Sectes meurtrières en Afrique : la tragédie de Kwa Binzaro ravive le traumatisme de Shakahola

Crânes humains au Centre mémorial du génocide de Nyamata.
Crânes humains au Centre mémorial du génocide de Nyamata.

Les autorités kényanes ont exhumé cinq corps dans le village de Kwa Binzaro, dans le comté côtier de Kilifi. Ce nouveau drame, encore en pleine investigation, semble lié à une affaire de secte. Les enquêteurs ont découvert des restes humains dispersés et identifié 27 tombes présumées, dont six ont déjà été ouvertes. Le médecin légiste gouvernemental, Richard Njoroge, a confirmé la découverte de « cinq corps dans six tombes exhumées » ainsi que « dix parties de corps distinctes à la surface ».

Des fidèles, dont beaucoup d’enfants, retrouvés morts

Pour de nombreux Kényans, ces fouilles ravivent un souvenir encore douloureux : celui de la tragédie de Shakahola, en 2023. À l’époque, plus de 400 corps avaient été retrouvés dans une forêt proche, la plupart enterrés dans des fosses communes. Tous étaient liés à une secte dirigée par le pasteur Paul Nthenge Mackenzie, fondateur de l’Église internationale de la Bonne Nouvelle. Ses fidèles, souvent affamés volontairement dans l’espoir d’accéder au paradis, avaient été retrouvés morts, beaucoup d’enfants parmi eux.

Deux ans plus tard, l’ombre de Mackenzie plane encore sur les esprits. Et cette nouvelle découverte dans le même comté (Kilifi), cinq corps exhumés dans le village de Kwa Binzaro, soulève une question préoccupante : les sectes meurtrières continuent-elles de proliférer en Afrique de l’Est malgré les scandales précédents ?

Le phénomène des sectes en Afrique : un mal enraciné

Le Kenya n’est malheureusement pas un cas isolé. À travers le continent africain, des groupes religieux extrémistes ou pseudo-religieux exploitent la misère, l’ignorance ou la vulnérabilité de leurs fidèles. Ces sectes se développent dans un contexte de pauvreté, de défiance envers les institutions et de vide spirituel. Elles promettent le salut, des miracles, la guérison ou même la richesse… en échange d’une obéissance totale.

L’affaire Shakahola n’était que la partie visible de l’iceberg. En Ouganda, en 2000, plus de 700 personnes avaient péri dans un incendie provoqué par les dirigeants du Movement for the Restoration of the Ten Commandments of God. La secte avait annoncé la fin du monde et demandé à ses membres de jeûner et de vendre leurs biens. Lorsque la prophétie ne s’est pas réalisée, les dirigeants ont verrouillé les fidèles dans une église et y ont mis le feu.

Un phénomène qui persiste

Au Nigeria, le phénomène prend une tournure différente mais tout aussi inquiétante. Des pasteurs autoproclamés, souvent issus de mouvements pentecôtistes indépendants, se livrent à des pratiques de possession, d’exorcisme, voire de violences physiques sur leurs membres, notamment les enfants accusés de sorcellerie. Après le drame de Shakahola, le gouvernement kényan avait promis un durcissement des lois encadrant les organisations religieuses.

Le Président William Ruto avait qualifié Mackenzie de « terroriste », et une commission d’enquête parlementaire avait été mise en place. Mais deux ans plus tard, la découverte à Kwa Binzaro montre que le phénomène persiste. L’appel lancé aux familles de disparus pour des prélèvements ADN à l’hôpital de Malindi montre une volonté de retrouver les identités des victimes. Mais le mal semble plus profond.

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