Afrique: Des collectifs à Johannesburg mobilisés pour une «ville en déclin depuis longtemps»

La plus grande ville d’Afrique du Sud accueille le sommet des chefs d’État du G20 les 22 et 23 novembre 2025. L’occasion de se faire une beauté, avec des opérations de nettoyage et d’embellissement.

Sauf qu’il est difficile pour Johannesburg de cacher, en quelques jours, tous ses défauts : coupures d’eau, nids de poule, insécurité, bâtiments du centre-ville squattés. Le Wall Street Journal décrit même d’une ville qui aurait « abandonné », baissé les bras. Mais ses habitants, eux, ne sont pas de cet avis, et plusieurs initiatives ont vu le jour, pour créer des alliances entre entreprises, citoyens, société civile, et pouvoirs politiques.

D’un pas vif, Wayne Dawson remonte les rues du centre-ville, évitant de justesse un énorme trou dans la chaussée. « Comme vous le voyez, la municipalité a désespérément besoin d’argent pour réparer des choses comme ça, souligne-t-il. Et puis, est-ce que vous avez vu une seule poubelle sur notre chemin ? Ça manque aussi ».


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Wayne fait partie des coordinateurs du mouvement « Jozi My Jozi ». Campagnes de nettoyage, rénovation du mobilier urbain, nouveaux projets pour des immeubles laissés vacants : les actions se multiplient dans le cadre de ce partenariat entre différentes entreprises et le gouvernement local. « Notre rêve, c’est que cette ville vive 24h sur 24, poursuit Wayne. Là-bas, vous voyez, nous avons installé tous ces lampadaires solaires. Mais « Jozi My Jozi » ne veut pas remplacer le rôle du secteur public. Nous tendons la main, pour tenter d’accélérer la revitalisation du centre-ville ».

« Nous mettons la pression sur les pouvoirs publics pour qu’ils passent à l’action »

Et du côté de la société civile, on s’organise aussi, pour exiger des comptes lorsque les politiques publiques ne sont pas au rendez-vous.

Ferrial Adams fait partie de la Joburg Crisis Alliance, une coalition d’organisations qui dénoncent les dysfonctionnements. « C’est notamment grâce à cette alliance que nous avons obtenu la réouverture de la principale bibliothèque, assure-t-elle. Nous mettons la pression sur les pouvoirs publics pour qu’ils passent à l’action. Et nous avons vu des changements, ces deux dernières années, puisqu’ils sont obligés de montrer des résultats ».

Tous espèrent que les efforts déployés pour le G20 ne seront pas sans lendemain et reflètent une profonde volonté de changement pour la ville.

«Johannesburg est menacée de devenir une ville en faillite» « Jozi », comme elle est surnommée, a accumulé les problèmes de gouvernance au cours des années. La municipalité a aussi connu des coalitions politiques instables, avec une dizaine de maires différents en moins de 10 ans.

« La ville de Johannesburg est en déclin depuis longtemps, affirme William Gumede, professeur à l’université de Wits. Elle est même aujourd’hui menacée de devenir une ville en faillite. Tout le centre s’est complètement délabré et de nombreuses entreprises ont déménagé en périphérie. Même des services gouvernementaux ont quitté le coeur de la ville ».

Le chercheur décrypte : « Les raisons sont multiples, mais c’est d’abord à cause de la corruption : les élus de l’ANC [le Congrès national africain, parti historique de la lutte contre l’apartheid et au pouvoir depuis 1994, NDLR] étaient souvent des personnes peu compétentes, nommées par le parti pour des raisons politiques plutôt que pour leurs capacités. Et cela ne concerne pas seulement les élus, mais aussi l’administration publique, avec des responsables nommés sur la base de leur loyauté au parti. »

Il poursuit : « Ensuite, Johannesburg est une métropole gigantesque, avec un énorme budget pour les marchés publics. Une grande partie des services est donc sous-traitée via des contrats. Or l’ANC a pris le contrôle de ce système de marchés publics, et bien souvent, les entreprises choisies n’avaient ni les compétences nécessaires ni les capacités d’exécution. Voilà, c’est tout cela qui se joue, aujourd’hui, à Johannesburg. »

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