Cote d'Ivoire: Meeting à Yopougon – Le double pari risqué de Gbagbo

A dire vrai, Laurent Gbagbo n’avait pas besoin de faire « Côcôcô », autrement dit toquer à la porte de Yopougon, tant il était chez lui dans ce quartier populaire et populeux d’Abidjan, réputé être le fief de l’ancien président ivoirien, quand bien même la mairie est actuellement occupée par un du RHDP. C’est donc sur ses terres que l’enfant terrible de Mama a clôturé samedi dernier la tournée Côcôcô entreprise depuis le début de l’année par le PPA-CI (Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire), un parti politique fondé en 2021 dans le sillage de son retour de La Haye.
Ce bouquet final était d’autant plus attendu qu’il intervenait à un peu plus de deux mois de la présidentielle d’octobre prochain et à dix jour de la date limite de dépôt de candidature (le 26 août). Un scrutin pour lequel, rappelons-le, le Woody, est forfait au même titre que d’autres poids lourds de l’opposition ivoirienne tels Tidjane Thiam, Guillaume Soro ou Charles Blé Goudé. L’exclusion de Gbagbo de la liste électorale, selon les autorités ivoiriennes, repose sur ses condamnations judiciaires, en l’occurrence, les vingt ans de prison dans l’affaire dite du « braquage de la BCEAO », survenue lors de la crise post-électorale de 2010-2011.
Pourtant, les militants du PPA-CI, sortis en masse à la mythique place Figayo, y croient toujours dur comme fer : leur champion sera bel et bien de la partie ; sauf qu’on ne voit pas trop quel miracle électoral pourrait bien se produire d’ici-là pour que leurs désirs soient satisfaits.
Dans cette affaire, Gbagbo mène deux combat : pour sa propre candidature, perdue d’avance, et surtout pour empêcher le 4e mandat d’Alassane Ouattara. Et là aussi, ce n’est pas gagné d’avance, quand bien même il n’a cesser de marteler ceci : « Notre détermination est nette et claire : il n’y aura pas de 4e mandat ». On est bien curieux de savoir comment il va s’y prendre pour empêcher que la volonté d’ADO soit faite.
Les manifestations, jusque-là pacifiques, vont-elles devenir de plus en plus violentes au fur et à mesure que le rendez-vous électoral approchera ? Là est la question. Mais si tel devrait être le cas, ça pourrait très rapidement se retourner facilement contre lui, car le pouvoir se fera fort d’utiliser la violence légale pour maintenir ou restaurer l’ordre, tout en mettant sur le dos de Gbagbo la responsabilité des dérives pour avoir envoyé ses militants dans la rue. A tous les coups, il risque d’en sortir perdant.
Il ne le sait que trop, lui, qui, dans son discours a, du reste, recadré ses militants qui, lors d’une marche, avaient eu proférer des messages aux relents xénophobes. Autant dire qu’il se la doit jouer avec prudence pour réaliser son double objectif sans pour autant être le fauteur de troubles aux lourdes conséquences.