Un livre pour accompagner les premiers pas d'enfants africains dans leur langue maternelle

Mon premier livre en Dioula, Mon premier livre en Baoulé, etc. La micro-entreprise Topeci, basée à Abidjan, a décidé d’éditer en 2024 des livres ludiques et pédagogiques pour les enfants. Le but est que les petits reprennent contact avec leur langue maternelle, qui n’est pas toujours enseignée dans les écoles, ni dans le cercle familial.
« « I ni cé », ça veut dire merci. « Un ka mé », ça veut dire : J’ai compris ! » : ce jeune ivoirien âgé de six ans et scolarisé en France a compris et maîtrise sa propre langue. Dans l’Hexagone, le dioula ou bien le bambara ne sont pas vraiment enseignés. C’est pour lui et pour tous les enfants dont les parents négligent de transmettre ce précieux trésor qu’est la langue maternelle que Jean-Marc Bonny et sa compagne Cindy Kouakou ont eu l’idée de créer la société Topeci, qui édite des livres ludiques en langue africaine. Les deux premiers ouvrages sont en baoulé et en dioula. L’Ivoirien Jean-Marc Bonny, rencontré à la Biennale Euro Africa de Montpellier, est fier de présenter ses bébés en langue dioula et baoulé.

« »Mon premier livre en Dioula » français est un livre bilingue dioula et français. Ce sont plus de 150 mots qu’il y a dans le livre. Ce livre consiste en fait à apprendre la langue dioula dans tout son sens aux enfants, tous les mots de base. Nous avons des thèmes qui partent depuis les formules de politesse jusqu’aux métiers, tout en apprenant à compter, à comprendre le nom des fruits et légumes, les jours de la semaine. Par exemple, on parle de l’histoire de Félix Houphouët-Boigny, on parle de l’histoire de Sékou Ouattara… Vraiment, il y a pas mal de petites histoires, de thèmes, d’apprentissages. L’enfant entend ce qu’il voit, écrit ou dessine. Par exemple, là, on voit le gombo. En dioula, cela se dit « gan ». Donc si l’enfant appuie sur le dessin du gombo, ça va lui dire »gombo » en français puis en dioula. »
Livre ludique et pédagogique
Et pour que la langue sonne juste, il a fallu s’assurer la bonne diction, l’accent correct, l’intonation de circonstance… C’est un confrère de RFI Mandenkan, Oumarou Sidibé, journaliste, professeur et référent linguistique, qui est mis à l’honneur, puisque c’est lui que Jean-Marc Bonny a sollicité comme conseiller en langue dioula.

« Au-delà des enfants, on a de grandes personnes qui apprennent la langue, mais parfois, il leur est difficile de retenir des choses assez sérieuses lorsque nous leur enseignons. En revanche, quand cela relève du jeu ou de choses ludiques comme pour ce livre, cela reste facile à retenir. Je ne sais pas pourquoi, cela est mémorisé beaucoup plus facilement. Donc le ludique associé à la pédagogie permet aux enfants de mieux apprendre », explique-t-il. Au-delà du langage, d’une langue, c’est aussi une culture qui est préservée, souligne le journaliste, ce à quoi souscrit Jean-Marc Bonny.

Une graine à semer dans le cœur des tout petits
« C’est très important de préserver cela, surtout dans la diaspora. Ici [en Europe, NDLR], quand tu vois un enfant africain, la majeure partie du temps, il ne comprend pas sa langue, il ne sait même pas d’où il vient. Les enfants, ici, connaissent mieux Spider-Man que, par exemple, les super héros de chez nous, Soundjata Keïta, la reine Abla Pokou… Et nous, notre objectif, c’est de reconnecter ces enfants-là à leur culture, parce que même s’ils ne vont pas en Afrique, au moins, ils ont un outil qui parle d’eux, qui leur ressemble. Parce que pour nous, un enfant qui est éduqué dans sa culture, c’est un adulte fier de ses origines. C’est cette graine que nous voulons semer dans le cœur de ces tout-petits », reprend Jean-Marc Bonny.
Et pour continuer à semer des graines en langue africaine, les éditions Topeci ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin. Prochaine étape : trouver des financements afin d’éditer un livre en langue bété et un autre en langue fulfuldé.



