Au Kenya, les femmes peinent à se faire une place en politique

Les Kényanes occupent seulement 23% des sièges à l’Assemblée nationale et 31% au Sénat. Pour comprendre les obstacles et encourager leur représentation, l’ONG Social Justice League a lancé une campagne. Sexisme, agressions, intimidations, mais aussi manque de moyens financiers : celles qui se lancent en politique dénoncent un parcours semé d’embûches.

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Avec notre correspondante à Nairobi, Albane Thirouard

À Nairobi, plusieurs femmes politiques se retrouvent dans un café. Parmi elles, Zipporah Kamau, candidate aux élections de 2022 pour un poste d’élue de comté. « Un jour, alors que je me dirigeais vers la scène, une personne est venue et m’a attrapé le sein, raconte-t-elle. Je suis arrivée sur le podium après ça, j’avais oublié ce que je voulais dire. » Elle raconte avoir dû demander à son mari d’assurer sa protection.

« Être une femme en politique au Kenya, ce n’est pas facile, car notre société est très patriarcale, poursuit-elle. J’ai subi des attaques sexistes en ligne. Des groupes WhatsApp ont été créés pour me calomnier. Des photos de moi circulaient où j’étais assise sur un homme, c’étaient des montages photographiques. Cela a été une période très difficile pour ma famille et moi. »

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« J’ai fait face à des hommes qui avaient l’impression que j’étais une menace pour eux »

Justina Wamae engagée en politique depuis dix ans, dresse le même constat. « Les deux fois où je me suis portée candidate, j’ai fait face à des hommes qui avaient l’impression que j’étais une menace pour eux, ça venait avec des intimidations, des insultes en ligne. Les hommes ont aussi beaucoup plus de fonds, explique-t-elle. Pour les femmes, c’est plus difficile, elles manquent de moyens financiers, ce qui est un frein pour se lancer en politique. »

« J’ai envie de dire aux jeunes femmes : des opportunités existent pour les deux genres, allez-y et donnez tout ce que vous avez », ponctue Justina Wamae. Ni elle ni Zipporah Kamau ne comptent abandonner la politique, toutes deux envisagent déjà de se représenter aux élections de 2027.

Les femmes devraient représenter au moins 33 % des sièges à l’Assemblée Nationale

La Constitution kényane de 2010 impose qu’aucun des deux genres ne représente plus des deux tiers des sièges dans les organes électifs et nominatifs. Les femmes devraient donc occuper au moins 33 % des postes. Mais cet objectif reste hors d’atteinte.

Depuis 15 ans, « il a été difficile de mettre en œuvre cette disposition constitutionnelle, car le Parlement kényan a échoué à adopter une législation qui préciserait les modalités de sa mise en application, explique-t-elle. Il y a besoin de plus de volonté politique pour s’assurer que cette législation soit enfin votée. »

Si une législation était adoptée, elle pourrait également prévoir des outils de mesure ainsi que des sanctions à l’encontre de toute personne se livrant à des violences pendant les périodes électorales, afin que chacun comprenne qu’il n’est pas acceptable que les femmes évoluent dans un environnement politique qui ne garantit pas leur sécurité.

Judith Juma, vice-présidente de Social Justice League

Albane Thirouard

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