais 213 nouveaux ménages qui ont fait le choix de rester dans cette communauté d’accueil, comme Adolphine. Elle est arrivée ici, il y a plus de dix ans, au moment où elle commençait à percevoir une certaine tension communautaire. « Nous nous sommes déplacés à cause de la guerre et nous nous appuyons sur la communauté qu’on a trouvé ici, on les suit dans leur champ où on extrait même du bois qu’on vient vendre pour avoir de quoi se nourrir. Moi, je ne veux plus quitter cet endroit. Certains déplacés ont choisi de partir, moi, je veux rester vivre à Kibumbe. Je veux plus me déplacer, parce que je me sens bien ici. »

Ces personnes déplacées restées dans leur communauté d’accueil

Paulina Zidi

C’est aussi le cas de Robert. Il a tout juste 15 ans et veut devenir médecin. Il est arrivé à Kibumbe avec ses parents quand il avait à peine six ans. Eux aussi avaient fui les violences intercommunautaires et eux aussi ont trouvé une nouvelle communauté d’accueil. « Je vais à l’école et je suis très content d’être là », confirme le jeune homme.

Robert, Adolphine et les autres familles n’ont pas reçu qu’une maison, ils ont surtout reçu des titres fonciers et sont désormais propriétaires de leur parcelle.

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