Cameroun: Projet de candidature unique de l'opposition à la présidentielle camerounaise

S’il y a une chose qu’on reproche très souvent aux partis d’opposition en Afrique, c’est bien leur incapacité à unir leurs forces pour barrer la route aux présidents au pouvoir qui, généralement, partent grands favoris à la bataille à leur propre succession. Et Dieu seul sait combien de fois ces divisions intestines leur ont coûté la victoire qui était parfois accessible.
Tout cela, parce que chacun préfère être tête de rat que queue d’éléphant. Au Cameroun, des partis d’opposition ont lancé le pari de relever le défi de la candidature unique en vue de contrecarrer les plans de Paul Biya à la présidentielle d’octobre prochain. Le projet est porté par l’Union pour le changement 2025, un groupe de facilitateurs qui a désigné, le 13 septembre dernier, Issa Tchiroma Bakary, «candidat consensuel» de l’opposition. Ce dernier, faut-il le rappeler, fut pendant 16 ans, ministre de Paul Biya, avant de claquer la porte de son gouvernement pour se présenter comme candidat contre son ancien mentor.
Cela dit, il faut reconnaître en ce groupe de facilitateurs, le mérité d’avoir essayé là où beaucoup auraient opté de faire cavalier seul. Et c’est déjà un bon début qu’il faut saluer dans un Cameroun où une chape de plomb s’abat sur l’opposition. Mais le chemin semble encore long pour parvenir à cette candidature unique qui pourrait être décisive à la bataille présidentielle prochaine.
Le projet est noble, mais se trouve confronté à des écueils
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En effet, si le groupe de facilitateurs se gargarise du fait que cet ancien dignitaire du parti au pouvoir «a été voté à l’unanimité», il faut cependant relever que c’est simplement parce qu’il n’avait pas de concurrents pour être le candidat de toute l’opposition. Pour cause, parmi les 11 candidats de l’opposition, Issa Tchiroma Bakary a été le seul à avoir accepté l’ensemble des conditions qui leur ont été présentées.
Ces conditions sont, entre autres, « être candidat pour un mandat unique, faire un audit de l’Etat, tenir des assises nationales, faire un mandat de transition et de refondation de 3 ou 5 ans ». C’est dire si la « candidature consensuelle » brandie par l’Union pour le changement 2025, est une candidature contraignante. C’est d’autant plus évident qu’elle est assortie de conditions auxquelles 10 autres prétendants n’ont d’ailleurs pas voulu se plier. Et c’est là le problème.
C’est dire que le «candidat consensuel» annoncé, n’est, en vérité, pas si consensuel qu’il n’y paraît. En tout état de cause, avant même de s’interroger sur l’impact de cette stratégie sur la prochaine présidentielle où le nonagénaire président sortant rempile pour un énième mandat, la véritable question qu’il faut se poser est la suivante : l’objectif de ce projet ambitieux de candidature unique de l’opposition, est-il réalisable ?
Rien n’est moins sûr. Car, visiblement, la classe politique d’opposition n’est pas vraiment unie autour de cette candidature unique souhaitée. A preuve, même si le groupe des facilitateurs, porteur de ce projet, affirme que l’ancien ministre et porte-parole du gouvernement est soutenu par une cinquantaine de partis politiques et associations, ce dernier ne peut, pour l’instant, compter sur le soutien des 10 autres candidats de l’opposition.
Pour l’heure, il n’y a aucune garantie que ces derniers se retirent pour faire de la place à Issa Tchiroma Bakary. Il l’a lui-même reconnu et a déclaré tendre la main à l’opposition, à la société civile et à la diaspora, invitant les uns et les autres à taire leurs ego pour l’intérêt de la Nation. C’est dire si le projet est noble, mais se trouve confronté à des écueils et pas des moindres.