En Tunisie, l’ouverture d’un procès emblématique sur l'aide humanitaire aux migrants

En Tunisie, le procès de Sherifa Riahi, ancienne directrice de la branche tunisienne de l’association Terre d’Asile, s’ouvre ce 15 décembre 2025 à Tunis. Elle, un autre employé de l’association, et deux élus municipaux de la ville de Sousse, comparaissent devant la justice pour leur rôle joué dans l’aide humanitaire apportée aux migrants subsahariens. Pour la société civile, ce procès est emblématique de la criminalisation de l’aide aux migrants.

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Avec notre correspondante à Tunis, Lilia Blaise

Pendant une manifestation ce samedi en Tunisie de la société civile et de l’opposition politique contre la répression, Leila Riahi brandit dans le cortège la pancarte avec le visage de sa cousine, Sherifa Riahi. « On attend ce procès depuis très longtemps et on espère que cette fois la lumière va être faite sur la réalité des faits », lance-t-elle.

Sherifa Riahi, ancienne directrice de Terre d’Asile Tunisie, l’actuel directeur Yadh Bousselmi, le directeur financier de l’ONG Mohamed Joo, ainsi que l’ancien maire de Sousse Mohamed Iqbal Khaled et son adjointe Imen Ouardani, qui avaient conclu en 2022 un partenariat avec l’ONG Terre d’Asile, sont poursuivis sur la base de divers chefs d’accusation : le fait d’héberger des personnes étant entrées clandestinement ou illégalement sur le territoire tunisien, ou de faciliter l’entrée, la sortie et la circulation ou le séjour illégal d’un étranger.

« Je suis certain qu’ils vont sortir un jour ou l’autre »

Des accusations sans fondement, selon Maitre Seiffallah Ben Meftah, avocat de Sherifa Riahi : « La seule chose dont je suis sûr, c’est que Sherifa et les autres membres de l’association n’ont rien fait. Je suis certain qu’ils vont sortir un jour ou l’autre. Est-ce que ce sera ce lundi ou à une autre audience ? Je ne sais pas, ça sera du 50-50. »

L’avocat Seiffallah Ben Meftah ajoute que l’ONG Terre d’Asile a été complètement blanchie dans le cadre de cette affaire et qu’il ne fait pas sens de poursuivre ses salariés, selon ses mots. Le 24 novembre, deux cadres humanitaires travaillant également sur la migration ont été relâchés après deux ans de prison. Un verdict qui donne de l’espoir, selon les proches de Sherifa et de ses collègues.

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Dans un communiqué publié vendredi, l’ONG Amnesty International a dénoncé un « procès fallacieux » et réclamé la libération des détenus, emprisonnés depuis un an et huit mois. « Ils sont uniquement poursuivis pour leur travail légitime consistant à fournir une aide et une protection vitales à des réfugiés, personnes en quête d’asile et migrants se trouvant dans des situations précaires », a déclaré Sara Hashash, directrice régionale adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.

En février 2023, un communiqué publié sur la page Facebook du président Kaïs Saïed évoque le risque d’un grand remplacement démographique à cause de l’arrivée « de hordes de migrants subsahariens dans le pays ». S’ensuit des campagnes sécuritaires et des contrôles renforcés sur les personnes migrantes en situation irrégulière en Tunisie ainsi qu’un déferlement de haine sur les réseaux sociaux.

Entre 20 000 et 30 000 migrants subsahariens seraient présents en Tunisie selon les chiffres officiels. Deux ans plus tard, la présence de ces migrants en Tunisie a baissé ainsi que les départs irréguliers vers l’Italie, selon les données de la garde nationale. Mais les ONG dénoncent la criminalisation de l’aide humanitaire et un climat de peur pour tous ceux qui travaillent sur la migration.

En 2024, les autorités ont également ordonné la suspension des activités d’enregistrement et de détermination du statut de réfugié par le HCR, « supprimant dans les faits la seule voie permettant de demander l’asile dans le pays », selon l’ONG Amnesty International, le pays n’ayant pas de loi sur le droit d’asile.

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