Alors que la RDC et l’AFC/M23 ont signé ce samedi un accord de principe pour poser les bases de la paix dans l’est du pays, RFI a pu prendre connaissance du contenu du document sur lequel se sont accordées les parties.
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Le document, paraphé ce samedi 19 juillet en présence du ministre d’État qatarien aux Affaires étrangères, affirme l’engagement des deux parties à rechercher une solution pacifique au conflit à travers la diplomatie et la négociation, conformément aux principes de la Constitution de la RDC, à la Charte de l’Union africaine, à celle des Nations unies et au droit international.
Les parties s’engagent à coopérer pleinement avec les organisations internationales et régionales, dans le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC, afin de protéger les populations civiles et de mettre en œuvre les principes énoncés. La déclaration prévoit un engagement à un cessez-le-feu permanent, interdisant les attaques aériennes, terrestres, maritimes ou lacustres, ainsi que tous les actes de sabotage, la propagande haineuse et toute tentative de prise de nouvelles positions par la force. Un mécanisme de supervision et de vérification sera mis en place pour définir les modalités du cessez-le-feu et en garantir la mise en œuvre. Les parties conviennent également de s’abstenir de tout acte susceptible de compromettre le bon déroulement de ce processus.
Retour des réfugiés et des personnes déplacées
Les signataires s’engagent à adopter des mesures de confiance visant à rassurer la population congolaise et à créer un climat favorable au dialogue. Ils soulignent l’importance de la mise en œuvre rapide de ces mesures dont la création, avec l’appui du Comité international de la Croix-Rouge, d’un mécanisme permettant, dans le respect du droit congolais, la libération de prisonniers ou détenus identifiés par les deux parties.
Sur la question de la restauration de l’autorité de l’État, la déclaration souligne que celle-ci constitue une conséquence logique du règlement des causes profondes du conflit. L’accord de paix à venir devra préciser les modalités et le calendrier de cette restauration sur l’ensemble du territoire national.
Le texte prévoit aussi que le retour des réfugiés et des personnes déplacées se fera dans des conditions sûres, volontaires et dignes, en conformité avec le droit humanitaire international et dans le cadre des mécanismes tripartites associant la RDC, les pays d’accueil et le HCR.
Les parties expriment leur engagement à coopérer avec la Monusco et les mécanismes régionaux pour assurer la protection des civils et la mise en œuvre du cessez-le-feu, dans le cadre d’un mécanisme de vérification conjointement défini.
La déclaration de principes entrera en vigueur immédiatement après sa signature et devra être appliquée au plus tard le 29 juillet 2025. Elle prévoit l’ouverture de négociations directes pour un accord de paix global, au plus tard le 8 août 2025. Ces discussions devront s’aligner sur l’accord signé le 27 juin 2025 à Washington entre la RDC et le Rwanda. L’objectif est de conclure et signer cet accord de paix global, d’ici au 18 août 2025.
Toutefois, tout n’est pas réglé car aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect des engagements. Et surtout, il n’y a dans ce document aucune mention des mécanismes de justice. Sur ce point, les négociations sont encore loin du but.
« Une étape non négligeable »
Les deux parties saluent le rôle déterminant joué par le Qatar dans la facilitation de ces négociations, ainsi que le soutien constructif des États-Unis et les efforts constants de l’Union africaine depuis le lancement du processus de paix. « Nous saluons la signature de l’accord de principe à Doha », déclare Emmanuel Shadary. Le secrétaire permanent du PPRD, le parti de l’ancien président Joseph Kabila, va dans son sens et évoque « une étape non négligeable des discussions entre le gouvernement et l’AFC/M23 ».
Dans l’autre camp, Prince Epenge, le porte-parole de Lamuka, affirme que si « cette déclaration perfectible peut nous ramener la paix à Bukavu, à Goma et dans d’autres localités, nous ne pouvons que prendre acte ».
Reste que pour le PPDR et Lamuka, ce n’est pas suffisant, les deux formations rappellent qu’un dialogue interne reste néanmoins incontournable. « Il faut maintenant que les filles et fils du Congo se retrouvent autour de la table », ajoute Prince Epenge. Une posture que partage aussi Jean-Marc Kabund. Cet ancien proche du pouvoir devenu opposant : « Le cessez-le-feu obtenu ne doit pas être une fin en soi, mais plutôt une opportunité pour engager enfin un dialogue véritablement inclusif. Il y va de la paix durable et du respect des délais constitutionnels pour les prochaines élections. »
Il y a de bonnes paroles mais il reste encore à les concrétiser.
Réactions d’habitants de Bukavu
Les autres formations politiques restent prudentes après cette déclaration de principe. « On attend de voir ce que les protagonistes ont compris de leur propre accord », confie un membre de l’opposition. « Nous attendons des éclaircissements avant de commenter cette signature », explique pour sa part un proche de la présidence.
Jean-Claude Katende de l’Association africaine de défense des droits de l’homme, s’est lui réjoui de cette signature, « une étape importante vers la restauration de la paix globale et durable ».
Le document a été signé par Sumbu Sita Mambu, représentant du président congolais en charge des processus de Luanda et de Nairobi, et Benjamin Mbonimpa, secrétaire permanent de l’AFC/M23.
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