Présidentielle au Cameroun: Maurice Kamto écarté, quelle stratégie pour l'opposition?

Le Conseil constitutionnel a confirmé, mardi 5 août, l’invalidation de la candidature de Maurice Kamto à la présidentielle du 12 octobre. Le leader du MRC, arrivé deuxième en 2018, ne pourra donc pas affronter Paul Biya, candidat à un huitième mandat. Cette décision, qui clôt le contentieux pré-électoral après l’examen de 36 recours, entérine celle d’Elecam, l’autorité électorale, qui avait déjà rejeté son dossier fin juillet. Au lendemain de cette décision, le sujet est dans tous les esprits.

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Dans les médias, sur les plateaux de télévision, dans les débats en ligne ou au sein de l’opinion publique, l’heure est désormais au décryptage au Cameroun, rapporte notre correspondant à Yaoundé, Polycarpe Essomba. D’aucuns pointent du doigt, à la charge de l’ancien candidat du Manidem, le lourd prix à payer du boycott des élections locales de 2020, une décision qui a compromis la capacité du MRC, dont il était le président, à l’investir comme candidat.

D’autres, en revanche, estiment que, quelle que soit la forme qu’aurait prise l’investiture de Maurice Kamto, et même si le MRC avait pu disposer des élus, le pouvoir aurait trouvé un autre motif pour le disqualifier. Pour les tenants de cette opinion : Maurice Kamto fait peur.

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Le RDPC au pouvoir est relativement discret sur cette affaire, mais quelques responsables du parti se sont contentés d’un commentaire lapidaire. Grégoire Owona, ministre du Travail et secrétaire général adjoint du RDPC, a d’abord estimé que « le droit a été dit », avant de développer davantage : « Le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur tous les recours. Nous devons tous nous soumettre aux décisions qui ont été prises. La compétition se poursuit. Les alliances se font et se défont. Nous sommes sereins au RDPC et nous poursuivons le travail. »

L’opposition en effervescence

Les réactions continuent de fuser, notamment dans les rangs de l’opposition. Anicet Ekane, du Manidem, qui avait investi Maurice Kamto, a salué dans un communiqué son courage et sa combativité. Jean-Michel Nintcheu, du Front pour le changement du Cameroun, a appelé à poursuivre la lutte, tandis que Djeukam Tchameni, autre figure politique influente, invite les électeurs à sanctionner la « dictature RDPC » dans les urnes, selon ses propres mots.

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Dans la société civile aussi, l’indignation est vive. L’avocat Félix Agbor Balla, président du Centre pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique, dénonce une décision qu’il juge lourde de conséquences.

La décision du Conseil constitutionnel d’éliminer le professeur Maurice Kamto n’est pas une simple décision juridique, c’est une profonde injustice. Elle envoie un message très dangereux : des voix crédibles peuvent être réduites au silence non pas par le processus électoral, mais par des institutions de plus en plus perçues comme compromises. Cette décision menace d’éroder la confiance du public dans nos processus démocratiques et compromet la légitimité de l’élection présidentielle de 2025. Face à l’injustice, nous devons répondre non par la violence ou le désespoir, mais par la résistance pacifique, la discipline civique et l’unité. Aujourd’hui plus que jamais, nous appelons tous les leaders de l’opposition, les acteurs de la société civile et le peuple camerounais à se lever pacifiquement contre cette injustice. Notre réponse doit être fondée sur la non-violence, la solidarité et l’organisation stratégique. Que l’histoire se souvienne que face à l’injustice, nous privilégions la paix à la provocation, l’unité à l’ego et la résistance à la résignation

Félix Agbor Balla, président du Centre pour les droits de l’homme et la démocratie en Afrique

Amélie Tulet

Vers une candidature unique de l’opposition ?

Dans ce contexte, l’idée d’un front commun se renforce. L’élimination de Maurice Kamto donne un nouvel élan aux discussions sur une candidature unique. Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya, candidate de l’UDC, a récemment cosigné la déclaration de Foumban appelant à une alliance pour l’alternance. Elle insiste : « Tous les républicains démocrates, nous allons nous retrouver pour une candidature unique autour d’un programme commun consensuel, parce que nous savons que les Camerounais dans leur grande majorité veulent en découdre avec un système, un régime en place depuis 43 ansC’est une question d’alternance pacifique par les urnes. Le Cameroun a besoin de la paix. Nous y aspirons ardemment. »

Les cosignataires attendent désormais la publication officielle de la liste définitive des candidats avant de se prononcer. Cette déclaration s’inscrit dans une dynamique plus large. Ces derniers mois, plusieurs appels à une candidature unique de l’opposition ont été lancés, notamment par la plateforme des Partisans du Changement du Grand Nord.

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