Congo-Kinshasa: Kinshasa, une des agglomérations les plus polluées au monde
La capitale congolaise fait partie des dix agglomérations les plus polluées au monde en octobre 2025, selon l’entreprise IQAir. Ce qui soulève des questions sur les causes de cette pollution et ses impacts sur la santé.
À Kinshasa, la pollution de l’air est devenue une urgence au quotidien. En octobre 2025, selon l’entreprise spécialisée suisse IQAir, l’indice de qualité de l’air a atteint 201, un niveau qualifié de malsain par les normes internationales.
Dans plusieurs quartiers densément peuplés de la capitale congolaise, l’air est chargé de poussière et de particules fines, surtout le long des grands axes routiers où circulent des milliers de véhicules anciens et mal entretenus.
Aux abords des chantiers et des marchés, la visibilité peut être réduite par les nuages de poussière soulevés par le passage constant de motos et de camions.
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« Les principales sources sont diverses et souvent liées à des activités mal contrôlées. D’abord, le transport routier : beaucoup de véhicules utilisent un carburant de mauvaise qualité, ce qui provoque une forte émission de monoxyde de carbone. Ensuite, la combustion à l’air libre des déchets, qu’ils soient organiques ou plastiques, dégrade énormément la qualité de l’air », explique Junias Kabele, expert en santé environnementale.
« Enfin, Kinshasa est une ville très poussiéreuse. Avec les nombreux chantiers de routes et de maisons, les particules comme le PM10 (particules fines en suspension dans l’air, dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres, ndlr) se retrouvent facilement dans l’atmosphère. »
Ces particules fines et ces gaz polluants ont un impact direct sur la santé, souligne l’environnementaliste.
« Les maladies respiratoires sont les plus préoccupantes, surtout chez les enfants. Certaines particules sont cancérigènes et peuvent même provoquer des cancers du poumon. Les groupes les plus vulnérables sont les enfants, parce que leurs poumons sont encore en développement, les femmes enceintes, car la pollution peut affecter le foetus, et les personnes âgées, souvent fragilisées par des maladies chroniques. Les travailleurs exposés à la poussière sur les chantiers sont, eux aussi, très vulnérables », assure Junias Kabele.
Quelles solutions pour améliorer la qualité de l’air à Kinshasa ?
L’expert insiste sur la nécessité d’un contrôle plus strict, sur l’application des lois, mais aussi sur une large sensibilisation.
« Il faut un contrôle rigoureux : sur l’état des véhicules, sur la qualité du carburant qui entre dans la ville, mais aussi sur la gestion des déchets. Il faudrait interdire de brûler les déchets à l’air libre et mettre en place des mécanismes fiables pour les évacuer. Si les gens jettent encore leurs déchets en pleine route, cela montre un manque d’information », estime Junias Kabele.
« Il faut sensibiliser, utiliser tous les canaux : publicité, radio, télévision… Informer de manière systématique. Et lorsque tout est bien encadré, les personnes qui ne respectent pas les règles doivent être sanctionnées. »
Une révision de la politique nationale d’assainissement
Pour y répondre, le ministère national de l’Environnement, du Développement durable et de la Nouvelle économie du climat a revu, le mois dernier, sa politique nationale d’assainissement. Cette révision intègre désormais la lutte contre le réchauffement climatique, mais aussi des mécanismes spécifiques visant à réduire toutes les formes de pollution, notamment celle de l’air, longtemps absente du texte.
« Le mois passé, nous avons procédé à la révision de la politique nationale d’assainissement. Cette nouvelle version intègre non seulement les mécanismes de lutte contre le réchauffement climatique, mais aussi ceux destinés à combattre toutes les formes de pollution, y compris la pollution de l’air, qui n’était pas prise en compte auparavant », explique Maître Olivier Manzianda Lusambo, expert senior en assainissement au ministère de l’Environnement.
« Le ministre souhaite également doter le pays d’une loi spécifique relative à l’assainissement. Cette loi renforcera la gouvernance du secteur et les mécanismes coercitifs, afin que la RDC dispose d’outils fiables pour gérer efficacement toutes les questions liées à la pollution de l’air. »
Améliorer la coopération avec la population
Une volonté politique qui se heurte encore à des obstacles importants, notamment en matière de coordination entre les institutions, estime Maître Olivier Manzianda Lusambo :
« Le grand défi demeure dans le mécanisme de collaboration entre les différentes structures, comme les ministères des Transports, de la Santé, de l’Intérieur ou encore du Commerce. Tous interviennent dans la lutte contre la pollution de l’air, mais il est essentiel de renforcer cette collaboration pour une prise en charge globale et efficace. »
La population joue également un rôle crucial dans cette lutte, selon l’expert :
« Les défis concernent aussi la coopération avec la population. Elle est parfois victime, mais aussi responsable de certaines formes de pollution. Elle doit collaborer avec les structures de l’État et dénoncer les actes de pollution. Cela permettra aux autorités, à tous les niveaux, d’intervenir plus efficacement sur cette question de pollution de l’air qui met en péril la vie de millions de citoyens », assure Maître Olivier Manzianda Lusambo.
À Kinshasa, plusieurs réformes sont en cours. Mais leur réussite dépendra de la capacité de tous les acteurs à unir leurs efforts pour améliorer durablement la qualité de l’air et protéger la santé de la population.
La lutte contre la pollution de l’air dans la capitale congolaise passe donc par une combinaison de contrôle, d’éducation et de responsabilité collective.
Un défi de taille dans une ville en pleine expansion qui, en 2030, devrait s’approcher de 25 millions d’habitants et surclasser Lagos, au Nigeria.


