Côte d’Ivoire: ouverture du procès de l'attaque jihadiste de Kafalo en juin 2020

En Côte d’Ivoire, le procès des attaques de Kafolo est entré dans le vif du sujet lundi 22 décembre, devant le tribunal de première instance d’Abidjan. Objectif : faire toute la lumière sur la mort de treize militaires et d’un gendarme, tués lors de l’assaut de leur poste-frontière par des combattants jihadistes. Les faits remontent au 10 juin 2020, à la frontière avec le Burkina Faso. Une quarantaine d’hommes sont jugés pour « actes terroristes ». Mais, à ce stade des débats, les audiences soulèvent davantage de questions que de réponses.
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Avec notre correspondant à Abidjan, Benoît Almera
En Côte d’Ivoire, une première interrogation se pose au tribunal de première instance d’Abidjan : qu’est-ce qui a déclenché l’attaque de Kafolo, le 11 juin 2020 ? Face aux accusés, le président de la cour évoque l’opération Comoé, menée en mai 2020, qui avait conduit à la destruction de plusieurs bases jihadistes dans cette zone frontalière. L’attaque de Kafolo, survenue un mois plus tard, aurait été une opération de représailles. Pourtant, à la barre, les récits des accusés restent vagues. Certains reviennent sur leurs déclarations antérieures.
Pas plus de clarifications non plus sur les liens entre les accusés et les groupes jihadistes sahéliens. Lors des interrogatoires, le nom de Dramane Sidibé, alias Hamza, revient à plusieurs reprises. Ce Burkinabè appartient à la katiba Macina, liée au Jnim, le groupe de soutien à l’islam et aux musulmans. Selon l’accusation, il aurait mis en place les cellules à l’origine de l’attaque. Mais les accusés interrogés disent ne pas le connaître.
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Autre inconnue, celle des complicités. Comment certains accusés ont aidé les assaillants : en les avertissant des opérations de ratissage ou en les finançant ? Pour Mohamed Lamine Koné, l’un des avocats de la défense, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions.
« Il y a des accusés arrêtés avant les attaques et d’autres après. Mais c’est le procès de toutes les personnes susceptibles d’avoir “flirté” avec les mouvements jihadistes. Certains ont été interpellés uniquement parce qu’ils ont des proches impliqués. C’est une déduction un peu courte ».
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Ali Sidibé, l’un des coordonnateurs de l’attaque de Kafolo
Parmi les accusés, Ali Sidibé, alias Sofiane, est présenté comme l’un des coordonnateurs de l’attaque. Assis, menotté face aux juges, zabiba sombre sur le front, barbe fournie et qamis jusqu’aux genoux, cet homme qui se décrit comme un « éleveur peul » est au cœur des débats.
Selon le dossier d’instruction, son parc à bétail, situé de l’autre côté de la frontière, aurait servi de point de ravitaillement aux assaillants. Devant la cour, il affirme même avoir participé à l’attaque du 10 juin 2020, sans livrer de détails. « Tu es jihadiste ? », lui demande le président. « Oui », répond-il, esquissant un sourire.
Le tribunal s’interroge également sur sa fuite : comment Ali Sidibé a-t-il pu échapper à l’armée ivoirienne durant plusieurs jours après l’attaque ? Face aux juges, Ali Sidibé reste évasif, mais l’instruction révèle plusieurs déplacements transfrontaliers nocturnes.
L’un des enjeux majeurs de ce procès sera donc d’établir les complicités, les circuits de financement, ainsi que les liens entre les assaillants de Kafolo et les groupes jihadistes actifs au Sahel. Les accusés encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
La reprise des audiences est prévue le 5 janvier 2026.
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