Mali: les médias sous pression des autorités

Au Mali, en cinq années de Transition, les libertés publiques se sont considérablement réduites. Les partis politiques ont été dissous, la presse et les réseaux sociaux sont sous surveillance et les procédures judiciaires ou administratives contre les voix trop critiques sont nombreuses. Depuis plus de deux mois, les attaques jihadistes se multiplient et le pays subit une pénurie de carburant imposée par le Jnim, lié à al-Qaïda. Dans ce contexte, s’écarter du discours officiel n’est pas sans risque. Plusieurs médias ont été sanctionnés ces derniers jours.

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Au Mali, après la convocation de ses dirigeants mardi 18 novembre par la HAC, la Haute autorité de la communication, la chaîne Joliba TV attend toujours d’être fixée sur son sort. En cause : un reportage sur la fuite des habitants de Loulouni, à la suite d’attaques perpétrées par les jihadistes du Jnim. Après le retrait des jihadistes, les forces maliennes ont repris le contrôle de la ville. La chaîne a également consacré un reportage à l’arrivée des soldats maliens à Loulouni. 

Joliba TV avait été suspendue il y a tout juste un an, en novembre 2024, pour une durée de six mois, après la diffusion d’un débat mettant en cause la véracité d’un supposé coup d’État déjoué au Burkina. 

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Trois radios suspendues

Trois radios locales ont quant à elles déjà cessé d’émettre, après avoir été suspendues le 13 novembre, la semaine dernière, pour une durée de trois mois.

La radio Aadar Koïma de Gao est sanctionnée pour avoir mis en cause, dans un journal diffusé le 4 novembre, le comportement de certains militaires lors de patrouilles nocturnes, accusés de complicités avec des voleurs de boutique. Un « dénigrement diffamatoire » selon la HAC.

La radio Aadar Koukia d’Ansongo avait quant à elle évoqué le 2 novembre l’existence d’un mouvement de contestation défavorable aux autorités de transition. Des « allégations sans fondements » et pouvant nuire à « l’ordre public », selon le régulateur malien.

Au début du mois, deux journalistes de ces radios avaient été arrêtés par la gendarmerie et brièvement détenus pour ces mêmes faits. 

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Polémique autour du ministre Abdoulaye Diop

La sanction est la même, trois mois de suspension, pour la radio Kayira de Kolondieba, région de Sikasso. Cette radio appartient à un réseau fondé par le parti politique Sadi, de l’opposant en exil Oumar Mariko. En cause, une émission du 26 octobre au cours de laquelle ont été commentés des propos du ministre des Affaires étrangères. Abdoulaye Diop avait déclaré que Modibo Keïta, premier président du Mali indépendant, était « un instituteur » qui n’avait « pas été préparé à diriger un pays. » Devant la vague d’indignation suscitée, le ministre était même revenu sur ses déclarations, dans un message publié sur les réseaux sociaux. 

Les commentaires tenus par le journaliste et par les auditeurs qui sont intervenus dans l’émission ont cependant été jugés « médisants » et « diffamatoires » par la HAC, qui a donc suspendu Radio Kayira Kolondieba pour trois mois. 

Enfin, le directeur de publication du journal l’Empire, Boubacar Traoré, est quant à lui en prison depuis le 14 novembre. Il est poursuivi devant le pôle judiciaire anti-cybercriminalité en raison d’un article mettant en cause une entreprise du secteur pétrolier, Petro-Bama, dans un contexte d’embargo jihadiste sur le carburant. L’entreprise a porté plainte. La date du procès n’est pas encore connue. Le journaliste attendra en prison d’être jugé.

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