RDC : Moïse Katumbi en croisade contre le pouvoir de Tshisekedi et les dérives du gouvernement


Moïse Katumbi et son parti, Ensemble pour la République, intensifient leur opposition au régime de Félix Tshisekedi. Entre critiques virulentes, dénonciation des priorités budgétaires et préparation active des échéances électorales, l’opposant exilé veut fédérer une large contestation politique et citoyenne.
Réuni à Bruxelles les 12 et 13 août 2025, le parti Ensemble pour la République, fondé par Moïse Katumbi en 2019, a tenu un conclave stratégique en vue des prochaines élections générales prévues en 2028. Loin d’être une simple réunion partisane, l’événement a marqué une radicalisation du discours du parti face au gouvernement de Félix Tshisekedi.
Craintes d’un glissement autoritaire
Le mouvement a adopté une ligne résolument offensive : il dénonce un pouvoir qui chercherait à s’accrocher aux commandes du pays à travers une éventuelle modification de la Constitution. Pour Ensemble, « le respect des délais du mandat présidentiel est une exigence absolue ». Ce soupçon d’une volonté de prolongation illimitée du mandat présidentiel, sans base légale, alimente les craintes d’un glissement autoritaire.
Moïse Katumbi et ses alliés accusent également le Président de saboter toute tentative de dialogue national. Ils critiquent le refus du pouvoir d’adhérer à l’initiative de médiation lancée par la Cenco et l’ECC, la qualifiant de « manœuvre dilatoire ». Face à ce qu’il considère comme une dérive institutionnelle, Ensemble pour la République a annoncé la création d’un mécanisme d’alerte citoyenne pour dénoncer toute atteinte aux libertés publiques et violations des droits.
Un plan d’action pour contrer le pouvoir
Ce dispositif juridique et politique vise à documenter, médiatiser et contester les abus présumés du régime. Sur le plan politique, le parti entend relancer sa dynamique militante : extension dans les territoires, renforcement des structures locales, mobilisation de la diaspora et alliances avec d’autres forces démocratiques. Katumbi appelle à « fédérer les énergies de la société civile, des mouvements citoyens et des partis d’opposition » pour instaurer un pouvoir légitime issu d’élections crédibles.
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Au-delà de la politique institutionnelle, Moïse Katumbi a également attaqué de front une décision économique du gouvernement qui a fortement choqué l’opinion publique : le projet de sponsoring de plusieurs clubs de football européens pour un montant estimé à 43 millions de dollars. Dans une lettre ouverte adressée à Félix Tshisekedi, rendue publique mi-juillet, l’ancien gouverneur du Katanga a dénoncé une dépense « absurde et moralement inacceptable » dans un pays où près de 70% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Selon lui, « l’urgence en RDC est humanitaire, pas médiatique ».
Le paradoxe du foot : millions pour l’Europe, misère pour le local
Katumbi souligne que ce projet illustre un décalage criant entre les priorités du pouvoir et les besoins réels de la population. Il y voit une politique du « paraître international » déconnectée des souffrances sociales. L’homme politique compare cette démarche à « un père qui nourrit les enfants des autres pendant que les siens meurent de faim ». La critique de Katumbi ne s’arrête pas à la morale : elle touche aussi au pragmatisme. Président du TP Mazembe, club congolais plusieurs fois champion d’Afrique, il connaît les difficultés structurelles du sport congolais.
Il rappelle que le championnat national est à l’arrêt, faute de moyens, un budget pourtant estimé à seulement 600 000 dollars. Pendant que des clubs locaux comme Sanga Balende peinent à organiser leurs déplacements, le gouvernement envisage de financer le football européen. « Le talent congolais brille à l’étranger, mais chez nous, il est abandonné », déplore Katumbi. Il y voit un « complexe d’infériorité érigé en politique d’État », et une démonstration de l’absence de vision nationale pour le développement du sport local, pourtant vecteur potentiel de cohésion sociale, d’éducation et de croissance économique.
Une polémique qui mobilise la société civile
La controverse autour du sponsoring ne s’est pas limitée aux cercles politiques. Plusieurs ONG, journalistes, économistes et militants ont exprimé leur incompréhension et leur indignation. L’absence de transparence, tant sur les bénéficiaires que sur le montage budgétaire, alimente la méfiance. Ce n’est pas la première fois qu’une telle dépense provoque un tollé : en juin 2025, un contrat similaire avec l’AS Monaco pour 4,8 millions d’euros avait déjà déclenché une vague de protestations.
Si les autorités défendent une stratégie de soft power inspirée du Rwanda, visant à promouvoir le tourisme national à travers le sport, cette justification peine à convaincre dans un contexte d’extrême pauvreté, d’infrastructures délabrées et de services publics sous-financés. L’offensive de Moïse Katumbi s’inscrit dans une volonté de se repositionner comme l’un des principaux leaders de l’opposition en RDC.
Vers une recomposition de l’opposition ?
Refusant de participer au gouvernement, il mise sur une critique frontale et sur la mobilisation populaire pour construire une alternative crédible. En pleine recomposition politique post-électorale, et face à un pouvoir qui concentre de plus en plus de critiques, la démarche de Katumbi pourrait séduire une frange croissante de la population en quête de changement.