La candidature du Président Alassane Dramane Ouattara pour un nouveau mandat, le second selon ses partisans, était, il est vrai, très attendue. Donc c’est sans surprise que l’intéressé lui-même l’a officiellement annoncée ce 29 juillet, à près de trois mois de la date de la présidentielle du 25 octobre 2025.
Pour certains, les raisons qui ont motivé cette candidature peuvent en effet être sujettes à débat, qui ne saurait être tranché définitivement, car sous la Constitution de 2016, modifiée en 2020, qui a fait basculer la Côte d’Ivoire sous la 3ème République, les spécialistes du droit constitutionnel ne sont pas unanimes. On dira que la question de la durée et du nombre de mandats est devenue monnaie courante dans beaucoup de pays d’Afrique. Mais là où la candidature de M. Ouattara interroge, c’est sur ses incidences dans le jeu politique où seront probablement exclus Laurent Gbagbo, Tidjane Thiam, et Soro Guillaume.
D’abord dans son camp, Ouattara a bien manœuvré pour étouffer toute velléité de candidature alternative dans son camp en réservant sa réponse à l’interpellation des responsables de son parti dont certains étaient prêts à enfiler la toge du candidat, jusqu’à ce mardi 29 juillet. Aucun responsable lucide n’aurait pris le risque « suicidaire » d’engager une candidature à 3 mois du scrutin, sans appareil et tout ce qui va avec en terme de communication.
Ensuite au niveau de l’opposition, le PDCI, le PPA-CI et La Génération des Peuples Solidaires (GPS), vont-ils se faire harakiri en proclamant Urbi et Orbi qu’il n’existe pas chez eux un plan B ? S’agit-il d’une stratégie pour cacher leur choix alternatif à la radiation des listes électorales de leurs leaders respectifs ?
Cette option comporte de nombreux risques de fractures internes qui seront au bénéfice de Ouattara. Au sein du PPA-CI déjà, la candidature annoncée de Ahoua De MELO, un de ses vice-présidents, contre l’avis officiel de son parti, a provoqué des sanctions immédiates contre deux de ses soutiens. Au niveau du PDCI, l’alternative Jean-Louis Billon a récemment été écartée par Tidjane Thiam dans une interview au cours de laquelle il maintient sa candidature.
Sur l’autre frange de l’opposition, Pascal Affi Nguessan, Charles Blé Goudé, Simone Gbagbo, affûtent leurs armes, tout en cherchant à tirer profit de leur appartenance à CAP-CI, qui pourrait éventuellement être une béquille pour passer le premier tour au cas où les « poids lourds » seraient éliminés.
Le scénario qui se dessine donc aujourd’hui, à la lumière des discours qui sont tenus, est celui d’une élection référendaire, avec d’une part, ceux qui sont pour un nouveau mandat de Ouattara, et de l’autre, ceux qui sont contre.
Cette configuration du jeu politique impose une seule et unique issue à Alassane Ouattara : passer au premier tour avec plus de 51 % des voix des 8,7 millions d’électeurs ivoiriens.
Faute de quoi, il faut craindre une alliance au second tour au sein de l’opposition, pour un report de voix sur le candidat le mieux placé. Les contacts qui se font depuis un certain temps au sein de l’opposition laissent croire à une entente tacite entre les candidats définitivement éligibles et les candidats en attente.
La rencontre entre le RHDP et CAP CI, d’un côté, celle entre Gbagbo et Tidjane Thiam ne sont-elles pas des signes avant-coureurs ? D’ailleurs il ne faut pas d’office exclure un accord électoral entre les partisans du RHDP et certains partis de CAP-CI, accord pouvant déboucher sur un futur accord de gouvernement qui permettrait à Ouattara de rebattre les cartes dans la perspective de sa succession. D’un autre côté aussi, il est possible de retrouver à court terme un accord électoral entre le candidat du PDCI-RDA et celui du PPA-CI, qui qu’il soit, car l’objectif est de faire obstacle au 4ème mandat du Président Ouattara.
Les jeux seront donc assez ouverts d’ici là, même si Ouattara a encore une longueur d’avance.