Afrique: Le Forum sur la résilience en Afrique s'ouvre dans un contexte de fragilité croissante sur le continent

La sixième édition du Forum sur la résilience en Afrique, organisée par la Banque africaine de développement, s’est ouverte, mardi à Abidjan, sur un appel aux institutions financières internationales pour qu’elles augmentent le financement de la paix dans des contextes fragiles et qu’elles s’associent pour prévenir les conflits sur le continent, alors que l’aide publique au développement est en diminution.
La conférence biennale se déroule à un moment où le continent est confronté à une augmentation des conflits et à des contextes fragiles résultant de déplacements de population et d’autres causes.
« Il n’y a pas de paix sans développement et pas de développement sans paix », a déclaré le président du Groupe de la Banque africaine de développement, Sidi Ould Tah, dans son allocution d’ouverture, prononcée en son nom par la première vice-présidente de l’insitution, Marie-Laure Akin-Olugbade.
M. Ould Tah a décrit le thème du Forum de cette année, « Prévenir pour mieux agir : financer la paix dans un contexte de coopération au développement en transition », comme « approprié, nécessitant des solutions intégrées qui combinent les cadres de paix, de sécurité, de développement et de résilience ».
« Nous devons nous assurer que nos investissements tiennent compte de la fragilité et des conflits, et qu’ils contribuent de façon intentionnelle au renforcement de la paix et à la prospérité », a-t-il souligné.
Yero Baldeh, directeur du Bureau de coordination des États en transition à la Banque africaine de développement, a souhaité la bienvenue aux participants au Forum, soulignant qu’il se déroulait à un moment charnière pour le continent.
« Partout en Afrique, le paysage de la fragilité évolue et se nourrit des chocs climatiques, des pressions économiques, des évolutions démographiques et des incertitudes géopolitiques, mais cette complexité contient une immense opportunité : imaginer un financement de la paix qui devrait être considéré non pas comme une mesure réactive, mais comme un investissement proactif dans la prévention », a noté M. Baldeh.
La Banque africaine de développement réagit face à la recrudescence des conflits et des contextes fragiles en Afrique
L’Afrique a connu une recrudescence des conflits sur le continent, avec plus de 30 000 événements en 2024. Environ 250 millions d’Africains vivent dans des zones fragiles et touchées par des conflits, tandis que plus de 44 millions ont été déplacés et qu’un sur cinq est confronté à l’insécurité alimentaire, selon le Bureau de coordination des États en transition.
Ces pays sont confrontés à un lourd fardeau de la dette et à une baisse de l’aide au développement, qui devrait diminuer de 17 % en 2025, alors que la demande est critique.
Mme Akin-Olugbade a déclaré que le Groupe de la Banque, par le biais de la Facilité d’appui à la transition du Fonds africain de développement, était le pionnier d’un changement fondamental lorsqu’il a introduit l’enveloppe de prévention pour financer des opérations s’attaquant aux facteurs de fragilité avant que la crise ne s’aggrave.
« Nous continuons à faire preuve de leadership dans le financement de la prévention, avec un total des allocations pour la prévention des interventions qui s’est accru de 35 % entre 2023 et 2025 », a précisé Mme Akin-Olugbade.
Elle a indiqué que ces investissements avaient porté leurs fruits de manière significative, avec des preuves de réussite dans de multiples contextes en Afrique dûment documentées.
« Les données montrent que chaque dollar investi dans des programmes de prévention fondés sur des données probantes permet d’économiser jusqu’à 16 dollars à long terme », a souligné Mme Akin-Olugbade.
La première vice-présidente du Groupe de la Banque a salué les 248 membres du personnel qui sont actuellement en poste dans des pays fragiles ainsi que l’institution pour le maintien de ses opérations face aux défis.
Lors d’une table ronde qui a ouvert le Forum de trois jours, Mme Akin-Olugbade a partagé la scène avec Kenyeh Barlay, ministre de la Planification et du Développement économique de la Sierra Leone, Amina Mohamed, membre du Conseil d’administration d’Interpeace, et Elizabeth Spehar, secrétaire générale adjointe des Nations unies pour l’appui à la consolidation de la paix.
Les panélistes ont discuté du rôle des gouvernements, des institutions financières internationales et des partenaires du développement en tant qu’agents de la paix. Ils ont souligné la nécessité d’accroître les investissements et les partenariats afin de veiller à prévenir les situations de conflit ou à les transformer.
Donnant des exemples de décisions politiques cruciales pour gérer la fragilité et prévenir les conflits en Sierra Leone, M. Barlay a fait remarquer que les solutions n’étaient pas « universelles » et que les efforts de paix devaient être soutenus. « Le maintien de la paix n’est pas un effort ponctuel. La fragilité n’est pas seulement un héritage du passé, mais un risque du présent », a souligné M. Barlay.
Pour sa part, Mme Mohamed a évoqué le pouvoir de la diplomatie soutenue par les finances : « La diplomatie crée des points d’entrée ; le financement soutient les résultats. Sans un engagement de ressources, les efforts de paix s’essoufflent ou échouent. »
Mme Spehar a souligné le rôle de la Commission de consolidation de la paix des Nations unies en tant qu’instrument important de prévention des conflits en Afrique. « Nous avons l’engagement politique et l’appel aux institutions financières internationales pour qu’elles jouent un rôle plus important au sein de la Commission de consolidation de la paix des Nations unies. La volonté politique et l’engagement sont essentiels », a déclaré Mme Spehar.
Les panélistes se sont accordés sur l’un des principaux objectifs du Forum : changer la perception selon laquelle les contextes fragiles sont trop risqués pour y investir.
« Les contextes fragiles ne sont pas intrinsèquement non bancables », a conclu Mme Mohamed.
Le Forum sur la résilience en Afrique (ARF) se tient du 1er au 3 octobre 2025. Il réunit les principales parties prenantes de l’ensemble du Nexus humanitaire-développement-paix afin d’explorer des stratégies visant à intensifier les efforts de prévention et à stimuler les investissements positifs pour la paix dans l’ensemble de l’Afrique.
Cliquez sur ce lien pour en apprendre davantage sur l’ARF 2025 et suivre les débats en ligne.

