Madagascar: réactions mesurées après les propos de la ministre de la Justice sur le président

« Madagascar va lancer avant la fin de l’année des procédures judiciaires contre le président déchu Andry Rajoelina » a déclaré lundi 1er décembre sur RFI la ministre de la Justice malgache, Fanirisoa Ernaivo. Sur la Grande Île, cette annonce ne manque pas de faire réagir la Gen Z et l’ONG Transparency International. Ces acteurs engagés attendent que les anciens dirigeants rendent des comptes. Pour autant, expliquent-ils, la promesse de futures procédures judiciaires contre le président renversé ne doit pas conduire à baisser la garde face aux autorités de transition.
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Avec notre correspondant à Antananarivo, Guilhem Fabry
La ministre de la Justice, Fanirisoa Ernaivo, a évoqué sur RFI un délai de quelques semaines avant que ne soient dévoilés les faits précis sur lesquels reposera la procédure à l’encontre de l’ancien chef d’État malgache, Andry Rajoelina, en fuite à l’étranger. La Gen Z espérait cette annonce, explique Mihary Rakotondravelo, l’un de ses porte-paroles.
« Pour ceux qui ont vraiment commis des méfaits, des crimes à l’encontre du pays et du peuple malagasy, nous avons besoin que justice soit faite. La ministre annonce des poursuites, ce qui va vraiment attiser encore plus l’espoir et surtout renforcer a priori la confiance du peuple envers des dirigeants. On se demande en fait si ce n’est pas juste une annonce populiste. Les résultats parleront d’eux-mêmes. On l’attend au tournant parce que le mouvement se positionne toujours comme un contre-pouvoir, un lanceur d’alerte » prévient-il.
Pour Ketakandrina Rafitoson, politologue et membre de l’ONG anti-corruption Transparency International Initiative Madagascar, les anciens dirigeants doivent rendre des comptes, mais elle met aussi en garde. « Toute procédure qui vise à lutter contre l’impunité doit être saluée en principe. Il est impensable de laisser les anciens responsables bien tranquilles là où ils sont sans les tenir responsables de leurs mandats. Tout le monde craignait qu’ils s’exilent dans leurs paradis dorés et qu’on n’entende plus parler d’eux. Une partie de l’opinion est ainsi soulagée que des enquêtes soient ouvertes », explique-t-elle.
« Nous ne voulons pas de chasses aux sorcières »
« Il n’empêche, l’historique malgache des transitions démontre que lors de l’installation d’un nouveau régime, il y a toujours des sortes de chasses aux sorcières, de purges contre les ennemis politiques d’hier, qui sont entamées par la voie de la justice. Nous ne voulons pas que cela se répète. Si des poursuites existent, il faut qu’elles se fassent strictement dans le cadre de la loi, sans revanche politique. Sinon, cela irait complètement à l’encontre de la philosophie attendue par le grand public lorsque l’on parle de Refondation », ajoute Ketakandrina Rafitoson.
« Ce qu’il faut défendre ici, ce sont des principes : l’indépendance de la justice, l’égalité devant la loi pour tous, la lutte contre la corruption bien sûr, la transparence de l’action publique », conclut la politologue.
Ce n’est qu’après l’ouverture de procédures judiciaires contre Andry Rajoelina que Madagascar pourrait émettre un mandat d’arrêt international à son encontre. Selon la ministre de la Justice, une condamnation est par ailleurs un préalable à toute demande d’extradition vers la Grande Île.
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