Bénin: Vodun Days – Quand culture et tourisme riment avec développement économique

À Ouidah, les manœuvres sont à l’œuvre en ce mois de décembre. Derniers coups de truelle, finitions de peinture, balais de sable… La cité historique se pare de ses plus beaux atours. Car chaque mois de janvier, cette petite ville côtière du sud du Bénin se transforme en capitale mondiale du Vodun.
Depuis le lancement des Vodun Days en 2024, l’événement a connu une ascension fulgurante : 97 000 visiteurs lors de la première édition, plus de 435 000 en 2025, selon l’Institut National de la Statistique et de la Démographie (INStaD). Une croissance spectaculaire en seulement deux éditions qui témoigne de l’envolée du tourisme culturel à Ouidah et du rôle central que joue désormais cette ville dans la stratégie de rayonnement patrimonial et économique du Bénin.
Située à 40 kilomètres de Cotonou, Ouidah est connue pour son histoire douloureuse liée à la traite négrière, mais aussi pour sa richesse culturelle. Depuis 2016, la ville est en pleine transformation. Le gouvernement a engagé un vaste programme de restauration de ses sites emblématiques : la restauration de la Porte du Non-Retour ou encore l’aménagement de la Place aux enchères.
À cela s’ajoute la construction d’infrastructures modernes comme l’Arène de Ouidah, inaugurée lors de l’édition 2025, qui a accueilli des milliers de spectateurs en bord de plage, et le futur Musée international de la Mémoire et de l’Esclavage (MIME), en cours de construction. Il ambitionne de devenir l’un des lieux culturels les plus emblématiques du continent, avec un parcours muséographique tourné vers l’histoire de la traite.
Le Vodun, moteur d’une nouvelle économie touristique
Dans une région où la religion traditionnelle est souvent reléguée dans l’ombre, le Bénin fait le choix inverse : assumer le Vodun comme héritage, l’élever au rang de bien commun et en faire une vitrine internationale. Et la montée en puissance des Vodun Days ne se limite pas à l’image. Elle a un impact économique immédiat sur la ville. Lors des précédentes éditions, les retombées ont été nettes : hôtels pris d’assaut, restaurants bondés, ventes record pour les artisans, explosion des petits métiers — guides, transporteurs, vendeurs ambulants. Certains commerçants ont vu leur chiffre d’affaires multiplié par cinq pendant la période de l’événement.
Et l’engouement ne se limite pas à Ouidah. Dans la capitale, Porto-Novo, un plan de modernisation des infrastructures et des monuments historiques est également en cours. Le gouvernement y prévoit notamment la construction du Musée International du Vodun. Et le Festival des Masques, qui s’est tenu en août, s’inscrit dans cette logique : enrichir l’offre événementielle nationale pour positionner le Bénin comme une destination culturelle incontournable en Afrique.
C’est une dynamique soutenue par les autorités locales, qui misent sur le tourisme pour stimuler l’emploi et renforcer les activités génératrices de revenus. « De nombreux jeunes trouvent ainsi des opportunités dans l’hébergement, la restauration, l’événementiel ou l’artisanat », souligne un responsable local.
Et Ouidah n’est pas un cas isolé. À Abomey comme à Cotonou, des projets similaires sont en cours. D’autres infrastructures muséales et mémorielles sont annoncées, confirmant une volonté politique de structurer un réseau national de pôles culturels et touristiques.
Une stratégie nationale à long terme
Si Ouidah est l’un des laboratoires les plus emblématiques de cette politique, la stratégie déployée par le gouvernement béninois s’étend à l’ensemble du territoire. Sur la décennie qui prend fin en 2026, près de 2 milliards d’euros ont été investis dans les secteurs du tourisme, de la culture et des arts. En juin dernier, le gouvernement a lancé un Plan stratégique de développement 2025–2029, doté d’un budget de 797,17 milliards de francs CFA (environ 1,4 milliard de dollars). Ce plan quinquennal vise à structurer l’offre culturelle, moderniser les infrastructures et faire de ces secteurs des moteurs de croissance durable.
Ce plan vise à porter la contribution du secteur au PIB national de 6 % à 13,4 % d’ici 2030, et à attirer plus de deux millions de visiteurs internationaux par an. Pour y parvenir, le pays mise sur des projets structurants : musées, hôtels, circuits touristiques, promotion à l’international.



