Bénin: L'opposition Les Démocrates désespère militants et citoyens

Ils prétendaient vouloir incarner la relève politique du Bénin. Aujourd’hui, Les Démocrates s’enfoncent dans une crise profonde. Entre luttes internes, démissions en cascade et désillusion de la base, le parti fondé par Boni Yayi n’inspire plus ni confiance ni espoir. Pour beaucoup de Béninois, Les Démocrates ne sont plus une alternative, mais le symbole d’un gâchis politique.
Un parti au leadership autoritaire et excluant
Il y a encore quelques mois, des militants étaient encore enthousiastes à l’idée d’aller défendre “le retour de la vraie opposition”. Mais les promesses d’un parti rassembleur se sont rapidement évaporées, remplacées par des querelles de leadership et des exclusions à répétition. La désignation à la dernière minute du duo Renaud Agbodjo – Jules Lodjou, à la veille du dépôt des candidatures présidentielles, a été le début d’une crise qui couvait depuis des mois de tension.
“On a remplacé la démocratie interne par des consignes venues d’en haut”, ajoute une responsable locale du Couffo, aujourd’hui démissionnaire. À plus haut niveau, ce manque de consultation s’est traduit par le retrait du parrainage du député Michel Sodjinou, pour cause de falsification présumée, qui n’a fait qu’amplifier la colère. Privé d’un seul parrain, le parti a été disqualifié pour ne pas avoir su élargir sa base politique au delà du nombre de parrainages nécessaires pour pouvoir candidater.
Les cadres se désolidarisent
L’échec électoral a déclenché une hémorragie interne. Six députés – Michel Sodjinou, Joël Godonou, Chantal Adjovi, Léansou Do Régo, Denise Hounmènou et Constant Nahum – ont quitté le groupe parlementaire, dénonçant une “gouvernance paranoïaque” et “des pratiques destructrices”. Les critiques ne viennent plus seulement du terrain : même les élus brisent le silence et quittent le navire.
Sur Eden TV, le député Midofi Antonin Hounga a reconnu publiquement les erreurs du parti :
“C’est vrai, il faut le reconnaître, le parti a fait un mauvais choix. On ne choisit pas un général pour aller au combat et, au premier coup de fusil, le général détale.”
Une déclaration qui a fait l’effet d’une bombe dans les rangs : pourquoi ne pas avoir plus consulté ? Pourquoi ne pas avoir mis en place un processus plus inclusif pour désigner le duo candidat ? C’est le sentiment qui domine chez les militants : celui d’être dessaisi de leur droit de pouvoir contribuer à la ligne du parti, et de n’être considéré que comme du menu fretin.
Patrick Djivo : le départ de trop
Le départ de Patrick Djivo, ancien député et ex-secrétaire national aux élections, a confirmé la profondeur de la crise. Il a évoqué un climat “d’exclusion”, de “régionalisme” et de “guerre de clans”. “Si le parti Les Démocrates tient encore debout aujourd’hui, c’est à 70 % grâce à moi”, a-t-il déclaré avant d’ajouter : “Je préfère partir avant que les choses ne me quittent.”
Dans les sections locales, sa démission est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Les départs se multiplient dans les communes du Mono et du Couffo où les coordonnateurs locaux démissionnent à tour de rôle.
À cinq mois de la présidentielle, les Béninois observent avec désarroi l’effondrement d’un parti qui voulait incarner une alternance crédible. Alors que la majorité présidentielle s’est mise en ordre de marche dans le calme, l’opposition radicale n’a offert qu’un spectacle indigne d’un parti prétendant à gouverner.
De symbole d’opposition, Les Démocrates sont devenus un cas d’école : celui d’un parti qui, faute d’avoir su se gouverner lui-même, a fini par désespérer les citoyens.



