Afrique Centrale: Marché commun – Quitte ou double pour la Cameroun à la CEEAC

Suite à une session de la communauté tenue les 5, 6 et 7 septembre dernier à Malabo en Guinée Equatoriale, un rapport de sélection a été présenté aux États désignant les candidats du Cameroun comme aptes à diriger trois départements, mais il faut un outil d’aide à la décision.
Un rapport de sélection établi par le cabinet Forvis Mazars a été présenté aux États après la session de négociations de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) tenue les 5, 6 et 7 septembre derniers à Malabo. Les candidats du Cameroun sont désignés comme aptes à diriger trois départements. Mais, Yaoundé se trouve face à un double dilemme : opter pour le Marché commun et des Affaires économiques ou pour la Promotion du Genre, tout en faisant face à une requête en annulation du processus de recrutement. Un plaidoyer stratégique peut s’appuyer sur l’argumentaire du Centre africain de veille et d’intelligence économique (CAVIE – Cameroun) afin d’éclairer la prise de décision devant ce choix critique, tant pour Yaoundé que pour l’organisation sous-régionale.
Les résultats « exceptionnels » obtenus par les candidats camerounais lors des tests de sélection pour les postes de commissaires de la CEEAC ne sont pas seulement une victoire pour le Cameroun ; ils représentent un moment décisif qui requiert un choix lucide et stratégique.
Enjeu stratégique et double défi
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Alors que le Cameroun s’est brillamment illustré en décrochant la première place dans les catégories du marché commun et du genre, ainsi qu’une troisième place dans le domaine de la paix et de la sécurité, les autorités camerounaises font face à une décision capitale. Au milieu des pressions et des jeux d’influence diplomatiques, le pays doit s’élever au-dessus des considérations politiques éphémères pour saisir l’opportunité la plus alignée avec ses intérêts à long terme et ceux de l’intégration régionale.
Dans l’éventail des postes convoités, celui de commissaire au Marché commun, aux Affaires monétaires et financières est sans conteste le plus stratégique. La mission première de la CEEAC étant d’assurer l’intégration économique et de faciliter la libre circulation des biens, des services et des personnes. Le commissaire en charge du Marché commun est l’architecte de cette vision, le chef d’orchestre de la prospérité régionale.
Cependant, la candidature de Dr. Jacob Kotcho, arrivée en tête, fait l’objet d’un recours administratif contentieux déposé le 9 septembre 2025 par un candidat gabonais, M. Joël Nkegna. Ce recours vise l’annulation du processus de recrutement en invoquant plusieurs violations graves des procédures. Le plaignant dénonce une « violation du principe de transparence », une « violation du principe d’égalité de traitement » et un « détournement de procédure et violation des critères statutaires ». Le document fait notamment état d’une possible « falsification éhontée des critères d’éligibilité », affirmant que le candidat classé premier a un diplôme en anthropologie, une discipline non requise, et ne justifie pas des dix ans d’expérience exigés. Le recours soulève également un « conflit d’intérêts avéré » entre le cabinet de recrutement Forvis Mazars (Cameroun) et le candidat M. Jacob Kotcho.
Pour le Cameroun, ce poste représente une convergence parfaite avec sa propre feuille de route nationale. La Stratégie nationale de Développement 2020-2030 (SND30) et la Vision 2035 ont pour objectif clair de faire du pays un acteur économique majeur en Afrique centrale, un pôle d’industrialisation et un hub commercial. En plaçant un de ses fils à la tête du Marché commun de la CEEAC, le Cameroun peut non seulement défendre ses intérêts, mais également influencer la mise en place de politiques régionales harmonisées qui soutiennent l’émergence de ses champions nationaux et l’attraction d’investissements directs étrangers.
Leadership visionnaire face à l’épreuve
L’argument en faveur du poste de commissaire au marché commun va bien au-delà de la simple défense des intérêts nationaux. C’est un acte de leadership visionnaire pour l’ensemble de la sous-région. Une intégration économique réussie est la meilleure garantie de stabilité et de prospérité. Tandis que les autres postes, tels que ceux liés à la paix et à la sécurité ou au développement humain, sont indispensables, ils traitent souvent des conséquences de dysfonctionnements structurels. Le Marché commun, lui, s’attaque aux causes profondes en créant un tissu économique solide et des interdépendances mutuellement bénéfiques entre les États membres.
Ignorer cette priorité stratégique en faveur d’un autre poste, aussi important soit-il, serait une erreur tactique majeure. Les pressions externes ou les dynamiques diplomatiques doivent être subordonnées à une analyse rigoureuse des retombées à long terme. Le Cameroun a l’opportunité de s’imposer non seulement comme un gagnant individuel des tests, mais comme un moteur de l’intégration régionale. Pour ce faire, il doit absolument relever le défi de la requête en annulation et garantir que le processus de sélection respecte les principes de bonne gouvernance et d’équité.
En définitive, le Cameroun doit faire le choix qui reflète son ambition et sa place légitime dans la région. C’est l’occasion de montrer que l’expertise nationale est au service d’un projet régional ambitieux. C’est le moment de prouver que l’intégration économique, menée par les meilleurs, peut transformer les vies et consolider la paix, en naviguant avec intelligence et détermination le double défi du choix stratégique et de la légitimité juridique.