Sénégal: Agrosaafi et Mamelles Jaboot – Deux industries qui ont pour crédo la valorisation des céréales locales

Dakar — Les industries Agrosaafi et Mamelles Jaboot qui s’activent dans le secteur de l’agro-alimentaire ont pour « seul objectif la consommation et la valorisation des céréales locales », ont confié leurs promoteurs.
Le fondateur de Agrosaafi, a indiqué que « c’est un constat qui a provoqué un déclic » chez lui. « Avant de monter Agrosaafi, on s’était rendu compte que les Sénégalais voulaient disposer de céréales locales transformées de qualité et que la valorisation des produits agricoles était un secteur à fort potentiel », a expliqué Babacar Cissé, à des journalistes en visite sur son site industriel à l’initiative l’Agence de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (ADEPME).
L’unité industrielle, créée en 2010 et spécialisée dans la transformation de céréales locales, est basée à Sindia. Elle est construite sur un terrain de 4000 mètres carré.
« En 2010, nous avons démarré avec la marque +Saafia+ qui est une diversité de céréales transformées à partir du mil, du maïs et du sorgho », raconte M. Cissé.
Restez informé des derniers gros titres sur WhatsApp | LinkedIn
La marque « Saafi » est inspirée de « safène » du nom de la communauté (l’ethnie sérère), qui habite la zone.
« A partir de 2018, nous avons lancé une gamme de céréales instantanées pour les bébés grâce au soutien de l’ADEPME qui nous a aidé à collaborer avec un expert en formulation », poursuit le directeur d’Agrosaafi.
Babacar Cissé a souligné que l’ADEPME l’a beaucoup soutenu à ses débuts, ce qui lui a permis d’agrandir son offre et faire évoluer son industrie.
« Nous employons beaucoup de femmes et de jeunes qui jadis étaient victimes de l’exode rurale. Là, on leur permet de rester dans leur terroir », a dit M. Cissé. Il a fait savoir qu’Agrosaafi collabore avec des femmes cultivatrices qui lui vendent le mil, la principale matière première qu’il utilise. Cependant, il estime qu’il faut un dispositif d’encadrement plus fiable pour valoriser le secteur.
La contrainte « majeure » est celle du financement, a t-il déclaré, ajoutant qu’il évolue, principalement, « sur fonds propres ».
« Les banques qui doivent fournir les ressources longues ne suivent pas », affirme-t-il.
En dépit de ces contraintes, Babacar Cissé continue d’innover avec la création, il y a trois ans, à Sédhiou (Sud), d’une gamme de jus faits à partir de fruits de la Casamance comme le « maad », le « ditakh » et la mangue.
Pour Pierre Ndiaye, fondateur des Mamelles Jaboot, en 1995 à Thiès, « les céréales locales restent la base du développement ».
« Il faut que le paysan s’approprie le mil, non pas seulement pour vivre mais pour en vivre ; et que nous, nous ayons la possibilité de créer de la valeur ajoutée », affirme-t-il avec passion.
Son unité industrielle, basée à Thiès, produit 40 tonnes de mil dans le mois.
« Il faut faire la promotion du consommer local. On ne doit pas être complexé de manger ce qui vient de chez soi », estime M. Ndiaye avec conviction.
La politique ne changera pas le pays mais c’est plutôt l’économie interne qui va contribuer au développement, selon Pierre Ndiaye persuadé que le développement économique viendra de « l’esprit entrepreneurial » des sénégalais.
« J’ai 75 ans et je suis engagé. J’invite les gens a créer des entreprises familiales. La nature nous donne tellement d’opportunités, il faut les saisir », soutient-il.
Les Mamelles Jaboot est une entreprise familiale détenue par 4 actionnaires dont le fondateur, son épouse, sa fille ainée et son fils.
« Nous voulons que ce que nous avons accompli serve d’exemple aux générations futures pour qu’elles se disent que c’est possible », assure Pierre Ndiaye qui a démarré avec la production de yaourt, sous le label « Yaourt Jaboot ». Mais très tôt, il dit avoir compris que le yaourt associé aux céréales locales est un aliment « complet et économique ».
Issu d’une famille de cultivateur, il maîtrise la filière mil. Son principal objectif était d’être sur tous les maillons de la chaîne de valeur.
« Nous avons résolu le problème de la traçabilité sur toute la chaine de valeur en partant du mil récolté au produit fini de qualité », confie-t-il fièrement. De 2011 à 2025, Mamelles Jaboot est passée de 500 kg à 2 tonnes 700 kg à l’hectare sur les mêmes terres agricoles.
L’unité produit une tonne de farine à l’heure et cela leur permet de faire des contrats de vente avant production. « Il n’y a plus de paysans mais des entrepreneurs agricoles qui travaillent avec nous », insiste-t-il.
Il envisage une collaboration avec des écoles pour que les bouillies de mil soient servis aux élèves le matin.
Le fondateur des Mamelles Jaboot souhaite aussi mettre sur pied des cantines un peu partout sur le territoire, tenues par des femmes qui vont vendre du « fondé » (bouillie de mil) « de qualité ». Pierre Ndiaye ne néglige rien. Il explore toutes les pistes et projets qui peuvent faire développer la filière mil.
« Un industriel ne dort pas, il somnole », affirme-t-il le sourire aux lèvres.
L’ADPME a organisé cette visite pour inciter les journalistes à s’intéresser au secteur de l’agro-alimentaire et valoriser les PME/PMI du Sénégal.

