Centrafrique: quand l’humour et le rire deviennent une thérapie

L’humour, un métier qui attire les jeunes en République Centrafricaine. Ils sont nombreux à se lancer dans le stand-up et le théâtre, ces dernières années, des créations qu’ils publient ensuite sur les réseaux sociaux. Leurs prestations permettent aux Centrafricains de prendre du recul sur leur quotidien parfois difficile. Après des décennies de crise, l’humour et le rire sont devenus une thérapie et une source de motivation pour de nombreux jeunes Centrafricains.
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Avec notre correspondant à Bangui, Rolf Stève Domia-Leu
Ce soir, la salle de spectacle de « Wassa » est pleine à craquer. Dès les premières phrases de l’humoriste Blessing Diaba, les rires fusent et le public est conquis : il a concocté une histoire mêlant le passé et le présent, pour évoquer la guerre et souligner l’importance de la paix. Cela fait neuf ans qu’il tient le public en haleine.
Même en interview, il ne peut s’empêcher de faire des blagues : « Je suis un grand immature et fier de l’être. Tout le monde sait que les gens qui travaillent dans les sociétés et administrations sont souvent stressés. Ils ont besoin de se déstresser et, du coup, ils ont besoin de rire. Et c’est notre job. Cela peut permettre aussi à quelqu’un qui est fâché de quitter le corps de « fâchement » pour tomber dans le corps de « rirement ». Mes thèmes sont axés sur la jeunesse, le milieu administratif, les foyers… Je parle de la mentalité africaine et même des mentalités d’ailleurs. Je parle de ce qui ne marche pas dans la société avec un brin d’humour pour propager des ondes positives autour de moi. »
Dans un tourbillon de rire et d’émotion, les comédiens se succèdent sur scène. Noël Bakoulou, alias Gbabistar, a choisi d’être humoriste pour des raisons précises : « Parce que c’est grâce au théâtre qu’on peut soigner certaines personnes qui ont des plaies internes. Récemment dans notre pays, nous avons connu une crise militaro-politique. C’est grâce au théâtre, à travers différentes sensibilisations, dans différents arrondissements, que la paix commence progressivement à revenir dans le pays. »
Assis au premier rang de la salle, Smith Bocambo pleure littéralement de rire : « Cela m’arrive souvent. Quand je ne me sens pas bien, je change de milieu, pour trouver un peu d’humour, comme aujourd’hui. Le fait de rire me remonte le moral. Peu importe le degré de mon problème, lorsque je suis dans une salle d’humour, je suis à l’aise. Cela me fait échapper aux stress, aux ennuis… C’est vraiment beau à voir. »
Après le public centrafricain, reste à conquérir d’autres scènes et pour cela, ces humoristes collaborent de plus en plus avec des comédiens d’autres pays et s’invitent dans des festivals internationaux.
La fragilité du théâtre centrafricain
Malgré cette note positive, le théâtre centrafricain est toujours fragilisé par des problèmes d’ordre organisationnel, structurel et même financier. Le président de la Fédération centrafricaine de théâtre, Raïzou Nazir Eliakim, lance un appel.
Il nous faut des moyens pour que le théâtre classique soit pris en compte. À l’endroit du gouvernement, nous leur demandons beaucoup plus de nous venir en aide. Quand on demande un soutien pour représenter le théâtre centrafricain ou pour une création quelconque, il faut vraiment que le gouvernement nous soutienne, nous apporte son aide financière, matérielle ou autre, pour que l’on puisse représenter valablement le pays. La Fédération a sa porte ouverte pour accueillir tous ceux qui veulent soutenir le théâtre centrafricain, afin que ce théâtre-là puisse reprendre son apogée, à l’international.
Raïzou Nazir Eliakim, président de la Fédération centrafricaine de théâtre