Afrique de l'Ouest: Bénin – De porte d'entrée régionale à leader du développement

Alors que l’attention économique en Afrique de l’Ouest est souvent orientée vers les économies plus importantes, le Bénin émerge et s’avère comme l’une des économies les plus prospères de la région, grâce à la modernisation agricole et à l’innovation numérique.
Le Bénin a toujours été le secret le mieux gardé de l’Afrique de l’Ouest. Coincé entre deux géants économiques de la région : le Nigeria et le Ghana, ce pays de 13,7 millions d’habitants a longtemps servi de corridor commercial vital vers les pays voisins enclavés. Le Bénin se transforme, pour passer d’un simple passage à une destination privilégiée.
Avec un produit intérieur brut (PIB) de 7,5% en 2024, contre 6,4% en 2023, le Bénin figure parmi les trois économies africaines à la plus forte croissance. L’inflation s’est établie à 1,2 % malgré les pressions mondiales. Le déficit budgétaire est à 3 % du PIB en 2024. Le Bénin s’aligne aux critères de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) pour la première fois en cinq ans.
La révolution agricole
Le succès du Bénin commence dans un endroit inattendu : les champs de coton dont les productions sont désormais transformées sur place en vêtement, générant des revenus d’exportation substantiels pour le pays.
Les rendements agricoles se sont accrus, grâce à l’accès des producteurs aux intrants. Le pays a presque doublé sa production de riz qui est passée de 406 000 tonnes en 2020 à 712 000 tonnes en 2023, dépassant les ambitieux objectifs initiaux. La production de maïs a grimpé à 1,7 million de tonnes. La transformation d’anacarde a plus que doublé, passant de 19 % à 40,26 % de la production nationale, dynamisée par la Zone économique spéciale de Glo-Djigbé, située dans la commune d’Abomey-Calavi.
Les projets d’infrastructures agricoles mis en place ont permis de stimuler les agriculteurs. Le Projet d’appui aux infrastructures agricoles de la vallée de l’Ouémé, financé pour 63,63 millions d’euros par la Banque africaine de développement, a permis de soutenir 21 000 agriculteurs dans 14 localités, ce qui a permis d’accroître la production de cultures vivrières de 70 100 tonnes à 90 300 tonnes à l’achèvement du projet.
L’infrastructure qui se rentabilise
La position stratégique du Bénin a rendu le développement des infrastructures à la fois nécessaire et rentable. La Zone économique spéciale de Glo-Djigbé qui accueille aujourd’hui 31 industries doit attirer jusqu’à 1,4 milliard de dollars d’investissement dans sa première phase. Elle a déjà permis de créer 6 714 emplois et a commencé à exporter ses premiers vêtements « Made in Benin » pour des marques internationales comme U.S. Polo Assn.
L’approche est stratégique plutôt que dispersée. Les projets routiers relient les zones rurales – zones de production- aux marchés et permettent aux agriculteurs de vendre leurs produits à de meilleurs prix. La modernisation du port de Cotonou facilite le commerce régional. Le développement de l’infrastructure énergétique a amélioré l’accès à l’électricité de 36,5 % en 2020 à près de 40 % en 2023, soutenant à la fois les besoins des ménages et des entreprises.
Ces projets fonctionnent parce qu’ils sont conçus pour générer des retours économiques, pas seulement pour fournir des services. Quand l’infrastructure se rentabilise grâce à l’augmentation de l’activité économique, elle devient durable plutôt qu’un fardeau.
Croissance verte et adaptation climatique
Les émissions d’obligations durables ont élargi le programme de cantine scolaire à 1,2 million d’enfants. Elles ont permis de curer et entretenir 2,55 millions de kilomètres de linéaires d’ouvrages d’assainissement primaires et secondaires, et ont desservi en eau potable 43 356 personnes, tandis que les programmes d’agriculture climato-intelligente aident les agriculteurs à s’adapter aux conditions changeantes.
L’adaptation climatique a des avantages pratiques pour les agriculteurs. Des projets ciblés ont fourni des semences résistantes à la sécheresse et des systèmes d’irrigation améliorés, résultant en une meilleure résilience des cultures et la préservation des terres arables. Ces initiatives démontrent la manière dont les pays peuvent aborder le changement climatique tout en construisant la croissance économique.
Un financement innovant et des partenariats stratégiques
Le portefeuille de 1,3 milliard de dollars américains de la Banque africaine de développement soutient dix-sept opérations à travers le Bénin. La Banque a apporté un financement catalytique sous forme d’une garantie partielle de crédit de 200 millions de dollars, qui a débloqué 350 millions d’euro (environ 406 millions de dollars américains) de financements privés, affectés aux projets liés aux Objectifs de développement durable (ODD). Cette sophistication financière compte. Quand les pays peuvent tirer parti du financement du développement pour accéder à des sources de financement plus larges, ils multiplient leur capacité d’investissement tout en renforçant la capacité du secteur financier national.
Cette approche stratégique fonctionne parce qu’elle est complète sans être dispersée. La modernisation agricole, soutenue par la transformation des matières premières en produit fini, accélère la création de valeur ajoutée tout en protégeant les actifs à long terme. L’investissement dans les infrastructures attire le capital privé.
Un modèle de porte d’entrée
La trajectoire du Bénin offre des perspectives à d’autres pays africains. L’approche réussit parce qu’elle s’appuie sur les avantages comparatifs tout en créant de nouvelles sources de compétitivité. La modernisation agricole tire parti des ressources naturelles. L’investissement en infrastructures capitalise sur la position géographique. Le développement industriel ajoute de la valeur à la production existante.
Alors que le Bénin continue à travailler pour l’atteinte des objectifs de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, son expérience démontre la manière dont les pays peuvent tirer parti des avantages géographiques tout en créant de nouvelles sources d’avantages concurrentiels.
Cette analyse est basée sur les conclusions du Rapport pays 2025 de la Banque africaine de développement intitulé : Bénin, mettre en évidence les réalisations du pays dans l’exploitation du capital humain, naturel et financier pour un développement transformateur.