Afrique: L'IA face au chaos informationnel – Comment former les citoyens à décrypter le vrai du faux

Face à la prolifération des deepfakes, le MEDays a analysé l’impact de l’Intelligence Artificielle sur la vérité et la confiance institutionnelle. Le panel « IA, médias et deepfakes : à qui appartient la vérité ? » a conclu que l’IA n’est pas la racine de la crise, mais la force motrice qui accélère le chaos informationnel et expose la fragilité de nos démocraties. La réponse doit être systémique : l’impératif technique d’authentification doit se muer en un réflexe citoyen, seul rempart contre la désinformation. La bataille pour la vérité doit désormais être menée par la profondeur et la résilience humaine.

Le Diagnostic : de la « petite phrase » au chaos informationnel

Le débat a d’abord mis en lumière que la crise actuelle n’est pas uniquement technologique. Le Général Olivier Kempf (rédacteur en chef, La Vigie) a souligné que l’érosion du débat public a débuté il y a 25 ans avec les chaînes d’information en continu : « Pour dire les choses simplement en une phrase, justement la petite phrase a remplacé l’argument…

On ne fait que de petites phrases en petites phrases. » L’IA n’est donc qu’un amplificateur de la post-vérité (où la conviction prime sur les faits). Cette accélération est d’autant plus critique que, selon Scott Goodstein (Fondateur et PDG, Catalyst Campaign), les médias sociaux sont désormais la source d’information la plus rapide et court-circuitent les sources traditionnelles.


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L’IA : catalyseur de la défiance et du risque criminel

Cette accélération génère une perte de confiance qui a de graves conséquences.  Dragan Nikolić (Co-fondateur, Europe Future Centre) a insisté sur le fait que la définition de la vérité a changé, car les institutions et les scientifiques ne sont plus considérés comme des garants. Cette défiance est lourde de conséquences : elle nourrit la radicalisation politique et le complotisme (notamment en Europe). Plus grave encore, Benjamin Arunda (Président, Africa Blockchain Council) a mis en garde contre l’usage criminel futur de ces outils : « L’IA va être utilisée comme un outil de crime et de génocide par des individus… Il est effrayant d’imaginer l’impact sur l’opinion publique en ligne des deepfakes et du faux contenu. » a-t-il dit.

L’urgence de la situation a également été soulignée par les participants lors de la séance de questions/réponses, qui ont rappelé la souffrance engendrée par la désinformation durant la crise du COVID-19 et le fait que la désinformation « détruit pas mal de familles ». Jean-Christophe Bas (The Aspen Institute France) a pointé du doigt les acteurs qui alimentent ce chaos : « Les politiques sont eux-mêmes en train d’utiliser ces outils pour leur propre propagande. Et les plateformes sont elles-mêmes en train d’utiliser ces produits pour vendre, pour faire le buzz et maximiser les clics. »

Les piliers de la résilience : authenticité et compétence civique

Face à ce système, les solutions reposent sur l’adaptation. Le Général Kempf a exprimé un certain optimisme, voyant dans cette crise l’espace nécessaire pour le changement : l’avenir passera par l’authentification. « On va avoir de plus en plus d’authentification des personnes… moins on va accepter les pseudonymes et plus on va garantir l’authenticité de la personne qui l’exprime. » Cette vision technique (soutenue par M. Arunda, qui évoque la vérification par scan de l’iris) doit s’accompagner d’une transformation des médias, dont le rôle fondamental doit devenir l’authentification de l’information et l’approfondissement de l’analyse, plutôt que la recherche du scoop immédiat.

Enfin, la solution est éminemment humaine et civique. Mustapha Zaouini (Président, AI in Africa) a soulevé le défi psychologique que représente le concept de fake people et a appelé à former les jeunes. M. Nikolić et M. Goodstein ont conclu en insistant sur la responsabilité collective : les institutions doivent réglementer malgré les pressions, mais surtout, les citoyens doivent exercer leur « devoir civique » et apprendre à « dénoncer et mettre fin à [la désinformation] » car aucune IA ne pourra remplacer l’intelligence émotionnelle et l’esprit critique de l’être humain.

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