Contestations à Madagascar: un puissant homme d’affaires répond aux accusations répétées de la GenZ

À Madagascar, Mamy Ravatomanga, l’homme d’affaires hyper puissant que la Génération Z accuse de piller le pays et dont elle réclame le jugement, a voulu montrer patte blanche. Le 6 octobre, au cours d’une émission spéciale de près de deux heures, retransmise sur trois chaînes privées de télévision et enregistrée au sein même de sa société Madagascar Security Academy (MSA), devant un parterre d’employés, l’entrepreneur s’est livré à un exercice de style périlleux pour tenter de répondre aux attaques de ses détracteurs. Et marteler, surtout, que le président et lui sont toujours en bons termes.
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Avec notre correspondante à Antananarivo, Sarah Tétaud
Mains posées sur les genoux pendant toute la durée de l’entretien, voix claire, Mamy Ravatomanga répond aux questions posées en rafales par ses trois intervieweurs.
Seul son regard agité semble contredire son apparente sérénité. À chaque question, une attaque. L’homme d’affaires se défend : « On a dit que pour les pillages [durant les manifestations qui ont débuté à Madagascar le 25 septembre, NDLR], je serais derrière, avec des milices, qui aideraient les gendarmes. Ça n’a jamais existé et ça n’existera jamais. Les hommes que je forme à mon académie ne sont utilisés que pour la sécurité privée. On veut diaboliser mon nom et celui de ma société. »
Depuis 15 jours en effet, Mamy Ravatomanga est sous le feu des critiques. Dans la rue, la Génération Z scande son nom et demande que le magnat à la tête d’un empire tentaculaire soit jugé.
Face à lui, les journalistes rappellent que son groupe n’a pas été touché durant les nuits de pillages qui ont enflammé la capitale. « Si mes sociétés n’ont pas été victimes de pillages, c’est peut-être parce que beaucoup de personnes ont été aidées par notre association et que les bénéficiaires viennent volontairement nous aider à sécuriser nos sites », suppose-t-il.
« On invente des dossiers sur moi »
« On vous accuse d’être une mafia d’État », assène un journaliste. « Je n’ai rien à cacher », rétorque l’homme d’affaires. « Pendant cinq ans, le Parquet national financier de Paris a enquêté et il n’a rien trouvé », assure-t-il. « On invente des dossiers sur moi : bois de rose, falsifications de documents. Puis, on se rend compte que le dossier est vide », ajoute-t-il.
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Celui qui est aussi consul de Serbie et de Côte d’Ivoire bat en brèche les rumeurs et a réponse à tout. « Prédateur dans tous les secteurs d’activités rémunérateurs et les marchés publics ? » Il lance : « Calomnie. » « Ordonnateur de redressements fiscaux abusifs envers ses concurrents ? » Il lâche : « C’est exagéré tout ce que les gens racontent. Les contrôles fiscaux, moi aussi j’en ai. De toute manière, tout ce qui est négatif ici, on me l’impute. »
« La politique ne m’intéresse pas. Moi, je suis dans l’entrepreneuriat ! »
Et quand on le questionne sur les rumeurs persistantes d’un divorce entre lui et Andry Rajoelina, dont il est présenté comme le principal financier de ses campagnes, l’intéressé insiste : « Je n’ai aucun problème avec lui. Peut-être que certains en ont, des gens à l’étranger qui aiment à penser qu’une dispute entre nous pourrait affaiblir le président de la République. Ils ont tort. »
Tout au long de l’émission, Mamy Ravatomanga se fait même le meilleur avocat du chef de l’État actuellement contesté. Il ne cherchera pas à prendre sa place non plus, assure-t-il. « La politique ne m’intéresse pas. Moi je suis dans l’entrepreneuriat », martèle-t-il. Avant de certifier que « jamais il ne fera[it] de mal à d’autres entrepreneurs malagasy ».
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