À Abidjan, la peintre franco-ivoirienne Claudie Titty Dimbeng expose sa «Métamorphose»

À Abidjan, la galerie LouiSimone Guirandou expose l’artiste peintre franco-ivoirienne Claudie Titty Dimbeng jusqu’au 17 janvier 2026. Ce solo show, intitulé « Métamorphose », est inspiré du Vohou-vohou, un mouvement artistique majeur né en Côte d’Ivoire dans les années 1970.
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Avec notre correspondante à Abidjan, Marine Jeannin
L’exposition « Métamorphose » est composée de quelques autoportraits photographiques, mais surtout de toiles monumentales abstraites, aux couleurs vives. Une série de 13 tableaux représente un parcours initiatique jusqu’à la figure finale de la Comian, la garante de l’éthique et de la spiritualité dans la tradition akan. L’ensemble a été peint entre juillet et août dernier au cours d’une résidence artistique à l’Insaac, l’école d’art de référence à Abidjan.
« L’Insaac, c’est le lieu de mon enfance, raconte Claudie Titty Dimbeng. C’est aussi le lieu de naissance du Vohou-vohou, qui est l’une des inspirations de ma technique de peinture, le Mixed Art Relief, qui reprend les matériaux du Vohou-vohou, qui sont notamment le raphia et le tapa. Je tire mon inspiration du Vohou-vohou d’abord parce que je suis ivoirienne et ensuite parce qu’il n’y a pas de création ex nihilo, il faut partir d’une base », explique l’artiste.
Le mouvement Vohou-vohou, source principale d’inspiration
« Ça a été comme une évidence pour moi de partir du Vohou-vohou, poursuit-elle, parce que c’est un mouvement qui m’inspire sur le plan spirituel, sur le principe d’utiliser des matériaux locaux et propres à sa culture. J’aime aussi la texture, la matérialité, la physicalité que ça apporte à mon travail et à une œuvre. C’est le lien avec les ancêtres, la nature, le vivant, le côté organique, l’envie de toucher… C’est un toucher visuel. Et c’est ça qui m’intéresse. »
En 2014 déjà, Claudie Titty Dimbeng avait exposé à Paris avec deux maîtres du Vohou-vohou, Kra N’guessan et Youssouf Bath. Ce dernier est justement venu assister au vernissage. Il se remémore avec nostalgie la naissance du mouvement en 1972. « On prenait tout. On ramassait les feuilles, les racines, les écorces parce qu’on n’avait pas l’argent pour acheter le matériel. Il y avait une crise du café-cacao donc l’État ne nous donnait plus de quoi acheter du matériel. Donc, notre professeur [le peintre martiniquais Serge Hélénon] nous a dit : “Allez dans la nature, prenez tout ce que vous voulez et revenez travailler dans l’atelier”. Il nous disait de travailler avec les matériaux locaux. Certains ont amélioré la technique, mais l’idée générale est restée : la récupération ainsi que donner une autre dimension aux matériaux que nous avons en Afrique. »
Des expositions inspirées du Vohou-vohou
Plusieurs autres galeries ont présenté cette année des collections inspirées du Vohou-vohou. Signe de l’éternelle vitalité de ce mouvement fondateur, que Mathilde Moreau, artiste peintre et directrice honoraire des Beaux-Arts, préfère qualifier plus largement d’« école d’Abidjan ».
« Le Vohou-vohou fait partie du mouvement global de la peinture abstraite. C’est le dénominateur commun de tous les peintres ivoiriens. C’est parti de l’école des Beaux-Arts d’Abidjan. Donc forcément, il va y avoir des traces. Il va y avoir des enseignants et il va y avoir des maîtres. Les étudiants qui viennent s’inspirent toujours de ceux qui étaient là avant eux. Et au fil du temps, ça s’installe, ça évolue », explique-t-elle.
« Quand on regarde le travail d’Aboudia, il y a toujours un apport : des collages, des choses qu’il ajoute à ses toiles… Quand on regarde le travail de [Saint-Etienne] Yeanzi ou de Sess Essoh, de Serge Gossé… C’est toujours cette école d’Abidjan. Il y a plein de jeunes comme ça. Dernièrement, il y a un jeune, Bressy Mimy, qui expose à la galerie Houkami Guyzagn. Il travaille avec du papier mâché. C’est toujours de la récupération. Ce mouvement n’est pas passé inaperçu. Aujourd’hui, je pense que ça fait partie du patrimoine des Ivoiriens », termine Claudie Titty Dimbeng.



