«Je commence à avoir un rôle de cadre», confie Lionel Mpasi, gardien de la RDC

À quelques jours du coup d’envoi de la CAN, RFI dévoile plusieurs entretiens avec ceux qui porteront les couleurs de leurs pays au Maroc. Lionel Mpasi, gardien de la RDC et héros des Léopards pendant l’épopée de l’édition ivoirienne en 2024, est de retour comme numéro 1 dans les cages congolaises. Son parcours accidenté, son statut en sélection, ses ambitions. Lionel Mpasi se dévoile au micro de RFI.

Vous avez retrouvé une place de titulaire dans les buts des Léopards ces derniers mois. Avant ça, depuis la dernière CAN, il y a eu un long moment où vous étiez repassé numéro deux derrière Dimitri Berthaud. Comment avez-vous vécu cette période ?

Quand tu reviens et que tu vois que ce n’est pas toi qui commences dans le but, ça fait un peu mal à l’ego. Mais, quand je suis arrivé en sélection, j’étais gardien numéro deux. J’ai dû patienter pour récupérer le poste. J’estime que c’est juste une question d’opportunité. Quand on te donne l’occasion de montrer et que tu la saisis, tu restes, sinon, tu sautes. Je savais qu’il fallait être patient et continuer à travailler.

Vous avez aussi connu de longues blessures, au genou, au tibia. Votre carrière est faite d’épreuves à surmonter. Qu’est-ce que vous en avez tiré ?

Je pense que ce genre de moments difficiles forgent le mental, et c’est une bonne chose. Parce que s’il ne t’arrive jamais de galère, si tu n’as jamais de moments compliqués, c’est dur de se remettre en question, de s’accrocher, d’avoir un but. Tout cela m’a beaucoup aidé parce qu’il fallait que je bosse deux fois plus. Quand tu es blessé, on t’oublie. Malgré ce que tu as pu faire dans le passé. C’est comme ça. C’est le foot, c’est le moment présent.

Votre signature au Havre, en première division française, vous a-t-elle aidé à reprendre cette place de numéro 1 en sélection ?

Je pense que ça m’a apporté parce que je découvre un autre niveau. Je bosse avec des gens super compétents. C’est la Ligue 1, c’est le plus haut niveau français et donc, ça se ressent.

Je n’ai pas lâché, j’ai continué de travailler, l’opportunité s’est représentée… et je l’ai saisie !

Justement, en parlant du Havre, Steve Mandanda est un de vos modèles au poste de gardien de but. Il a commencé ici, il est franco-congolais comme vous. Ça fait mal de points en commun.

(sourire) Il y a beaucoup de similitudes !

Vous avez échangé depuis votre signature ici ?

Je l’ai vu quand on a joué contre l’OM ! Il y avait son entrée au Hall of Fame. Ils avaient retiré son numéro. Je l’ai croisé dans les couloirs. C’était la première fois et on a un peu échangé. Juste le fait que Steve Mandanda me connaisse, c’est gratifiant. On a échangé quelques mots, ça fait super plaisir parce qu’il a une carrière incroyable. Quand tu es gardien de but, tu es obligé d’avoir connu les années Steve Mandanda au plus haut niveau. Bien sûr, c’est un exemple pour nous tous.

Vous avez pris quelques conseils ? Même si vous n’en êtes plus au début de votre carrière…

Au contraire, il m’a dit que j’étais encore tout jeune, que j’avais le temps ! Lui a joué très longtemps… Franchement, j’aimerais bien avoir sa longévité.

Faisons un retour en arrière en 2024 en Côte d’Ivoire, et ce fameux tir au but victorieux contre l’Égypte en huitième de finale ! Vous restez le héros de cette folle soirée. Quel souvenir en avez-vous deux ans après ?

C’était un moment exceptionnel. Ce pénalty me suivra toute ma vie parce que quand je retourne en RDC, les gens m’identifient à ça. Je me suis fait connaître auprès du public congolais, parce qu’ils ne me connaissaient pas forcément avant. J’avais pris le poste un peu avant la CAN, j’avais fait un match référence pendant les qualifications contre le Gabon. Mais, à part ça, ils ne me connaissaient pas vraiment.

Le regard sur vous a changé ensuite ?

Oui, forcément. Je me souviens, après le premier match contre la Zambie (1-1), j’avais reçu pas mal de critiques car sur le but qu’on prend, je sors loin de ma ligne. C’était un peu hasardeux, on va dire. Ma mère m’avait appelé et m’a dit : « Regarde, maintenant, les gens parlent de toi. Ils connaissent ton nom. À présent, tu vas leur montrer. » Et c’est ce qu’il s’est passé. On a été jusqu’en demi-finale et c’était génial.

Et pour cette CAN au Maroc, l’objectif sera de faire mieux ? Ou dans un premier temps de sortir d’un groupe piégeux avec le Sénégal, le Bénin et le Botswana ?

Depuis que le sélectionneur Sébastien Desabre est arrivé, on est en constante progression et à chaque rassemblement, on a toujours à cœur de faire mieux. Il n’y a pas d’objectifs clairs qui ont été donnés.  Mais je pense que dans la tête de tout le monde, c’est clair qu’on est au moins capable d’aller en demi-finale d’une CAN. Alors, pourquoi ne pas aller chercher le trophée ?

Si vous deviez choisir entre gagner la CAN ou vous qualifier à la Coupe du Monde avec la RDC ?

(Il hésite) Me qualifier à la Coupe du monde. Parce que ça fait plus de cinquante ans, et je pense que les Congolais le méritent. Mais ça mériterait de poser la question aux supporters là-bas pour savoir ce qu’eux, ils préfèreraient ! Mais, quand je vois le bonheur que ça procure à mes proches lorsqu’ils me voient sur le terrain en sélection, je me dis que les amener aux États-Unis pour la Coupe du Monde ce serait… (il ne finit pas sa phrase). Et puis, je pourrais dire que j’ai vécu tout ce que j’avais à vivre dans le foot !

Comment le groupe a-t-il changé pendant ces deux ans ? Vous êtes meilleurs qu’en Côte d’Ivoire ?

Oui, je pense. Le coach fait un travail exceptionnel. Il a réussi à ramener des joueurs comme Aaron Wan-Bissaka, Ngal’ayel Mukau. Ce sont des joueurs qui apportent un plus à notre équipe, qui était déjà solide. Le potentiel est réellement là. Et, au Maroc, on aura la chance d’avoir des infrastructures exceptionnelles, ce qu’on n’a pas forcément l’habitude de retrouver chez nous en RDC malheureusement. Je pense que ça va révéler le potentiel de l’équipe au maximum.

À titre personnel, quel est votre rôle au sein des Léopards ? Vous devenez un peu plus leader ?

Je commence à avoir un rôle d’ancien malgré moi. Cela fait trois ans que je suis en sélection, même si je n’en ai pas forcément l’impression parce qu’on ne sent pas le temps passer. Oui, forcément, j’aurai un rôle de cadre au Maroc.

J’ai déjà vécu une CAN et ce n’est pas rien. Je me souviens de la sensation que j’avais avant le premier match contre la Zambie il y a deux ans. J’ai ressenti beaucoup de pression parce que c’est une grande compétition et que tu n’es plus devant ta télé. Tu es à l’intérieur, et tu sais que tout le monde va regarder.

Votre carrière a pris une autre dimension avec la sélection. Après le centre de formation du PSG, vous êtes passé par plusieurs clubs (Toulouse, Rodez) où vous deviez vous battre pour faire votre place. D’un coup, vous voilà numéro 1 en sélection, à disputer une Coupe d’Afrique. Vous étiez prêt à vivre ce genre d’émotion ?

Tant bien que mal, j’y suis arrivé ! Je me rappelle quand je jouais en Ligue 2 à Rodez, quand je rentrais après la sélection, je disais à mes coéquipiers : « Les gars, jouer en Afrique, en RDC, devant 80 000 personnes, c’est quelque chose ! » Il faut le voir pour le croire. En France, on a des ambiances incroyables, comme à Lens, à Marseille. Mais là, c’est vraiment une autre dimension. J’essaie de profiter à chaque moment. Au stade des Martyrs, quand le ballon est loin de mes buts, je regarde les tribunes, et je profite. Je me dis qu’après toutes ces années, la récompense est là.

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